[Fin Mai 553] Visite de la Maison Hantée

Paros avait été libéré du Labyrinthe des Gémeaux, mais après ce calvaire il n'eut cependant aucun instant de repos! Il devait continuer son ascension, car la lutte contre la saleté ne permettait pas la moindre paresse! Le Chevalier de Pégase avait encore de nombreuses marches à libérer du joug de la crasse... Et même si son passage par la troisième Maison du Zodiaque l'avait retardé, le soleil venait seulement d'atteindre son zénith! Il avait encore toute une demi-journée pour atteindre le Temple du Cancer!
Et de tout ce temps, il en eut bien besoin. Car les escaliers séparant le Temple de Silas du suivant étaient surement les plus longs que le jeune Chevalier avait eu à nettoyer à ce jour. Il arriva même au stade où l'eau de son sceau se retrouva vidée, et il dut redescendre dans la demeure des Gémeaux pour refaire ses réserves. Sous les rayons impitoyables du soleil, Pégase passa donc l'essentiel de la journée à user tous ses talents pour rendre leur primeur aux marches du Sanctuaire. Sa volonté et son endurance furent mis à rude épreuve, mais après ce qu'il lui sembla une éternité... Il arriva finalement en vue de la demeure du Cancer.

Paros observa les alentours. D'aussi loin qu'il s'en souvenait, ce Temple-ci était demeuré vide. Il connaissait le Chevalier qui y séjournait autrefois, Odoroï. Ce Saint, comme son maitre avant lui, avaient passé l'essentiel de leur temps en mission au loin du Sanctuaire. Et aucune n'y était revenu depuis des années. Les lieux, bien qu'entretenus, avaient donc toujours été froids et désertés. A sa connaissance, aucun Chevalier n'avait la garde des lieux. Il fallait dire que la réputation de cette maison n'aidait pas : on disait la demeure du Cancer hanté! Les histoires disaient même qu'il y avait une entrée vers le monde des morts dans ses sous-sols, et que parfois les âmes des défunts traversaient le voile pour y trainer les vivants.
Paros déglutit. Il était adulte maintenant! Et Chevalier! Ces histoires n'auraient plus dû l'affecter! Et pourtant... Il ressentit un frisson dans sa nuque en approchant de l'entrée. Sa rencontre avec Thanatos lui avait prouvé que les âmes des morts pouvaient bien parfois apparaitre aux mortels...

Anxieux et fatigué, il envisagea un instant de s'arrêter aujourd'hui dans son ascension. Avec un rythme de deux escaliers par jour, Pégase arriverait jusqu'au Grand Pope en moins d'une semaine. Et c'était plutôt un exploit, quand on pensait au nombre de marches présentes sur la route qui conduisait au Temple d'Athéna! Mais Le Soleil était encore haut, même s'il ne tarderait pas à se coucher. Surement les fantômes ne sortiraient-ils pas avant la tombée de la nuit? Et Paros sentait qu'il avait encore quelques forces en réserves... Alors il décida de persister!

Le jeune homme, ses instruments à la main, s'avança donc dans le Temple du Cancer sur la pointe des pieds. Surement n'y avait-il personne pour l'entendre de toute façon mais... On n'était jamais trop prudent!

- Ne vous inquiétez pas, messieurs les fantômes, je ne fais que passer...

En murmurant ces mots, le Chevalier de Bronze hâta le pas. Ses sens étaient à l'affut, et sans explication une légère tension était en lui. Et en même temps, il y avait une petite joie, primaire et presque enfantine, qui chantait en lui.
Qu'y avait-il de plus amusant au finale que de volontairement se donner quelques frissons?

Cassandre était passablement de mauvaise humeur, ce qui, pour elle, était synonyme de mauvais sommeil. La cause d’un tel état était son entraînement. Elle avait passé les huit dernières heures à s’essayer à la méditation. Son maître lui disait toujours qu’en élevant son esprit, elle pouvait élever son âme, et donc son aura. Et devenir une lame aussi tranchante qu’un fil d’épée. Sauf qu’elle avait beau s’assoir sous une cascade, se priver volontairement de ses sens, enchaîner les positions farfelues que Rowena lui avait enseigné, elle continuait à ne pas trouver le calme. Il y avait toujours cette petite voix dans sa tête qui lui hurlait dessus lorsqu’elle essayait de méditer. Têtue comme une bourrique, la belle Romaine avait décidé que non, pas cette fois. Cette fois, elle allait y arriver, bon sang de bonsoir.

Et ce ne fut pas le cas, il en va sans dire. Ruminant sa défaite, elle avait essayé de s’assoupir quelques instants. Après tout, quitte à chercher un état second qui lui permettrait de sonder les tréfonds de son âme, autant le faire appel aux doux bras de Morphée. Mais, évidemment, puisqu’elle était d’une humeur massacrante, qu’elle ressassait son échec, son corps refusa le repos. Serrant les dents, elle essayait vainement de fermer les yeux une dernière fois lorsqu’elle sentit une aura. Un chevalier grimpait les marches. Il serait une victime de son horrible état d’esprit, c’était un fait inéluctable.

Alors que Paros s’amusait à se faire peur, la jeune femme s’était sigileusement glissée derrière lui, et sans attendre lui adressa une chiquenaude sur le coin de l’oreille, avant de rejoindre les ombres. Ce dernier s’était arrêté, droit comme un piquet, alors que Cassandre, derrière son masque (et son pylône) etouffait un gloussement. Oh lui, il allait prendre pour tous les autres - Quels autres ? Aucune idée - Le Cancer avait, sous la main, une coupe d'étain. C’était parfait. Elle la plaça contre son masque ivoire, et parla dans ce dernier. Celà lui donnerait un ton métallique, quasi fantomatique.

“Les fantômes qui gardent le quatrième temple ne laissent pas passer sans agir. Présente-toi, malheureux, avant que nous ne dévorions ton âme.”

Etouffant de nouveau un ricanement, le chevalier d'Or imagina la tête du garçon qu'elle venait de croiser. En tout cas, il se souviendrait de cette visite !