[Janvier 553] C'est les mêmes que tu croiseras dans la descente (Emrys)

>> Partez.

La voix du Général de la Sirène Maléfique s’éleva à peine fut-il arrivé sur place. Vu le ton impératif, il était facile de deviner qu’il s’adressait aux simples agents en plus et non à son homologue. Pourtant, ces derniers n’obéirent pas, regardant leur supérieur, attendant ses ordres. Puis, impatient, Emrys répéta les mêmes mots, appuyant chaque syllabe. Mes ses paroles ne furent pas seule. Accompagnant celle-ci, son Cosmos s’intensifia légèrement ? Nulle brillance dans ce dernier. Même les non éveillés étaient capables de ressentir un sentiment de malaise, l’environnement étant parasité par le O’Bannon. S’insinuant dans leur esprit il donnait plus de poids à ses mots. Ses pairs n’étant eux-même pas facilement capable de résister à son influence, bien que celle-ci pouvait bien moins perdurer, il n’y avait aucun espoir pour ses malheureuse victimes du jour qui s’exécutèrent et quittèrent les lieux.

Restait Deukalyon, Général du Kraken. Bien entendu, fidèle à moi-même, j’avais fait mes recherches, la connaissance des autres figures d’Atlantis étant d’une grande importance. J’avais noté qu’il n’était pas Patricien, ce qui déjà ne jouait pas en sa faveur. Mais il était chanceux car plus éléments faisaient que je pourrais peut être lui accorder plus d’importance que ce qu’il aurait mérité. Déjà il n’était pas un Vulgaire. Il était important de noter ce point. Puis venait son rang. En tant que Général, il devait faire preuve d’une certaine puissance, et pouvait donc au moins avoir une utilité pratique. Enfin, et peut-être seul point comptant véritable à mes yeux, il était le bras droit d’Orpheus.
Je voyais mal notre Légat s’entourer d’incapable ou de simples combattants sans valeur ajoutée. Si le Merinita avait vu quelque chose en lui, j’allais m’efforcer de tenter d’en faire de même. A lui de me prouvait qu’il méritait autant d’attention de part.

>> Je me disais qu’il serait nécessaire pour moi de faire rapidement connaissance de mes pairs, mais je dois avouer que j’espérais que cela se fasse dans d’autres circonstances.
Général Deukalyon, bienvenue chez les O’Bannon.

Nulle révérence aussi marquée que ce qu’il avait pu faire lorsqu’il s’était présenté à Orpheus et sa sœur. Cette fois, d’un geste il ramena son bras droit contre sa poitrine et inclina très légèrement le torse. Vraiment, son interlocuteur pouvait s’estimer heureux d’autant d’attention, bien qu’Emrys doutait qu’il ne s’en rende véritablement compte.

>> Mais trêve de mondanité. J’entends bien la raison de ta présence, mais je pense que tu comprendras que nous sommes entièrement capables de gérer comme il se doit cette affaire.
Sois cependant assuré d’une chose. Nous trouverons le coupable et ce dernier sera châtié à la hauteur de son crime.

Nul ne s’en prenait aux O’Bannon sans en assumer les conséquences. Ils n’étaient pas la plus clémente des familles, au contraire. Emrys était peut être pire que nombre de ses parents sur ce point. Même s’il était Général, il était bien conscient que cela ne signifiait pas pour autant que sa place parmi les siens avait évoluée. Pour le moment du moins, car il comptait bien sûr y remédier. Et il voyait la situation comme une possible occasion d’aller en ce sens.

Un soldat. C’était la première image me venant en l’esprit en voyant le Général du Kraken. Sa façon de s’exprimer, de bouger. Dans un sens, j’étais presque déçu. A priori je le rangerai dans les personnes pouvant avoir une utilité, celles que je pouvais utiliser pour faire les tâches plus physiques qui ne convenaient guère à ma personne. J’avais besoin de soldats, donc forcément en identifier aussi vite, ayant certainement une puissance notable de par son rang, était donc une bonne chose.
Mais j’en avais espéré un peu plus de la part de quelqu’un servant de bras droit à Orpheus. Mais au final, ce dernier avait peut être juste vu ça chez lui. J’allais donc voir ce qu’allait donner la suite mais déjà mon intérêt s’estompait.

Un claquement de langue. Ce fut la première réaction du jeune Général. Un simple claque de langue démontrant son mécontentement. Car il n’aimait pas ce que Deukalyion proposait, en premier lieu. Mais surtout car il savait qu’il n’allait pas avoir le choix. Il y avait des arguments, et surtout Emrys était bien conscient qu’il s’agissait des ordres de l’Amirauté. Il aurait pu s’y soustraire si l’homme en charge avait décidé de lâcher l’affaire, mais ce n’était hélas pas le cas.
Pendant un moment il envisagea d’user de son propre statut de Marinas pour prendre en charge la situation. Mais son attribution était la flotte atlante, pas la sécurité intérieure. Ainsi il devait donc se résigner. Plus ou moins.

>> Les serviteurs sont en train d’établir la liste. Après vérification je la ferai parvenir à tes services. Je compte bien entendu sur la compétence des gardes de notre cité pour les retrouver au plus vite.

Il n’avait lui-même pas encore eu l’occasion de faire le point de ce qui avait bien pu être subtilisé. Certaines possessions de sa famille étaient bien trop précieuses pour quitter les murs de leur demeure. Il était donc important de s’assurer qu’aucune ne figurait sur cette liste et, si tel était le cas, il prendrait bien entendu les mesures nécessaires.

La proposition du Kraken était pour le moins raisonnable, à la plus grande surprise du O’Bannon. Il le soupçonnait d’être coutumier de la façon de faire des grandes familles et donc capable d’agir en conséquence. C’était un soldat entraîné et visiblement efficace dans sa tâche. Emrys ne pouvait refuser car prendre officiellement part à l’enquête lui permettait d’avoir un œil dessus alors qu’il ne pouvait de toutes façons se débarrasser des rouages atlantes. Si cette solution n’était pas la plus souhaitable, elle lui convenait parfaitement et lui évitait d’être battu à son propre jeu.

>> A défaut de pouvoir gérer entièrement nous-mêmes cette affaire, il me serait idiot de refuser. Général Deukalyion, tu peux compter sur ma présence. Et tu peux en effet poster tes questions.
Cependant, je précise qu’au moment des faits j’étais dans mes bureaux. Je ne peux donc promettre de pouvoir répondre à toutes les questions. Mais cela, je pense que tu t’en doutes, sinon il n’y aurait nul besoin d’enquête.

Le sourire d’Emrys ne laissait nulle place au doute quand à ce qu’il voulait réellement dire. Hélas pour lui, si les criminels avaient été suffisamment idiots pour s’en prendre à sa famille, ils avaient au moins eu un minimum de jugeote pour éviter d’agir en présence d’un Général. Disons qu’il fallait au moins leur reconnaître ça.

Et ainsi débuta l’enquête. Agir ainsi n’était pas la plus grande spécialité d’Emrys. S’il recherchait des choses, il le faisait à sa manière, dans l’ombre. Mais deux Généraux vêtus de leurs Ecailles attiraient suffisamment les regards pour que ce soit compliqué de faire dans la pure discrétion. Il fallait dire qu’il ne s’attendait pas à la tournure des événements. Son hypothèse se confirmait. Le Kraken était un homme de terrain. Resté derrière un bureau à donner des ordres n’était certainement pas son plus grand plaisir, contraire à la Sirène Maléfique. Ils étaient de véritables opposés, et en cela faire équipe était quelque chose qui pouvait paraître inattendu.
En fait, le rouquin ne serait même pas étonné que Deukalyion soit le premier surpris. Les nobles n’avaient pas forcément l’image de personnes prêtes à collaborer. Les O’Bannon encore moins. Le simple fait de jouer avec l’inattendu plaisait à Emrys. Renverser les attentes était toujours quelque chose d’agréable à observer.

La suite était déjà moins pour me plaire. Fréquenter la plèbe n’était guère dans la liste des activités que j’appréciais. Entrer dans leur domaine était définitivement l’une des choses que j’évitais le plus. Je réprimais une grimace de dégoût. Je doutais que cela puisse nous aider. Pour le coup, je faisais une chose que je détestais. Je me contentais de suivre. Nul doute que Deukalyion était bien plus à l’aise que moi dans ce genre d’endroits.
Après tout, c’était à ça que servaient les soldats. Faire les basses besognes que les autres se refusaient. Mais, si je n’en étais pas au sens symbolique, j’avais bien intégré l’Amirauté en revêtant cette Ecaille. Gradé, mais soldat malgré tout.
J’essayais donc de tirer profit de la situation. Observer, repérer les informations pouvant servir. On ne savais jamais quand ce genre d’éléments pouvaient s’avérer utile.

La question lui fit froncer les sourcils. A cet instant, il était heureux d’être légèrement en retrait. Car à aucun moment il n’aurait aimé que son homologue puisse voir l’incompréhension traverser son visage. Cette expression n’était pas habituelle de la part de cet homme qui affichait presque en permanence un sourire satisfait. Il se devait de tout savoir, tout contrôler. Et si ce n’était pas le cas, il se devait de faire semblant.
Pourtant, à aucun moment les consignes des gardes impliquaient qu’ils quittent les lieux. Il n’avait même pas fait attention à ce détail en arrivant, n’ayant que son agacement qu’un tel événement ait pu se produire. Il n’aimait pas ne pas être en contrôle, et il était clairement dans une telle situation. Il hésitait même sur la réponse à faire. Admettre qu’il était dans l’ignorance sur sa propre demeure ou bien cacher des informations et risquer ainsi de rendre inutile l’enquête ? La deuxième était tentante, sauf que cela l’obligerait à perdre son temps vu qu’il avait convenu d’y participer.
Que des mauvaises réponses. Il finit pourtant par se décider.

>> Les O’Bannon disposent bien sûr de leur milice. Je peux assurer que je découvrirai pourquoi elle a faillit à son devoir.

Aveux d’échec. Après m’avoir obligé à collaborer, voilà une nouvelle victoire pour le Général du Kraken. Cela n’allait définitivement pas. Je me devais de reprendre la main, et pourtant cela risquait d’être difficile. Je n’étais pas dans mon élément. Les informateurs, je n’allais pas les voir en personne. Je ne doutais pas qu’il continuerait à avoir l’ascendant. Je devais tirer une leçon de ça. Savoir se salir les mains était nécessaire, mais indigne de moi. Il ne restait donc pas qu’à apprendre à obtenir le même résultat, mais à ma façon.

>> Jouer les gros bras ? Regarde moi. Tu crois vraiment que j’en suis capable ? Je me ridiculiserai. Heureusement, j’ai d’autres atouts dans mes manches. Je pensais d’ailleurs en avoir fait la démonstration avant même de t’avoir adressé la parole.

De nouveau son sourire reprenait place sur son visage. Il savait déjà comment reprendre l’avantage. Jouer les gros bras, ne pas briser les couvertures. Toutes ces considérations étaient inutiles quand on se nommait Emrys O’Bannon. Et surtout que l’on disposait de certaines compétences appréciables.
Ainsi, à peine les deux Marinas pénétrèrent dans l’établissement qu’Emrys s’avança un peu plus, écartant les bras devant lui.

>> Mesdames, Messieurs. Je vous invite à garder votre calme. De toutes façons, ce n’est pas comme si vous allez avoir le choix…

Accompagnant ses paroles, son Cosmos s’intensifia. Peu à peu, ce dernier pris place dans l’intégralité des lieux, ne laissant nul coin en dehors. Mais, surtout, toute personne posant son pied sur le sol du tripot, exceptés les deux Marinas, tombait sous l’influence de la Sirène Maléfique. Nul besoin de l’instrument lié à sa Scale pour cela, la résistance du commun des mortels étant bien trop faible pour leur laisser une chance.
Son rictus encore plus marqué, il se tourna vers son allié.

>> Personne ne nous dérangera. Personne n’entendra rien. Personne ne se rappellera. Tu as juste à m’indiquer notre homme pour que je le libère dans l’instant.

En réponse au geste de Deukalyion, le Général de la Sirène Maléfique libéra l’informateur justifiant leur présence dans un tel lieu. Le salut que lui l’homme fut rendu d’un bref geste de la tête. Il ne fallait pas croire, maintenir autant de personne sous son emprise n’était pas chose aisée et demandait de la concentration, d’autant plus s’il fallait exclure certaines personnes. Mais il était amusant de voir celui se dénommant Kairo ne pas trop comprendre ce qu’il pouvait se passer.
Les simples Dormeurs n’étaient en effet pas capables d’imaginer ce que des personnes comme eux étaient capables de faire. Ne restait plus qu’à obtenir les informations. Bien entendu, ce fut le Général du Kraken qui se chargea de l’interrogation. Après tout, il s’agissait de son informateur et il avait bien plus l’habitude de ce genre de lieux que son homologue.

Moi, je me contentais d’écouter, attentivement. Si je n’étais pas le mieux placé pour poser les questions, je restait l’un des premiers concernés. Plus j’en apprenais, plus je pourrais agir. C’était après tout la seule raison justifiant mon acceptation de collaborer, de façon officielle en tous cas. Et j’espérais bien qu’il pourrait nous apprendre quelque chose de concret.
Ce ne fut pas vraiment le cas. Du moins rien comme je l’espérais. Il ne connaissait rien concernant le cambriolage, ce qui commença à le rendre inutile à mes yeux. Mais ce qu’il partagea ensuite fut des plus intrigants. Ainsi des imbéciles osaient se rebeller contre l’ordre établi ? S’en prendre aux Patriciens, c’était s’en prendre à Atlantis même. Le Sénat, je m’en moquais en soi, il ne restait qu’un instrument.
Mais il était donc grand temps à mes yeux de frapper un grand coup et de leur rappeler à qui ils devaient leur « liberté ».

Ce fut à ce moment que Deukalyion se tourna vers le O’Bannon. Visiblement, il en avait terminé de son côté. Cela semblait peu, mais il devait être persuadé de ne pas pouvoir en apprendre plus pour le coup. Emrys était quelque peu déçu. Bien entendu, il y avait la mention de la Cour des Miracles, probable future destination du duo. En tant que véritable noble, le jeune général n’y avait jamais mis les pieds, et n’avait pas particulièrement hâte de le faire.

>> Sur autant de personnes ? Plus vite j’y mettrai fin, mieux ce sera. Je serais bien curieux d’en savoir un peu plus sur ce mouvement, mais je doute que nous ayons assez de temps. Fort dommage…

Emrys regardait Kairo en souriant. Le temps jouait en sa faveur. Mais il n’oublierait pas. A lui de voir comment il se décidait à interpréter la chose. Pourtant, il pouvait être rassuré. Rien de mal ne lui arriverait. Deukalyion risquait beaucoup trop de faire le lien si c’était le cas dans les temps prochains. Cela n’empêcherait pas Emrys d’informer sa propre famille de la situation.
A sa plus grande déception, il n’était pas encore suffisamment influent en son sein pour pouvoir véritablement agir. Tout juste si le fait de porter cette Ecaille lui avait donné un peu plus de poids. Il ne lui restait plus qu’à la garder suffisamment longtemps pour gravir les échelons, et ainsi peut être pourrait-il prendre la place qui lui était due.

Il fit signe au bras droit du Légat qu’il était temps de sortir et commença à lui-même se diriger vers la porte. Il attendit que tous deux l’aient franchis pour lever son emprise, laissant échapper un soupir. Une telle action n’était, comme il l’avait indiqué, pas de tout repos et il n’était pas mécontent que la fin soit venue.
Il se tourna alors vers l’enquêteur en chef.

>> Donc, je suppose que notre prochaine destination sera la Cour des Miracles ? Je préviens, je ne serais pas forcément de la plus grande aide. Contrairement à toi visiblement, je ne suis guère habitué de ce genre de lieux et je doute pouvoir reproduire un tel spectacle.

Il fallait être honnête, Emrys était rassuré. Découvrir la Cour des Miracles n’était pas chose qu’il avait hâte de faire. Le faire alors qu’il venait déjà de se fatiguer et en compagnie d’un autre Général n’était guère mieux. Visiblement, cette tâche allait incomber à d’autres, certainement les hommes du Kraken. Ce qui lui laissait toute opportunité pour agir. Envoyer ses propres hommes. Peut-être pas ceux de sa famille. Si en effet il y avait des traîtres, il y avait un risque que ce soient justement eux qu’il envoie.
Heureusement, il disposait d’une autre possibilité. L’une des premières choses qu’il avait effectué en prenant position était renforcer les défenses de son pilier de façon à ce qu’elles lui correspondent. Parmi celles-ci se trouvait sa garde personnelle, les Beached. Leur particularité ? Un contact prolongé et intense, bien trop pour une personne normale, les avait totalement corrompu, en faisant de parfaits petits soldats incapables de lui désobéir. Parfaits pour cette mission.

En attendant, Deukalyion essayait de trouver des explications, des possibles suspects. Et sa question fit sourire le jeune Général. La réponse tombait sous le sens, du moins à ses yeux. Le simple fait de la poser montrait qu’il n’était guère versé dans l’un des jeux les plus dangereux et intéressants qu’il soit. La politique et les intrigues. Pauvre de lui s’il souhaitait s’y mêler en ignorant tout de leur façon de faire.
Il était également possible que cela ne soit qu’une façade et qu’il était en vérité acteur de ce théâtre, mais cela semblait assez peu probable. Haussant légèrement les épaules, Emrys prit la parole.

>> Les puissants s’attirent toujours des ennemis. Les inférieurs enviant leur positions. Les égaux voyant en nous des ennemis potentiels. Hmmpf, je dirai bien « les supérieurs ayant peur pour leur rang » mais je ne suis pas certains qu’il soit aisé de trouver quelqu’un au dessous de nous.

Les Grandes Familles étaient puissantes, bien plus que la majorité d’Atlantis. Le Sénat et l’Amirauté avaient beau être les organes dirigeants, les nobles estimaient bien souvent avoir leur propres règles. Et puis, ces deux administrations étaient justement remplies de patriciens, notamment le Sénat. Seuls les plus puissants parmi ces familles pouvaient au final se considérer au dessus.
Quant à Emrys… Et bien la volonté d’être parmi ces puissants était clairement présente. Comme sa mère souhaitait utiliser la position de Général de son fils pour gagner en influence chez les O’Bannon, lui même visait pour ses propres intérêts. Mais il était encore jeune et l’inexpérience était, il le savait, son principal défaut. Si bien qu’il fut obligé de répondre avec un soupir à la remarque le concernant directement.

>> Ma jeunesse fait que je doute m’être attiré personnellement des ennemis. Oh bien sûr nombreux sont ceux à ne pas m’apprécier, il en a toujours été ainsi. Certains n’apprécient peut-être pas que je sois le nouveau porteur de cet Ecaille, même si ma vie entière a été tournée en ce sens. Mais de là à déjà me prendre pour cible ? Et bien ce serait une erreur qu’ils regretteraient bien vite.

Au cours de ses paroles, le O’Bannon avait ouvert la main droite, paume dressée vers le ciel, et il était possible de sentir son Cosmos malfaisant tourbillonner en son sein. Puis, marquant les deux mots, il resserra le poing, dispersant toute bribe d’énergie. Tel était le sort qu’il réservait à ceux voulant se mettre en travers de sa route.
Pas de face, bien sûr. L’ombre était une bien meilleure alliée.

>> Après, si ton enquête t’amène à penser que quelqu’un souhaite s’en prendre directement à moi, je te remercie de bien vouloir me l’indiquer. Si cela devient clairement personnel, je compte bien régler mes affaires moi-même.

Aucune surprise aux paroles du Kraken. Emrys l’avait déjà catalogué dans soldat, et il le prouvait. Le jeu des nobles et de la politique ne lui plaisait guère et il n’y voyait que les défauts. Et même en ayant fréquenté le Sénat il ne semblait pas avoir fait preuve de la volonté d’entrée dans la partie. Grand mal lui en fasse, tout cela n’ayant pas qu’un simple aspect négatif. Le O’Bannon était encore bien jeune et n’avait donc encore eu l’occasion de pleinement embrasser ce grand jeu, et surtout n’avait pu faire ses preuves, mais cela ne changeait en rien le fait que son éducation avait grandement gravité autour.
Ainsi, les mots de Deukalyion lui firent échapper un léger rire. Peut-être pourrait-il lui faire un peu mieux comprendre les choses.

>> Si tu le trouves différent, c’est que tu ne l’as pas compris. Anticiper les coups des opposants malgré leurs subterfuges afin de mieux répliquer. N’est-ce pas la même chose en matière militaire ? Simplement, là où ce dernier mise plus sur les gestes, les mots sont l’une des principales armes de l’autre. Je suppose que tu te doutes dans lequel je me retrouve le mieux ?

Deux guerres différentes mais aux règles pourtant très similaires. Et surtout deux guerres bien trop complémentaires. Il était même impossible de gagner l’une en ne participant pas un instant qu’à l’autre, même avec la plus grande des maîtrises. Seul, le plus grand des guerriers ne pouvait rien et il lui fallait donc savoir s’entourer d’hommes fidèles. Et bien souvent une démonstration de force pouvait débloquer une discussion semblant pourtant dans une impasse. Savoir mêler ces deux combats était un art subtil. Art que je comptais bien maîtriser, bien que cela ne pouvait se faire en une nuit.

Mais l’intérêt principal en cet instant n’était pas vraiment ces grands jeux et Deukalyon ne perdit pas de temps avant de revenir au sujet. Et, de toutes évidences, ils étaient au point mort. Des rumeurs étaient leurs principales informations. Rien de concret. Des suppositions. Y compris le fait qu’il pouvait être la cible principale. Ce qui était bien sûr possible, mais il n’y croyait pas vraiment.
Il était cependant idiot de négliger la moindre piste, surtout lorsque peu d’éléments étaient probants. Le Kraken continuerait donc son enquête et, visiblement, il avait bien cerné l’individu face à lui puisqu’il demandait à être informé de toute action de sa part ou de celle de ses hommes. Croyait-il vraiment que ce serait aussi simple ? Il fréquentait pourtant le Sénat comme il disait. Ou peut-être espérait-il une certaine entraide entre frères d’armes. Evoquer le bien d’Atlantis confirmait cette dernière possibilité. Sa conclusion ne laissait absolument plus le doute.
Bien, autant jouer le jeu.

>> Bien sûr, mais cela doit aller dans les deux sens. Quelque soit les découvertes faites lors de l’enquête je souhaite le savoir sans délai. Quand cela me concerne je préfère autant que possible ne pas rester dans l’inconnu.

Il souhaitait l’entraide ? Elle se devait d’être totale et de chaque partie. A ce moment il pourrait réfléchir à ne pas agir dans son dos.

>> Oh, bien entendu faire un choix est différent. Pour chaque individu comme moi préférant prendre part à ce grand Jeu, il est nécessaire d’avoir des hommes comme toi pour choisir la voie plus direct. Et c’est l’équilibre entre ces deux mondes qui permet à notre société de perdurer.
Simplement, si l’approche est différente, je reste persuadé que les règles d’ensemble sont très similaires.

Le point de vue de Deukalyion était bien celui d’un soldat, mais pourtant je trouvais qu’il était bien naïf. Car l’affrontement n’était pas forcément aussi direct qu’il semblait l’entendre. Sans aller jusqu’aux manigances politiques, nombreux étaient le combattants à avoir une approche différente de ce qu’il décrivait en combat. J’en étais l’exemple parfait et je serais bien curieux de voir quelle pourrait être sa réaction.
Cependant, il avait raison sur un point. Son visage était un bon exemple et j’étais persuadé qu’il avait déjà dû faire face à ce genre d’adversaire. D’où mon étonnement qu’il ne retienne que les armes les plus basiques.

Mais nul besoin de s’attarder sur ces différences de points de vues car déjà la rencontre entre les deux Généraux touchait à sa fin. Dans l’immédiat l’enquête ne connaîtrait pas sa conclusion, mais aurait-il pu vraiment en être autrement ? Il avait beau ne pas être expert, il aurait été surpris d’avoir le fin mot de l’histoire. Cependant, ils semblaient s’accorder sur une chose. Une véritable coopération. Allait-elle être de simples paroles pour la forme ou serait-elle une réalité ?
S’il avait bien cerné le Kraken, il y avait de fortes possibilités que si l’un des deux ne jouait pas franc jeu, cela serait la Sirène Maléfique. Il était encore trop tôt pour affirmer qu’il agirait ainsi, mais c’était une possibilité à ne pas négliger. Et très certainement le balafré devait également s’y attendre.

>> Je pense qu’en effet c’est bon pour cette fois. Et nous avons également pu profiter pour faire connaissance. Vu nos rangs, nul doute que nous aurons l’occasion de collaborer à plusieurs reprises, et certainement pour des affaires de plus grandes importances.
Général Deukalyion.

Un simple salut, des plus formels, afin de prendre congé. Et enfin quitter ce lieu qui ne convenait pas à un individu de son statut. Moins il s’y attardait, mieux il se portait. Et son Pilier et sa bibliothèque était sans nul doute un cadre bien plus adapté à sa personnalité.