Demi-finale : Combat n°2 - Endymion vs Yvan

Vous posterez à la suite pour le combat.

La clameur de la foule allait grandissante. Le tournoi qui animait la ville entrait dans sa phase finale, et si la plupart des Dormeurs de la cité ne pouvaient en profiter, l'excitation et la passion qu'il engendrait se répandaient néanmoins dans ses rues comme les flammes d'un incendie. Les gradins n'avaient jamais été aussi pleins, les spectateurs aussi impatients.

Endymion, le Dragon des mers, contre Yvan, le Chevalier sans Bannière.
Belle tête d'affiche! D'autant que les deux hommes avaient su faire parler d'eux durant ces premiers jours de fête. Le premier, par ce qu'il exposait de sa personne. Le second, par ce qu'il cachait de son identité. Le sable de l'arène avait été répandu. Son sol et ses murs, réparés. Dans ce cercle de pierre vierge encore de toute violence, l'ultime signal du crieur sonna. Les deux combattants apparurent, chacun à un balcon opposé au-dessus du terrain.

Du côté est, un homme en arme s'était avancé, vêtu d'une sombre tenue, et dont les traits étaient cachés sous un tricorne et un masque de fer. Ni sa cape, ni son plastron ne portaient la moindre armoirie, le moindre symbole. Son surnom l'imposait. Sa réputation, celle de ce Chevalier Noir qui parcourait les campagnes de Britannia pour venir en aide aux petites gens, avait atteins Camelot depuis plusieurs semaines déjà. Pourtant, personne ne l'avait vu apparaitre aux portes de la ville. S'y était-il présenté à visage découvert, faisant de la vérité son masque? Ou avait-il toujours résidé dans la cité? Les rumeurs allaient bon train, et beaucoup étaient aujourd'hui dans les gradins en espérant obtenir une réponse.

"Yvan" s'assit sur un siège de pierre, son corps s'affaissant alors que, dans l'alcôve derrière lui, une autre forme se relevait. Son pantin qui venait se prendre vie s'avança dans la lumière, emportant avec lui l'ombre qui l'entourait. Cette armure était couverte de flammes noires et bleues, qui rendaient ses contours troubles. A peine distinguait-on des cornes sur son casque, et la longueur anormale de ses membres.
L'apparition enjamba le garde-fou du balcon pour chuter, et se réceptionner sans un son sur le sable de l'arène. La plume rouge et la cape dans son dos voletèrent un instant, avant que la marionnette se redresse pour se faire droite, silencieuse. Nulle annonce, nulle provocation n'avait encore été prononcée. Il était inutile de se hâter. Le Chevalier savait quand les coups et les mots fuseraient bien assez tôt.

Citation :: Endymion, tu as l'initiative.

Pantin du Chevalier sans Bannière:

Apparence

Cette étape du tournoi n'aurait rien à voir avec les précédentes.
Je m'étais hissé à la demi-finale, non sans difficulté, mais paré de mon verbe haut, de mon arrogance de façade et d'une assurance débonnaire. L'ambition d'offrir une victoire éclatante à Atlantis me poussait à me surpasser, tout en donnant au public le spectacle qu'il ne manquerait pas de diffuser.
Mais l'enjeu était désormais bien supérieur.
Cette nuit avait été solitaire. Par choix.
La tragédie qui venait de nous frapper m'avait plus ébranlé que je ne pouvais l'admettre. Et je me retrouvais responsable de notre image. Seul ou quasiment, jeté en pâture à des forces connues ou cachées. Calypso était fort heureusement à mes côtés, mais comment lui en demander trop alors que son coeur venait d'être brisé ?
Mon but était donc limpide : nous ramener sains et saufs à Atlantis, et tout faire pour faire briller l'emblème de Poséidon. Prouver à toutes et tous que les marinas ne ploierait jamais le genou face à l'adversité.
Tant de pression... Sur les épaules d'un être aussi désinvolte que moi, cela pesait bien trop.
Toutefois, lorsque je pris place sur le balcon de l'arène, j'adressais aux spectateurs la scène attendue et désirée. Un sourire ravageur, une morgue taquine, des révérences flatteuses. Et mes groupies se hâtèrent de me noyer sous les encouragements. Or, pour la première fois, mon regard ne partit pas en quête de celles et ceux qui auraient le privilège de partager ma couche, la nuit venue.
Le pantin à mon effigie se matérialisa sur le sable, face à un être obscur mais doté d'un tricorne que je lui aurais bien emprunté. Un chevalier mystère, donc...

Je te salue, "Yvan", si tel est ton nom... Tu m'excuseras mais j'ai eu quelques journées difficiles dernièrement... Et je compte bien me défouler lors de ce combat. Offrons au public un spectacle mémorable, veux-tu ?

Et tout en posture théâtrale, je lançais moult baisers en direction des gradins. Tout en sachant que nul ne pourrait ou voudrait discerner la tristesse teintant mon regard éteint.

Général Indigne

Spoiler:

Après l'hommage au public, je relâchais une longue expiration, sans me départir de mon sourire faux.
Autant voir ce combat comme un hommage... D'emblée et malgré mes doutes le concernant, Orpheus m'avait toujours prodigué une réelle considération. Un respect que bien des nobles auraient trouvé choquant et déplacé.
N'étais-je pas un éternel bâtard à leurs yeux ?
Et sous ma surveillance, la Voix de Poséidon s'était tue. Le seigneur des Océans me pardonnerait-il cet échec ? Dès mon retour à Atlantis, allais-je être dépossédé de mon écaille et banni ? Voire pire...
L'idée m'avait traversé l'esprit, tant j'avais manqué à mon devoir. Je n'étais même pas parvenu à le venger.
Yeux baissés en attendant l'annonce du début de cet affrontement aux enjeux plus lourds qu'un simple divertissement, j'hésitais à déclarer forfait, tant la honte continuait à me ronger.
Et une maxime me revint aussitôt en mémoire :
"Face à la mort, à la peur, à la peine, si tu ne peux lutter, alors danse, chante, ris à la vie."
Et un rictus triste se dessina aussitôt sur mes lippes.
Oui.
J'étais le Dragon des mers. Prédateur du triangle des Bermudes ! Sur mes frêles épaules reposaient désormais l'image d'une nation en péril. Imparfaite, certes, cruelle à sa façon, soumise à des règles dures et dépassées... Mais c'était ma cité. Mon second foyer. Un endroit où à défaut de m'aimer, on me craignait. Et où je disposais d'une place.
Ma conversation récente avec le Grand Pope me revint alors à l'esprit.
Et brièvement, je tournais un regard narquois vers le ciel, avant de murmurer une prière.

Pour une fois... Regarde donc ton général le plus indigne se battre en ton nom, Poséidon.

Et lorsque l'annonce résonna, je fus le premier à déployer mon cosmos.
La rage de vaincre dans les yeux, Justice et Étoile fusèrent des dizaines de cartes virevoltant autour de moi.

Cela n'a rien de personnel mais je dois vraiment gagner cette demi-finale ! Prépares-toi !

Un claquement de doigt fit monter une brume sombre qui submergea rapidement le sable de l'arène. Dans un recoin, la sombre Faucheuse laissa apparaitre sa silhouette intimidante, à travers les ombres des gradins. Une aide bienvenue.
Que valait donc cet adversaire intrigant ?

L'adversaire de l'homme masqué était aimé de la foule. Un animateur parfait pour faire vibrer leur public. Pourtant, à l'entendre, il faisait mentir son apparente frivolité, et prenait ce duel bien au sérieux. Il semblait avoir quelque chose à prouver. A qui? Aux spectateur? A son Maître? A lui-même? La réponse n'importait guère au Chevalier Noir. Une voix neutre et distante répondit au Marina au travers du pantin sans visage.

« Cela me convient tout à fait. »

Le coup d'envoi fut donné. Le Dragon des Mers fit honneur à sa réputation. Prenant les devant pour frapper le premier, il avait convoqué à lui de nombreuses arcanes sous la forme de cartes. Etoile. Justice. Mort. Des noms bien intimidants. Mais la silhouette de flammes sombres resta de marbre face à ce déchainement. Elle se contenta de lever sa main griffue devant elle et de faire apparaitre plusieurs petits cristaux qui brillaient comme des joyaux surnaturels. Les yeux perçants pouvaient les identifier : des dés aux multiples faces, parfaitement ciselés.

Les objets du hasard partirent droit vers les silhouettes du Tarot qu'Endymion avait invoqué. Leurs attaques, leurs formes, se distordirent à leur contact, avant d'être aspirées à l'intérieur de ces étranges petites choses. L'étoile s'éteignit. La justice se tut. Et si la mort était restée juste un instant de plus, elle aussi aurait été capturée par la loi du hasard...
Les petits dés volèrent dans les airs pour revenir flotter au-dessus de la paume du pantin. Sa visière s'était abaissée pour observer leur éclat, et au-delà les attaques cosmiques qui étaient à présent piégées à l'intérieur. La voix du combattant s'éleva à nouveau. Pensive. Méprisante.

« Un Cartomancien, donc. Qui pense avoir le destin des autres entre ses mains. Qui trompe son petit monde. Qui cherche la vérité dans un bout de papier... »

Un sifflement s'échappa de la gorge de la créature d'ombre. Un soupir peut-être? D'un geste sec de la main, il projeta à nouveau les dés vers le Dragon des Mers. Cette fois, un tintement strident put se faire entendre. Les petits cristaux se fissuraient. Et lorsque finalement leur forme se disloqua, les attaques scellées en leur sein furent libérées... Pour filer droit vers celui qui leur avait donné naissance.

« Petit charlatan. Comment réagis-tu lorsque ce n'est pas toi qui distribue les cartes? Montre-moi. »

Dés contre cartes

Je m'étais attendu à tomber sur un adversaire digne de ce nom. Un individu capable de se hisser en demi-finale d'un tel tournoi saurait me divertir... Et pour le coup, je ne fus pas déçu !
Impassible de prime abord, un rictus torve se dessina sur mes traits à l'écoute des propos méprisants de cet inconnu. Attentif au possible, analysant ses gestes, son usage du cosmos, je haussais un sourcil lorsque mes arcanes se retrouvèrent piégées dans ces dés bien étranges.
Ma fidèle Faucheuse ayant échappé à l'emprise de ce guerrier, je lui intimais de répliquer dès lors que mes propres assauts revenaient me frapper de plein fouet.
Encaissé pour mieux divertir... Sans me départir de mon sourire mauvais.

Qu'importe qui distribue les cartes... Le tout est de savoir en lire les lignes cachées... Pour toi qui semble t'en remettre au fruit du hasard, cela me semble bien délicat. Le chaos n'est pas un terreau fertile.

L'aura ténébreuse de la Mort s'amplifia, avant qu'un magicien obscur et un pendu ne jaillissent du brouillard, pour prendre à revers cet adversaire bien sûr de lui.

Les fils de la destinée sont un entrelacs de possibilités que bien peu savent interpréter. Dis moi, joueur invétéré, pourquoi avances-tu à visage masqué ? Car si je trompe mon monde, que dire de ta façon de te dissimuler ? Jouons-nous dans la même cour, mon bon ami ?

Un rayon mystique ébène fusa du bâton de mon thaumaturge, alors que le défunt fusionnait avec le sol, pour mieux emporter un adversaire trop assuré ou distrait vers les enfers.
Ce mystérieux chevalier m'avait pris par surprise, mais je ne me ferais pas avoir deux fois. Et abattre ainsi l'une de ses cartes majeures d'emblée ne présentait donc pas de risque à ses yeux ? Ou pensait-il saper mon moral d'emblée ?

Le Marina avait fait face à la tourmente de ses propres attaques sans flancher. Il était resté droit et fier dans la tempête, en digne fidèle de Poséidon. Il ne manquait pas non plus de répondant. Le chevalier d'ombre eut un rire satisfait en le constatant. Peut-être allait-il pourvoir croiser le fer autant que la parole lors de ce combat, contrairement au précédent qui avait sévèrement été déséquilibré sur l'un de ces fronts. Fort bien. La victoire n'en serait que plus savoureuse.

« Au contraire. Le chaos est l'état naturel du monde. Celui dont tout découle. Et mes dés l'incarnent. Ils sont purs, impartiaux. Alors que les cartes, elles... Peuvent être traitresses. »

Bien assez tôt, ces mots prendraient leur sens. Mais pour l'heure, les arcanes d'Endymion revenaient à l'assaut. Cette fois, un magicien et un pendu. Frappé par le rayon du premier, le pantin de l'inconnu recula et flancha, tout cela pour mieux tomber dans les miasmes du second qui se collaient à ses jambes. Fort heureusement, la bénédiction des arcanes volées faisaient encore effet, et la créature parvint à bondir pour s'écarter du danger, non sans un grognement.

« Hmpf. J'admets ressentir entre nous une certaine affinité. Mais je préfère mon masque de fer à ton masque de chair. Il est plus confortable à porter. Sans offenses. »

A peine ces paroles prononcées, les flammes d'azur des yeux du pantin se braquèrent sur leur adversaire. Dans sa main gauche, un étrange marteau venait de se former, chargé de Cosmos au point d'en déborder. La marionnette d'Yvan frappa le sol avec cette arme, son énergie se fondant dans le terrain qui s'ouvrit en de multiples fissures gorgées d'énergie. Celles-ci convergèrent toutes vers le Dragon des mers avant de provoquer sous ses pieds une violente explosion.

Le sable et la terre soulevés firent se lever dans l'arène un épais nuage de poussière et de débris qui, l'espace d'un instant, coupa la vue d'Endymion. Au milieu de ce voile, la sombre silhouette de son adversaire se faufilait au coin de sa vision. Sa voix s'éleva, mouvante, distante, impossible à localiser.

« Mon masque n'est pas là pour cacher quoi que ce soit. Son seul but est de créer. Une rumeur. Une légende. En temps voulu, je l'abandonnerai. Penses-tu que tu auras cette chance, un jour? De laisser tomber le masque? Je peux peut-être l'arracher de ton visage, si tu me le demandes gentiment. »

Sur l'un des flanc du Marina, l'ombre fondit sur lui. Le prédateur qui le traquait frappa de son marteau, encore chargé de cette énergie tectonique, le corps du vénérable Général. Le choc fut moins violent qu'Endymion aurait pu s'y attendre, mais un autre danger, plus subtil, pouvait se sentir dans cette attaque. A travers ce coup, le Cosmos sombre du pantin se répandait dans son corps, dans son âme. Quelque chose commençait à changer en lui, à se tordre, à épuiser ses forces. Un prélude à ce qui allait bientôt suivre.
Briser son corps, d'abord. Le reste ne tarderait pas à suivre. Surtout si le Marina ne faisait rien pour interrompre cet assaut au corps à corps.

Deux faces

A ma grande satisfaction, le duel allait se jouer autant sur le combat en lui-même que sur le terrain des idées. Parfait… Je ne comptais rien céder d’un coté comme de l’autre.
Et malgré ses rodomontades et son coup de pression dès le départ, mon adversaire venait de subir de plein fouet mes deux arcanes.

Le chaos est par définition instable, et donc traître. Impossible de se fier à sa mouvance perpétuelle… Mes cartes représentent l’ordre cosmique établi. A moi d’en saisir le sens, mais je sais qu’elle m’apporte la stabilité nécessaire à toute victoire.

Et justement… Au moment où Yvan frappe le sol, tel Thor avec son marteau, la Mort se jette sur lui, faux en avant et lui porte un dernier coup avant de tirer sa révérence, dans une volute de cendre.
D’un mouvement de main, j’invoque le chariot qui surgit pour m’élever au-dessus du sol, me permettant ainsi d’esquiver l’assaut cosmique dont seule une silhouette résiduelle subit l’assaut. Sitôt revenu sur la terre ferme, quoique dévastée, je me fais frapper par un gros coup de cette masse bien peu subtile, à laquelle j’oppose le tranchant de mes cartes déployées. Projeté en arrière, j’offre un sourire narquois au triste sire. Et dans son dos l’étoile fuse, pour le frapper sournoisement avant de venir me baigner de son rayon régénérateur.

En fait… Je t’aime bien, homme masqué. Mais mon masque me sied parfaitement, car il sert aussi à préserver le monde du Diable qui sommeille. Tu forges ta légende, moi la mienne… Le jour où tu révèleras enfin ton identité, je te promets de t’offrir la première tournée.

J’avais l’impression que nous étions deux faces d’une même pièce. Le sombre du faciès métallique qu’il affichait offrait un reflet étrange à mes propres ténèbres enfouies. A l’inverse, mon visage affiché réjoui et éblouissant pouvait-il faire écho à la beauté intérieure de cet homme ? Chaos et ordre face à face. Quelle affiche…

Les cartes venaient à la rescousse du Dragon des mers, fidèles pour l'heure à leur Maître. Si ces dérobades faisaient naitre de la frustration chez le Chevalier sans Bannière, il ne le laissait nullement paraitre. Le déceler, en l'absence de visage, aurait de toute façon été difficile. Endymion fit de nouveau appel au pouvoir des étoiles pour frapper son adversaire, et en profita pour retourner la provocation de ce dernier en aimable invitation à boire. Loin de prendre la mouche, Yvan sembla s'en amuser. Un rire déformé s'échappa de son pantin, signe que, malgré tout, l'inconnu s'amusait également de cet échange.

« Hahaha! Ce jour arrivera peut-être plus vite que tu ne le crois, en fonction de l'issue de ce tournoi... Mais je te préviens que j'ai une sacrée descente. Tu risques de le regretter, camarade! »

Un instant de silence passa. L'assaut du chevalier d'ombre ne vint pas tout de suite. Cependant, si son corps était immobile, son Cosmos, lui, était en train d'enfler de façon démesurée. Un crépitement électrique parcouru sa main droite, alors qu'une nouvelle arme s'y matérialisait. Cette fois, c'était une faucille dont la lame incurvée brillait des milles éclairs qui la parcouraient. Sur son torse, le Chevalier Noir croisa les bras, et soudainement relâcha toute son énergie.

« Bien. Il est temps de passer aux choses sérieuses! »

Une onde de choc parcouru l'arène. Le Cosmos du chevalier noir se déversa et commença à saturer les lieux. Dans cette zone qu'il établissait, un déséquilibre perpétuel se mettait en place. Le Dragon des Mers pu sentir ses sens se troubler, se mélanger, plus encore qu'auparavant. Des couleurs inconnues lui apparaissaient, ses oreilles sonnaient... Mais si ce n'était que ça! Dans cette zone de pure entropie, plus aucune loi, aucun logique, n'avait court! Autour d'eux, la gravité semblait avoir cessé de fonctionner : des débris s'envolaient pour flotter dans les airs. Les sons de la foule ne leur parvenaient presque plus.
Ici, ni la volonté des Ligures, ni même celle des Dieux, n'avait plus de prise.
Ici, les forces devenaient des faiblesses. Les mendiants devenaient des rois.
La défaite devenait une victoire.

« L'heure de vérité est venue, Dragon des Mers! Il ne reste plus rien ici de cet ordre dont tu vantais les mérites! Tu en es libre, à présent! Mais prend garde à ne pas te noyer... Ha! »

Le chevalier pointa sa serpe droit vers son adversaire, et sous son impulsion une nuée d'éclair s'en échappa pour tout pulvériser. Sol, débris... Et bien sur, le corps d'Endymion! A peine cette déferlante avait-elle cessé que le pantin de feu obscur sauta dans les airs, son marteau de nouveau levé pour frapper d'une violente charge descendante la position de son adversaire. Un ricanement sinistre se devinait encore derrière le masque sans expression de ce bien étrange duelliste.

Le réveil du dragon

Spoiler:

Incroyable...
Cet homme mystérieux n'avait donc pas bluffé. Et par une ruse bien huilée, je me retrouvais privé de l'accès à mes chers arcanes...
Pour le coup, mon unique réflexe fut... d'applaudir.

Je confirme mon invitation. Si tu as une bonne descente, tu risques d'avoir fort à faire avec un capitaine pirate. Le plus à plaindre risque d'être le pauvre aubergiste qui aura le malheur de nous voir débarquer. En tout cas... Bien joué, homme masqué...

Qu'importe ma confiance affichée, le reste du combat allait se muer en véritable épreuve de torture. Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas dû compter sur ma propre force. Et trop habitué à me fier à mon art et mon lien avec le monde des esprits, je pouvais m'apparenter à une proie facile...
Sauf, que j'étais loin d'avoir dit mon dernier mot ! Et il me restait un dernier atout dans ma manche. De quoi tenir jusqu'à la fin de cette épreuve d'endurance.
La foudre fendit l'air et submergea mon pantin, noyé par les éclairs et la poussière. Mais lorsque mon adversaire s'élança pour m'achever avec son marteau, il ne trouva qu'une poigne de fer qui absorba l'impact d'une paume tremblante d'excitation. Et le regard glaçant de ma représentation, si fidèle à mes ténèbres intérieurs, laissa filtrer le Diable éveillé.

Tu te trompes... Il reste... Moi.

Et d'un coup brutal, je repoussais l'arme contondante vers le sol, avant de frapper du tranchant de ma rapière les côtes du pantin adverse.
Le souvenir des interminables duels en compagnie de ma chère Nimue revint m'arracher un rictus sardonique. Combien de nuits passées sur le pont de la Rose Sanglante à croiser le fer ? A me faire humilier par l'adresse et les coups bas de ma belle capitaine à la chevelure écarlate ?
Où que tu sois Nimue, dans les gradins ou ailleurs, le reste du combat te sera dédié... Cette fois l'ennemi n'est pas toi, ma figure de référence, mon défi perpétuel, mais un autre genre d'opposant. Le chaos personnifié.
Or pour régner le Diable a besoin d'ordre. De son ordre. Privé du soutien de mes fidèles et loyales amies, je dois me fier à mes forces propres. Et d'un coté, cela me fait du bien. Me ramène à nos voyages en mer, à courser des navires marchands, à courir pour esquiver les lames ennemies, à bondir, rugir, rire, enrager, pourfendre, et faire couler le sang au nom de Poséidon, et encore plus de cette liberté qui nous gorgeait de son nectar.
Si le chevalier sans visage pensait me voir chanceler, abandonner, me complaire, il en sera pour ses frais. Car je hurle ma rage de vivre à la face des cieux. Dragon des mers...
Et ma langue avide passe sur le fil de ma lame. Oui, ce combat est un défi de plus sur la longue route qui mène au succès. Et à celle me permettant de te dépasser enfin, ô ma belle capitaine.

Le Marina fut prompt à comprendre quel numéro était en train de se jouer. Le Chevalier Noir avait préparé le terrain pour mieux le piéger. Beaucoup d'autres, à la place du Dragon des Mers, avaient perdu leurs moyens, paniqué, et perdu. Mais Endymion était resté maitre de lui. Et il avait raison. Rien n'était joué. Malgré la difficulté auquel il faisait face, il pouvait toujours combattre, se révolter, renverser le rapport de forces... Dans cet espace où tout n'était que Chaos, rien n'était impossible.
Loin de craindre cette éventualité, l'homme masqué semblait enchanté. En constatant que son adversaire avait compris tout cela et allait continuer à lui résister, il laissa échapper un cri de ravissement lorsqu'il fut frappé par l'attaque à la rapière du Marina.

« Une réponse splendide, Marina! Dansons donc! »

Et, pendant plusieurs minutes, le bruit des armes qui s'entrechoquaient résonna dans cette étrange espace. Chacun des deux guerriers parvenait à parer les coups de l'autre, mais aucun coup décisif ne pu être porté. Face aux coups d'estoc de la rapière du Général, le Chevalier sans Bannière était obligé de reculer pour se mettre hors de portée, ou de balayer les airs avec ses armes inconventionnelles qui étaient bien peu adaptées pour la parade. Afin de s'extraire de cette position fort inconfortable, le pantin d'ombre commença à masser dans ses bras une quantité extrême de son énergie. La colère du ciel et du sol se déchaina.

Le Chevalier abattit ses deux armes sur le sol entre lui et Endymion. La foudre et la pierre volèrent dans toute l'Arène, s'écrasant contre la protection de Cosmos qui abritait le public. Mais au milieu de ce chaos, le vagabond n'en avait pas encore terminé. Son marteau et sa faucille gisaient, brisés, au sol. Mais son Cosmos, lui, continuait à se déchainer. Il leva alors une main vers le ciel, où étaient en train de se former une multitude de formes sombres. Des armes. Lances, épées, haches, pavois, masses... Un arsenal composé de pure cosmo-énergie.

« Je voulais garder ceci pour la Finale... Mais je suppose que tu as gagné le droit de mesurer pleinement ma force. Ne me déçois pas, petit Dragon! »

« Trophy Hunt! »

Le bras du duelliste tomba, et avec lui une pluie de métal factice. Sur toute l'arène, la collection de trophées du mystérieux combattant s'écrasa. Bientôt, tout leur environnement ne ressembla plus qu'à un cimetière d'armes, dédié aux guerriers tombés au combat. Une ôde aux victoires du Chevalier Noir. La rapière du Marina allait-elle s'ajouter à ces souvenirs?
Mais il n'y avait pas le temps de souffler pour se poser ces questions. Déjà, le pantin de l'homme masqué avait saisi une lance à côté de lui pour la projeter comme un javelot dans la direction d'Endymion. Il lui lança ensuite une lourde hache, une épée... Avant de saisir deux sabre de Cosmos plantés dans le sol, et repartir à l'assaut. Le combat continuait.

Duel à l'épée

Spoiler:

Voilà bien le genre de combat que je pouvais apprécier pleinement.
Au delà de l'émulation nécessaire entre deux adversaires de valeur, je me gargarisais de voir qu'Yvan prenait autant de plaisir que moi à nous affronter.
Certains combattants avaient le chic de prendre les choses trop au sérieux, à l'instar de Aoife, et faisait peser sur le tournoi une pression peu nécessaire.
Et même si en mon for intérieur, l'envie, voire la nécessité de briller pour démontrer à tous le potentiel des marinas restait bel et bien présent, le frisson de la compétition restait mon carburant.
Et d'une joute cosmique, nous passâmes à une danse martiale, où le fer croisa le fer. Et rapidement, je pris le dessus, obligeant mon adversaire à parer de son mieux, puis à reculer bel et bien !

Ne crois pas m'échapper aussi facilement, moussaillon !

Mais une subite pression de cosmos m’obligea à freiner des quatre fers. Bordel, il ne plaisantait plus...
Et en un rien de temps, je me retrouvais cerné par une nuée d'armes diverses, prêtes à fondre sur moi pour m'empaler... Et pas dans le sens agréable du terme !
Une attaque destinée pour la finale ? J'y répondis par un rictus goguenard, presque flatté.

J'ai l'écaille solide, mais là... Tu ne fais pas dans la demi-mesure !

Et dans une explosion terrible, toutes les attaques d'Yvan foncèrent sur moi... Avant qu'il ne reprenne deux sabres afin de m'achever, en revenant au corps à corps. Où il put constater, à travers un nuage de poussière, qu'une tour composée de cartes venait de me sauver d'un funeste destin.

M'obliger à faire sortir ma tour de Babel... Tu n'es pas n'importe qui, homme masqué.

Le visage en sang, mais sans me départir de mon rictus de sale gosse, je bondis sur Yvan, coupant son élan, afin de l'assaillir de nouveau de ma vélocité d’épéiste aguerri. Et ma rapière fendit l'air, piquant, arrachant, s'abreuvant de sang, alors que j’enchaînais pas de danse, roulade et saut gracieux, pour le plus grand plaisir de notre public.
Mais sous le couvert de mes fanfaronnades, je notais l'approche de la fin de notre duel épique. La cloche n'allait pas tarder à sonner. Tout allait donc se jouer dans les prochaines secondes. Et chaque coup pouvait faire pencher la balance d'un coté comme de l'autre. Quel bonheur d'avoir enfin trouvé adversaire à ma mesure !

Encore un peu de patience. L'horloge continuait de filer, tic après tic, se rapprochant du moment fatidique où cette danse violente et plaisante prendrait fin pour ne laisser que l'un des deux guerrier progresser dans ce tournoi. Le Chevalier masqué respirait la confiance, voir même l'arrogance. Aussi fut il pris au dépourvu par la parade mise en place par Endymion. Face à la tour de carte, il laissa échapper une exclamation marquée par une audible frustration.

« Bon sang, mais de quoi es-tu fais?! »

Jamais à court de tours dans sa manche, le Dragon des Mers était parvenu à mitiger l'un des assauts les plus terribles du vagabond. Le Marina repartit alors à l'assaut, lame au clair, profitant d'avoir brisé l'élan de son adversaire. Une valse de coups et de parades s'ensuivit. Endymion transperçant et faisant onduler sa lame avec adresse. Yvan saisissant et se débarrassant à une vitesse désarmante des multiples armes qui jonchaient le terrain. Il ne put entièrement échapper à la pointe de la rapière de son adversaire, mais son arsenal le rendait imprévisible... Et lui aussi avait encore une carte à abattre!
Au premier sens du terme!

« Tu n'es pas non plus le premier venu, à ce que je vois. Ce n'est pas donné à tout le monde de conserver son assurance en de telles circonstances. Quel panache! Tu me donnes envie de... t'imiter! »

Le pantin d'ombres avait pris quelques pas de distance pour l'espace d'un instant se libérer de la menace de l'arme d'Endymion. Dans sa main, son Cosmos obscur s'agrégea de nouveau. Une nouvelle arme qu'il conjurait? En quelque sorte. Le Marina eut la surprise de voir apparaitre entre les doigts de son ennemi une copie d'une de ses propres cartes. Elle était en tous points similaire à son Arcane de l'étoile, si ce n'était que ses couleurs étaient inversées. Lorsque le roublard la pointa dans la direction de son ancien Maître, l'arcane stellaire s'envola pour aller le frapper, imitant l'attaque précédente du Marina, avant de retourner vers le Chevalier sans bannière pour l'alimenter. Ce dernier fit tourner la carte entre ses mains. Une évidente provocation.

« J'espère que tu n'es pas du genre possessif, eh? Je t'avais prévenu que les cartes étaient du genre volage! Hahahaha! »

Alors qu'il riait, les différentes armes plantées partout dans le sol de l'arène se mirent à léviter dans les airs, s'unissant pour former un vol uni, un courant qui ne tarda pas à se retourner contre le Dragon des Mers. Frappé par cette pluie de lames, Endymion sentit affluer dans son espriut les souvenirs qu'elles contenaient, comme autant de peintures funestes. Une tapisserie de sang, de combats, de duels... Mais aussi de meurtres, trahisons, embuscades, assassinats! Les anciens propriétaires de ces armes n'avaient pas tous connu une mort honorable de la main du Chevalier Noir.

Que son adversaire ait volontairement ou non laissé échapper ces fragments de son passé était douteux. Et surtout, pour l'heure, assez peu urgent. Au contraire de la nouvelle attaque d'Yvan qui se préparait.
Dans sa main libre, sa fidèle faucille était réapparue, et commençait déjà à vibrer sous l'effet des éclairs qui parcouraient sa lame. Le guerrier masqué élança alors sa marionnette pour frapper Endymion au contact et déchainer son attaque. A l'instant où le bras de son adversaire se leva et que la lumière de la lame brillait au-dessus de lui, le Marina vit un dernier tableau apparaitre brièvement derrière ses iris.
Le premier et plus vieux souvenir. Celui d'un simple paysan saisissant ses outils pour frapper un seigneur de guerre qui avait mis les terres environnantes à feu et à sang. La rage et la révolte d'un impuissant, qui n'avait depuis connu que la guerre et les combats.
Et le couperet tomba.

Hommage

De chair, d'os et de rhum !

M'écriais-je, hilare, en tout malmenant mon adversaire à coup de rapière. Au final, bien que très disputé, ce combat m'offrait le parfait défouloir, afin d'exorciser les derniers évènements. Et la frustration de ne pas avoir pu venger mon Légat.
Une nouvelle fois, Yvan se fit rapidement débordé par ma vélocité, et prit de la distance, avant de répliquer avec force. Concentré sur le combat, je lui adressais un sourire en réceptionnant son compliment.

Allons... Une copie ne vaut jamais l'original, c'est bien connu.

Le taquinais avant de comprendre le sens de sa réplique. Le vil gredin...
Totalement pris au dépourvu, je me fis frapper par ma propre étoile, comme si Calista elle même venait de me coller une bonne gifle. Une douleur suivie par la frappe des armes volantes du chevalier sans visage...
Mon pantin commençait à souffrir, mais il adressa une révérence ironique au provocateur, pour mieux reconnaître son audace et son indéniable talent.

D'ordinaire, je suis plutôt partageur dans un bon lit... Mais, pour l'occasion, je te concède cette fleur. En attendant que tu viennes constater mon affirmation en personne, si le cœur t'en dit.

Un clin d'oeil égrillard et voilà qu'une pluie d'images dévoilent enfin quelques pans du passé de ce mystérieux bonhomme. Et une vague de compassion me traverse face au dernier tableau...
Une faiblesse émotionnelle vite balayée par le danger imminent. Et déjà les Ligures s’apprêtaient à annoncer la fin du combat !
Tout se joua en une fraction de seconde. Alors que la foudre fusait vers moi à toute vitesse, elle ne rencontra que poussière. Et au moment où le gong retentit, mon pantin fusa du néant, posté fièrement sur un chariot sinistre, sous les vivats d'une foule ravie.
Sur ce dernier pied de nez, je fis apparaitre une bouteille de rhum, ingurgitais une généreuse rasade avant d'expédier la bouteille au vrai Yvan. Même pour l'alcool, je n'étais pas possessif.
Et en attendant le verdict de ce match splendide, mon pantin adressa à nos spectateurs moult révérences et baisers.
Quant à moi, je saluais le ciel, en espérant que l'âme d'Orpheus et l’œil de Poséidon n'avaient rien manqué de mon hommage.

Encore une fois, une dérobade. Encore une fois, le Dragon des mers lui échappait. Le pantin du guerrier sombre était pourtant prêt à le poursuivre, lui et son chariot. Déjà, la foudre de sa serpe, infatigable, se chargeait à nouveau. Cependant, avant que le coup puisse partir, la cloche retentit dans l'arène de Camelot, signalant la fin de ce combat qui n'avait pas été sans surprise. La tête de la marionnette d'ombres se tourna vers les gradins où plusieurs Ligures jugeaient des affrontements. La voix exagérément déçue de "Yvan" s'exclama.

« Oh! Déjà? Le temps passe si vite quand on s'amuse! »

Les bras et épaules du duelliste s'affaissèrent. Tout autour de lui, les dernières armes de Cosmos ainsi que son étrange zone d'entropie étaient en train de se dissiper. Les règles de la réalité reprirent le dessus, ramenant chaque chose à sa place. Les rochers, sur le sol. Les sens des combattants, dans les bons organes.
Sur son balcon, l'homme masqué réceptionna la bouteille de son adversaire et la considéra un instant. Il ne la porta pas à sa bouche, mais eut tout de même un signe de tête pour le Dragon des mers, en guise de remerciement. Leurs masques devaient rester en place, même si ils s'étaient quelque peu fissurés pendant leur échange. Bientôt, cela changerait. Yvan posa l'alcool sur le garde-fou du balcon, et croisa les bras tout comme son pantin pour attendre dans le calme et le silence le verdict des arbitres.

Les Ligures qui avaient observé le combat étaient en train de parler entre eux. Les échanges semblaient agités, signe d'éventuels désaccords. Il leur fallut cependant à peine une minute de débats pour finalement trancher : le seigneur Lancelot se leva pour tendre finalement le bras dans la direction du Marina, le désignant comme le grand vainqueur de ce duel. Le crieur ne tarda pas à confirmer ce résultat en annonçant son nom. Dans le sable de l'arène ravagée, le Chevalier sans Bannières exprima sa déception par un coup de pied exaspéré donné dans le sol. Sa voix passa de nouveau à travers son pantin, pour transmettre à Endymion ses dernières paroles à moitié couvertes par les cris de la foule en liesse.

« Tch! Il semblerait que les règles des Ligures soient à ton avantage, Endymion du Dragon des Mers. Félicitations. Maintenant tu as intérêt à gagner, que je puisse au moins me vanter d'avoir perdu face au Champion de Camelot! »

Le pantin du Chevalier bondit pour aller rejoindre son propriétaire sur le balcon d'observation. La créature factice se désagrégea alors, les ombres se dissipant pour redonner à la marionnette son bois d'origine. Le Chevalier masqué, lui, se contenta de prendre la bouteille, son lot de consolation, et de tirer sa révérence après un simple geste de la main vers le Général de Poséidon.

Endymion est qualifié pour la Finale du Tournoi !

Endymion est qualifié pour la finale du Tournoi !

Re: Demi-finale : Combat n°2 - Endymion vs Yvan

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