[Septembre 551] Une commande particulière (Solo Esmelia)

Alors que les pigments se dessinaient sur la toile du destin, une jeune femme travaillait sur une des grandes fresques de la Tour des Vents. Elle avait eu cet honneur par la volonté d'Apollon. Le petits tapotements des sculpteurs, les odeurs des encres des scribes se mélangeaient aux odeurs automnales des couleurs de la saison qui approchait. Esmélia travaillait depuis un moment quand elle reçut la visite du Grand Maître des arts de la Tour, Marcus, il l'informa qu'une cliente particulière était arrivée et souhaitait profiter des services des peintres.

Alors qu'un voile se levait derrière Marcus, une jeune femme à la peau d'ébène entrait en scène. Elle portait une belle robe venant du levant et ses cheveux étaient tressés selon les coutumes des peuples africains. Ce qui pouvait marquer, c'était cette essence qui s'échappait de ses yeux. D'un vert pâle luminescent, elle observait les avancées de l'immense fresque qui se trouvait derrière tous les protagonistes. Un léger sourire s'esquissa sur ses lipes et elle s'adressa à l'artiste qui semblait en être la responsable.

" Veuillez accepter toutes mes excuses Marcus, votre protégée méritait vos éloges. Voici une oeuvre qui sied aux Rois et aux Dieux. Esmélia c'est cela ? Je suis Kel-Nach, reine d'Ur et mécène à mes heures. J'aimerai offrir à une noble personne quelque chose d'exceptionnel, est ce possible que nous discutions de cette commande ? "

La femme était d'une beauté diaphane, comme une perle noire enchâssée dans cette peinture que l'on pourrait appeler la réalité. Tout semblait excessif et doux en elle, ses iris fixaient ceux de la belle peintre comme une possible proie pour des plaisirs interdits. C'était palpable mais un raclement de gorge calma la Reine, Marcus semblait connaître ses goûts et elle prenait sur elle de ne pas susurrer des pigments plus suaves à travers ses lèvres. Un sourire aux lèvres, elle attendait néanmoins la réponse de la promise.

Bien que ce soit un travail éprouvant, la peinture sur fresque est l'une des formes d'art que j'apprécie le plus car elle est faite généralement en collaboration avec d'autres artistes. La solitude ne me dérange pas bien sûr, et je le suis souvent lorsque je dois faire une toile ou peindre un portrait d'ailleurs. Appliquer le plâtre sur le mur, le lisser puis peindre par dessus, des gestes faits et refaits des dizaines de fois déjà. Mon bras est assuré maintenant, ma technique bien huilée. J'ai même développé quelques muscles ! La voix de Marcus m'interpelle et je m'arrête dans mon ouvrage. Je quitte l’échafaudage sur lequel j'étais juchée pour le rejoindre. Derrière lui je me rends compte qu'une femme est présente. Elle est magnifique et ses yeux semblent irréels tel qu'on en trouve dans les livres aux histoires fantastiques sorties de l'imaginaire d'un génie. Je comprends tout de suite qu'il ne s'agit pas de n'importe qui. Elle est spéciale et pour moi qui suis juste humaine, ça a quelque chose d'intimidant. Mes cheveux blonds ont commencé à se teinter de reflets bleutés depuis quelques jours, mais rien d'aussi exceptionnel que ces volutes turquoises phosphorescentes. J'imagine qu'elle doit venir de loin et sa présentation me le confirme. J'effectue une respectueuse révérence. Je ne connais pas les façons protocolaires de saluer une reine sumérienne, aussi j'espère que celle-ci lui conviendra. Je vis dans une Tour volante et pourtant je suis encore surprise de ce que je peux découvrir d'extraordinaire comme cette femme par exemple.

- C'est exact. C'est un honneur de vous rencontrer majesté. Quelque chose d'exceptionnel ? Voilà qui est intrigant, je suis curieuse d'en savoir plus. Bien sûr c'est possible. Je n'ai rien d'urgent à faire.

Et le Maître des Arts ne l'aurait pas guidée jusqu'à moi si ça avait été le cas de toute façon. Je regarde Marcus pour savoir s'il y a un endroit où nous pouvons discuter ou si rester ici fera l'affaire. Cela ne me dérange pas de rester debout, mais pour une femme de cette qualité peut-être qu'un endroit plus approprié serait mieux. Les rencontres de ce genre ne me sont pas familières. Mes anciens mécènes me recevaient dans leur propre bureau ou venaient directement dans mon atelier mais aucun n'était de sang royal.

La reine observa un instant la fresque qui était en cours de travaux. Elle toucha de ses doigts la surface et amener quelques pigments à ses narines. Inspirant un peu, elle semblait analyser les odeurs qu'elle percevait actuellement. Puis, elle rouvrit les yeux en se tournant vers l'artiste en question.

" J'apprécie vos choix de plantes et de fruits pour vos pigments. C'est rare que les gens de nos jours fassent l'effort de comprendre la nature pour ce qu'elle est. Venons en au fait de ma présence ! Ma commande est un peu spéciale.... "

Elle prit un moment de silence afin de réfléchir quelques instants.

" J'aimerai que vous exprimiez l'homme dans la nature la plus sauvage, dans l'ivresse de l'instant. Je vous laisse libre de mettre en forme votre oeuvre, vous êtes l'artiste après tout, est ce du champ de vos possibles ? Ah et je dispose de quelques pigments que j'aimerai voir inclus dans votre tableau. "

Elle sortit alors une bourse avec à l'intérieur des fioles en terre cuite. Il y en avait quatre et autant de teintes de vert différents. Posant avec soin les fioles sur un petit banc, elle se releva et tourna la tête vers Marcus.

" Serait ce possible de séjourner ici jusqu'à la réalisation du tableau ? "

Marcus répondit par un oui de la tête et parla à Esmélia.

" Si vous aviez déjà quelques idées pour votre oeuvre, je serais curieux de vous l'entendre nous la présenter ? Si c'est possible encore une fois... "

Intriguée, j'observe la reine examiner les pigments et s'intéresser à la fresque. À sa réflexion j'ai comme l'impression qu'elle semble s'y connaître en peinture et en pigments. Si ça n'avait pas été le cas, serait-elle venue jusqu'ici pour sa toile ? Elle me regarde et me dévoile le thème de sa commande. Avant que je ne commence à réfléchir au choix des possibles, elle me parle de pigments que je devrai utiliser. Avec grand intérêt, je les observe, ose les prendre en main pour en constater le contenu. Du vert, plusieurs verts différents. J'en déduis qu'au terme nature il faut prendre cela au sens propre, plantes, végétation… Quelques idées commencent à me venir, mais il faut que je réfléchisse à la question.

- Je vais le faire bien sûr, j'apprécie les défis.

Quant à savoir ce que j'ai comme idée, je prends le temps de réfléchir à ce qui me vient. Nature sauvage ne peut faire référence à un jardin, excepté le jardin d'Eden à la rigueur. Mais rien de dompté ou de façonné par l'homme.

- J'imagine une forêt dense, peut-être tropicale, une sorte de jungle ça apporterait un côté sauvage. Et s'il l'on poursuit sur cette idée...

je rougis forcément ça me met mal à l'aise ce que je vais dire, mais la nature est ce qu'elle est, il faut bien en passer par là et puis les sculpteurs grecs ne s'embarrassent pas de pudeur après tout… je trouverai bien un moyen de contourner le mot qui me fait monter le rose aux joues.

- Un homme ou une femme d'ailleurs, éventuellement plusieurs représentés sans vêtement.

Voilà qui est bien esquivé ! Je tâtonne, essaie de voir ce qui peut coller à la demande. J'observe les réactions, essaie de voir si je suis sur la bonne voie ou complètement à côté de l'idée que la noble femme se fait de son tableau.

- Si vous aviez déjà des idées d'ailleurs, n'hésitez pas à préciser votre pensée. Sinon pour poursuivre sur le thème d'ivresse de l'instant, j'imagine mal représenter les hommes en état d'ébriété, un verre à la main en pleine nature ce n'est pas très cohérent, on perd l'aspect sauvage. Cela pourrait être un moment de chasse éventuellement, avec ce sentiment de joie lorsque la proie est vaincue. Mais je ne sais pas… Je n'ai jamais été chasseuse, alors je ne sais pas ce que l'on peut sentir à ce moment-là, je me dis que ce n'est peut-être pas assez intense. C'est un premier jet d'idées, j'en ai d'autres, mais déjà je voudrais avoir votre avis sur ce début, que je n'approfondisse pas si je pars sur la mauvaise voie.

Je les regarde avec attention, elle surtout, et essaie de voir si ça lui plaît, espère qu'elle me guidera un peu. Le thème choisi est à la fois restreint et vaste. J'ai bien imaginé des Nymphes à un moment, car elles représentent très bien l'allégresse, mais ! Ce ne sont pas de simples hommes, alors a priori cela ne correspondrait pas.

La Reine écouta avec attention la description que l'artiste lui proposait et opina au fur et à mesure des propositions. Faisant quelques pas en tournant à droite et à gauche, elle prit le temps de la réflexion. Posant ses yeux sur les pigments qui se trouvaient sur le côté, elle se décida enfin.

" Bien, vos idées sont intéressantes, je commande donc votre proposition. Possible de me terminer cela dans combien de temps ? "

Elle espérait quelques mois, au moins une année. Consciente que ce genre de travaux demandait la patience et la raison. Prenant bonne mesure, elle tentait de comprendre au mieux les impératifs que cela comportait. Puis, elle s'assit au bout d'un moment et leva la tête vers la jeune artiste.

" Si je vous donnais mes idées, ce ne serait pas votre oeuvre. Je souhaite voir jusqu'où vous pouvez me surprendre. Marcus ne m'a pas dit d'où vous veniez ? Je ne crois pas qu'il m'est mentionné auprès de qui vous avez appris votre art. "

Un zest de curiosité traversa ses iris. Amusée par la situation, un silence prit lentement la place en attendant la réponse de son hôte. Elle était ailleurs, comme emporté dans ses propres souvenirs. Elle rêvait, s'évadait à se manière. Son esprit tanguait lentement et elle utilisait toute son énergie pour ne pas s'endormir dans des roses de luxure et de volupté. Le domaine d'Apollon n'était pas lieu le plus propice à éteindre l'incendie qui montait en elle. Comme un masque d'ivoire dont elle se parait, elle attendait. L'envie de se jeter dans le vide, de vivre des sensations que les mortels rejetaient, c'était cela la véritable volupté de toute chose après tout.

Un silence se brisa et la parole reprit ses droits....

La proposition est acceptée et je suis soulagée. J'ai eu peur à un moment de devoir lui proposer de peindre des personnes en pleins ébats. Cela aurait été très très gênant. Pas impossible, mais un peu compliqué. Cela dit, des humains nus ça allait être pas mal non plus dans leur genre, peut-être même plus finalement, car il y a des choses qui sont plus facilement masquables lors d'une étreinte. Je souris. Ce serait une sacrée expérience, j'espère juste que l'on me donnera les moyens de réaliser cette commande. Je ne pourrais rien faire sur la seule base de mon imaginaire et copier les images de livres ou d'autres peintures ne me plaît pas.

- C'est assez difficile de vous répondre avec exactitude. Un tableau ce n'est pas juste l'action de peindre. J'ai tout un travail à réaliser en amont et ça va dépendre de cela principalement. Oh et il me faudra aussi savoir quelle taille vous souhaitez pour la toile.

Je me tourne vers Marcus, parce que c'est lui qui pourra m'aider sur ces différents points de préparation.

- Je vais avoir besoin de modèles, de personnes qui acceptent de poser pour moi. Peut-être que Sa Majesté voudra les choisir ? Il faudrait aussi que je me rende sur place pour m'imprégner de la réalité de la nature. Disposition des plantes, type de végétaux, ambiance… Est-ce que ce serait possible de m'organiser cela ?

Ma demande concernant aussi la reine sumérienne je pose mes yeux d'or sur elle. Il est possible qu'elle me dise à nouveau que je suis totalement libre, mais je ne sais pas trop comment le prendre. Je ne me sens pas à l'aise sur ce choix-là. La beauté humaine est subjective et dépend de chacun de nous. Mes préférences pourraient ne pas être les mêmes que les siennes. Cela étant, je travaille toujours en pensant au destinataire de la toile afin de faire les choix qui me semble les plus juste et que mes œuvres reflètent au mieux leurs attentes et pas les miennes.

- Pour vous répondre, cela va donc dépendre de la durée du voyage. Je pense que quelques jours sur place, une semaine tout au plus, seront suffisants pour faire assez de croquis et à mon retour, en fonction de la taille de la toile cela prendra plus ou moins de temps aussi. Si je me consacre entièrement à cette commande, un mois après le voyage serait suffisant pour une toile de taille normale, et proportionnellement plus de temps si plus grande surface à recouvrir.

Le Grand Maître s'approcha alors.

" Pas de souci, je vais organiser pour vous le voyage en Illyrie. Je pense que cette forêt sera la plus propice pour vos recherches, nous devrons prendre garde, certaines rumeurs affirment qu'elle est sous la protection d'Artémis en personne. Pour les toiles, connaissant les goûts de notre invitée, je pense qu'il faudra le faire en quatre plans de toiles de parchemins, cela vous irait Madame ? "

Kel-Nach approuva la proposition de Marcus et celui-ci continua.

" Vous pourrez partir quand vous le désirerez ! Je vous manderai une escorte lors de votre voyage ! "

L'Illyrie n'était pas à côté après tout. La solution la plus simple était de prendre la route, ce serait l'occasion de connaître différents paysages. Pour les Poseurs, elle aurait le libre choix au sein de la Tour, bien des jeunes femmes et jeunes hommes posaient pour les peintres et les sculpteurs. Il fit signe à la Reine et à la jeune artiste de le suivre dans les couloirs et ils arrivèrent dans une grande place où des jeunes personnes discutaient en personne.

" Faites votre choix. "

La reine se tourna vers Esmélia pour l'inviter à l'accompagner. Ils regardèrent ensemble différentes personnes pendant un moment, Ken-Nach n'exprima pas ses souhaits pendant un long moment avant de se tourner vers Esmélia.

" Avez vous quelques perles intéressantes pour votre tableau ? "

La question du voyage réglée, il ne reste plus qu'à choisir les personnes qui pourraient me servir de modèles. Je remercie Marcus pour son aide et note les souhaits concernant la taille de la toile. Je sais que nous avons des stocks et qu'il suffira d'aller y piocher lorsque le moment de la mise en peinture viendrait. Nous sommes conduites jusqu'à une place remplie de personnes susceptibles de poser pour nous.

Je me rapproche de la reine et comme je le pensais, elle ne fait pas part de ses préférences. C'est une totale liberté qui est à la fois bénéfique et anxiogène. J'aime le fait que l'on puisse me faire confiance mais d'un autre côté j'ai toujours cette crainte de faire les mauvais choix. C'est d'autant plus compliqué quand on ne connaît pas du tout la personne à qui on a affaire. Mais je ne me démonte pas, j'observe repère quelques potentiels. Après un instant d'hésitation, je lui indique ceux qui ont une musculature bien développée. Je trouve que pour un épisode de chasse c'est ce qui correspond le mieux car cela souligne les efforts fournis au fils des ans par les personnages. J'imagine leur passé, les courses poursuites, le maniement des armes, toutes ces petites choses qui auraient été à l'origine d'un développement musculaire important. Parmi ceux que j'indique, pas que des hommes, des femmes aussi. Parce que la mixité me semble importante. Ça l'aurait été moins si la reine avait été un roi certainement.

- Que pensez-vous de ceux là ? Il m'ont l'air bien.

Si la femme est d'accord, alors je n'aurai plus qu'à les voir et leur expliquer mon projet, leur demander s'ils souhaitent en faire partie et enfin de se mettre au travail le plus vite possible.

- Je pense commencer par m'occuper des personnages, en faire des croquis, puis viendra le voyage et à la fin j'assemblerai le tout sur la toile.

La reine suivit avec intérêt tout le travail intellectuel de l'artiste. Son regard émeraude allait et venait entre tous les hommes que cette dernière lui présentait. Avec certains sourires, elle validait les propositions qui lui étaient faite. Observant toute cette danse, elle en revint à une question que la petite ingénue avait esquivé avec adresse au point où elle avait oublié une de ses questions.

- Voici des propositions intéressantes. Nous y souscrivons. Ceci étant dit, vous ne m'avez pas dit quel Maître vous a appris tout cela ? Venir à la Tour implique un talent certain que les communs des mortels n'ont pas mais votre doigté dans le dessin ne vient pas du ciel. Si cela serait le cas, je serais aise d'en deviser plus avant avec vous.

Un sourire narquois suivit ses paroles. Observant les hommes qui se présentaient les uns après les autres, elle laissait l'artiste esquisser les traits des mortels. Ses pas l'amenèrent dans le dos d'Esmelia et la reine chuchota aux oreilles de la belle.

- Vous devriez mieux observer ces hommes, les toucher, les caresser comme une douce viande que l'on se prépare à dévorer. En tant qu'artiste, vous n'avez jamais souhaité dépasser la simple esquisse de leurs corps sur votre toile ?

La voix royale susurrait et Marcus observait de loin ces étranges chuchotements. Il se posait des questions mais prenait garde de ne pas offusquer la Reine. Fixant Esmélia, il attendit de voir sa réaction aux voix sourdes de la Reine. Pendant ce temps là, invisible aux yeux des artistes, la peintre pouvait sentir une main monter sa colonne vertébrale, une légère caresse à la fois douce et légèrement piquante, à cause de ses ongles qui semblaient aussi froids que du métal.

- Nous finirons tout cela lors du voyage en effet.

De quoi parlait elle ? Pas évident à dire. Avec un mouvement, elle libéra son étrange emprise sur la future Oracle et se tourna vers Marcus afin d'aller dans sa direction. D'un chuchotement à l'autre, Esmélia put voir le visage du Grand Maître se déformer de surprise et d'inquiétude. Il fit une légère révérence alors qu'il suivait la reine pour rejoindre les appartements. Quelques jours plus tard, le voyage allait commencer.

Une question oubliée plus qu'esquivée car je n'ai rien à cacher. L'esprit concentré sur les choix artistiques et le projet en lui même, ça m'était sorti de la tête. Alors sans tarder je m'emploie à réparer mon oubli.

- Et bien c'est un peu particulier, j'ai commencé par apprendre le dessin au près de mon précepteur dès mon plus jeune âge, puis je suis entrée au service de Maître Decio à Florence, un solitaire qui ne prend jamais d'apprentis en général. Puis la ville a été détruite par la guerre alors je suis partie à Rome où j'ai intégré l'atelier de Maître Andrea. Il n'y a rien de divin là dedans. Certains disent que c'est grâce à ma sensibilité féminine.

J'hausse les épaules. Cela m'importe peu. On a reconnu mon talent et c'est tout ce qui compte. Je suis arrivée au summum de ma carrière de simple humaine et j'en suis ravie. Ici j'ai de l'inspiration et du travail à foison, c'est une sorte de paradis.

- Mon plaisir réside dans l'accomplissement de mon travail ma reine. Le reste ne m'intéresse pas.

Si j'avais succombé à l'attrait de l'amour et de la chair, je n'en serais pas là où je suis alors je suis fière de ma chasteté. Même maintenant que je suis là où je rêvais d'être, les grivoiseries ne m'attirent pas. Je souris doucement pendant que je dessine. La question est indiscrète, mais j'y réponds quand même.

- J'y ai pensé une fois il y a longtemps et je me félicite de ne pas avoir été au-delà.

Difficile de ne pas avoir les joues rouges face aux corps dénudés, à cette question déplacée ou à la main baladeuse de la souveraine. Je ne fais pas de remarque à ce propos. Je ne sais pas vraiment comment réagir à vrai dire alors je joue l'ignorance. Peut-être se lassera-t-elle d'elle-même de son petit jeu. Même ses phrases sont ambiguës. Elle me laisse tranquille finalement, mais je m'inquiète de ce qu'elle peut avoir dit à Marcus. Comme déjà dit, je n'ai rien à cacher, mais son air ne me dit rien qui vaille. J'espère que tout ira bien. Après quelques jours à dessiner, je me sens un peu plus à l'aise avec les mannequins et la réalisation d'esquisses arrive à son terme. Je les ai fait poser en diverses poses avec quelques accessoires comme une lance par exemple afin de simuler la scène de chasse.

Sac de voyage et carnet de croquis prêt, nous pouvons enfin partir. Je suis un peu surexcitée à l'idée de cette expédition. J'ai hâte de découvrir de nouveaux paysages.

La reine entendit les réponses de la jeune artiste sans l'interrompre. Elle avait conscience de sa position précaire dans cet aréopage composé de génies des arts les plus anciens. Tout en elle respirait la pureté et un sourire carnassier se lisait dans ses émeraudes qui lui faisaient office de pupilles. S'approchant de Marcus, elle lui chuchota quelques mots et repartit vers les autres salles de la Tour des Vents. Le Grand Mécène s'approchait alors d'Esmélia.

- Elle accepte donc ta présentation. Tu as de la chance, c'est un honneur qu'elle ne fait pas en général aux Mortels. Depuis bien longtemps, elle voulait faire cette oeuvre.

Observant les pigments posés sur le petit établis, il eut un petit sourire. Cette histoire ne faisait que commencer pour elle. Il le savait mais elle... Oui, le seigneur Adalrick ne pouvait pas mentir. Son destin avait été décidé.

- Écoute maintenant attentivement ce que je vais te dire. Tu vas aller en voyage en Illyrie, avec une escouade qui te protégera. Puis, tu iras auprès de ton Maître à Florence afin de faire ton tableau. C'est certainement une précaution mais le mariage du vice et de la vertu ne doit pas être présenter ici pour l'instant. Tu n'as pas conscience encore de ce monde mais le Seigneur Adalrick dit grand bien de toi. Un jour, tu auras certainement le privilège de le connaître, tu as les talents pour te hisser au plus hautes sphères de la Tour. Un jour...

La voix était légèrement fébrile, ampli d'émotions. Marcus avait été prévenu par Adalrick de certaines choses récemment. Par amour, les hommes pouvaient mourir, leur coeur pouvait être déchiré. Oui, la première esquisse de ce tableau se terminait ici.

Citation :

Fin du RP pour Kel-Nach

Il faudra considérer qu'après ton post de Conclusion que tu as réalisé le tableau mais que Kel-Nach n'est jamais venu récupérer sa commande. Le futur dira pour le reste... merci pour ce RP en tout cas.

Après le départ de la reine pour ses appartements, Marcus vient me parler. A travers ses mots, je comprends que cette commande est un grand honneur pour quelqu'un comme moi. Une exception en quelque sorte. Un instant je me demande ce qu'il entend par « Mortels ». Fait-il référence aux dormeurs ou simplement aux non Oracles ou bien est-ce autre chose encore ? Cela ne change pas grand-chose pour moi au final aussi je m'abstiens de demander. J'en sais déjà bien assez sur cet « autre monde » maintenant que je suis à la Tour des Vents. Ces êtres qui jusque là me seraient inconnus si je n'avais pas travaillé dur et eu cette prédisposition pour l'art. Alors peut-être voyait-elle en moi quelque chose que je ne percevais pas encore. Un jour, je saurai. Un jour oui comme semble dire le Grand Mécène.

J'opine simplement aux directives qui me sont données. Mon tableau particulier devrait être tenu secret. J'en prends note. Decio sera surprit de me revoir. La ville doit avoir été reconstruite depuis ces dernières années. Je suis curieuse de voir cela mais plus encore sa tête lorsqu'il me verra débarquer pour peindre une toile de cet acabit. Je ne crains pas les sentiments que j'ai pu avoir à son égard à un moment. Ils se sont depuis longtemps envolés. D'une certaine manière je me suis fabriquée un bouclier protecteur afin de me préserver de ce type de relation et d'émotions. « Un jour peut-être » n'était absolument pas envisagé pour le moment. Je sais qu'il ne faut jamais dire jamais, mais je ne ressens pas le besoin d'avoir quelqu'un dans ma vie de plus proche que mes actuels amis. Je sais cependant que l'on ne peut pas échapper à certains sentiments forts.

J'espère un jour croiser ce fameux Seigneur Adalrick. Je sais qu'il a fort à faire et que les Oracles sont privilégiés, mais je ne serai pas mécontente de le voir un jour.