[Janvier 553] Partir dans la brume (PV : Rowena, Esmelia, Lykeios)

Ces derniers jours, en attendant des nouvelles de mon amie, je n’ai pas chômé. En travaillant jour et nuit à la sueur de mon front, j’ai enchaîné les commandes de l’atelier et les ventes de dessins faits en direct le matin sur le forum. Il me fallait récupérer de l’argent pour palier à mes futures dépenses imprévisibles. La dernière fois que j’avais vu Célestia, entre autres, un voyage avait été évoqué alors si nous devions partir, autant avoir de quoi pourvoir à mes besoin et ne pas être un parasite pour elle. Pour cette même raison, ma grande sacoche de cuir était déjà prête avec tout mon nécessaire à peinture ainsi qu’une tenue de rechange. Aujourd’hui j’ai sur moi une robe marron chocolat qui se marie très bien avec le bleu ciel de mes long cheveux.

Alors que je suis en plein travail, mon amie arrive dans l’atelier. Elle me repère facilement et je lui sourit d’un air ravi. Les choses vont bouger je le sens. Je laisse mon travail en plan, faisant signe à un assistant de s’en occuper et je la rejoins aussitôt. Elle est très brève et je comprends qu’il ne faut pas perdre de temps. Je suis quand même curieuse sur ces fameux deux autres, mais j’aurai le temps de m’y intéresser plus tard. Je file directement voir Andréa et lui explique que je dois partir sur le champs. Il n’est pas surpris, je l’ai déjà prévenu que quelque chose de ce genre pouvait arriver. Je le remercie et je file dans ma chambre revêtir ma cape de voyage et ma sacoche puis je cours aux écuries récupérer mon cheval.

C’est un magnifique genêt d’espagne. Sa robe est grise clair mouchetée de blanc et sa crinière est un mélange de gris un peu plus foncé et de blanc également. Il me fait penser à la lune alors sans surprise je l’ai appelé Lune. Je l’ai acheté il y a un an alors que j’avais amassé plein d’argent grâce à mon travail. Ne pouvant l’emporter à la Tour, il a toujours été logé chez Andréa et n’a donc pas souffert de la catastrophe. Nous avons déjà fait quelques trajets ensemble, mais aujourd’hui il va probablement parcourir bien des lieues. Heureusement qu’il est de ces races robustes et endurantes. Grimpée sur son dos, je retrouve Célestia devant l’atelier.

- Je suis prête, nous pouvons y aller. Et parce que la question me taraude, je demande : Qui nous accompagne ?

J’aimerai bien savoir où va-t-on également mais ça j’imagine qu’elle ne tardera pas à me le dire.

Les choses se précipitaient enfin. La veille, il avait pu faire un long résumé à Veena de ce qui avait pu se dérouler. Elle n’ignorait pas qu’il avait déposé un message à la basilique Saint Pierre, qui permettrait à un Oracle le connaissant de s’assurer qu’il s’agissait bien de lui, afin de pouvoir le rencontrer. Et qu’il y retournerait chaque nuit, en l’espoir de croiser l’un des leurs. C’était ce qui s’était passé, et nulle autre que Célestia l’avait donc attendu. Ils avaient pu discuter, avant d’échanger encore par la suite avec Marcus, démiurge des moineaux, qui était leur contact au sein de la basilique.

Les choses suivantes avaient été décidées : comme ils le pensaient, la mission concernant les Rois Francs étaient toujours considérées comme primordiales, ils poursuivraient donc de ce plan, grâce à elle qui avait gardé cette fiole tout ce temps ; reconnaissant qu’il pourrait être intéressant de nouer des contacts diplomatiques avec les guerriers d’Arès ou les Atlantes, un consensus s’était fait néanmoins sur le fait qu’ils n’auraient rien à offrir lors de telles négociations ; que la priorité en restait donc à cette mission les menant en Francia et en Burgondie, et qu’ils partiraient dès le lendemain soir. De plus, Célestia avait trouvé une ancienne artiste qui vivait à la cathédrale, et qui avait également terminé son Itinérance.

Ils partiraient à quatre donc, avec pour but d’oindre les Rois Francs, de s’en faire des alliés et donc des troupes parmi les non-éveillés, et tant qu’à faire, il se pourrait que quelques détours se fassent, notamment pour Lyon où Abrarxès lui avait conseillé de se rendre. Une longue explication pour évoquer tous les détails, et notamment l’affaire du papillon cosmique qui lui faisait craindre une tentative d’espionnage. Il faudrait donc encore être extrêmement discret, au moins tant qu’ils seraient à Rome…

Une part de la journée avait donc été accordée au repos nécessaire avant de partir dans une telle quête. En fin de journée, quelques provisions avaient été achetées avec le très maigre pécule qu’ils avaient pu mettre en commun, tandis que leurs montures – la manière dont ils avaient pu les acquérir, illégale, resterait à ses yeux dans le passé – étaient préparées pour le départ. Il porte une cape ample le recouvrant, dotée d’une capuche lui couvrant la tête, et porte ses gants fourrés habituels. Indique au Cygne l’endroit où ils doivent se rendre, et lorsqu’ils y parviennent, force est de constater qu’ils sont les premiers.

- Elles ne devraient plus tarder.. Attendons un peu.

Il démonte alors, volontairement sur le flanc où se trouve Veena. L’observe un instant, souhaitant tenter de voir si tout va bien pour elle. Est-elle inquiète également en cet instant ? Lui l’est. Et si Célestia et son amie n’arrivaient pas ? Et si c’était les troupes de Narsès qui finalement venaient les accueillir ? Dans une telle situation, forcément, les secondes deviennent des heures, et tous les scénarios devenaient possibles...

La main de Rowena se serra avec prudence sur la fiole qu’elle avait caché bien précieusement au fond de sa sacoche. L’effleurer du bout des doigts provoqua un tremblement d’appréhension, mais elle reprit rapidement contrôle de ses sens pour grimper sur le dos de sa jument. Son regard trouva la silhouette de Lykeios dans le soir tombant et elle suivi le mouvement de celui-ci dans les rues de Rome. Ils ne seront pas restés bien longtemps en ville, et ce n’était pas plus mal aux vues des dangers qui régnaient pour eux ici. Ils avaient trouvés une raison de continuer leur route ainsi qu’un nouveau but à accomplir, et cela suffisait pour le moment au Cygne. Les quelques nuits d’attentes, seule, alors que Lykeios se rendait à ses rendez-vous n’avaient pas manqué d’inquiéter Rowena, moins pour elle que pour lui, mais il était revenu avec de bonnes nouvelles. Et désormais, ils allaient se rassembler avec deux autres Oracles et partir. Vers la Francie, comme elle l’avait si justement supposé.

A nouveau, la jeune femme exprima un vif frisson qui fit tressaillir tout son corps. Et ce n’était pas le contact de la très précieuse fiole de sang qu’elle avait protégé des mois durant qui éveillait pareil tremblement, mais bien sa propre malédiction qui était difficile à contenir. Elle appréhendait grandement le couché du soleil et la nuit à venir. Car une fois l’astre pleinement tombé, l’esprit de Veena avait tendance à si facilement s’éclipser de son propre corps pour laisser à celui-ci la paix d’une nuit, à la faveur de la lune. Mais elle ne pouvait pas se le permettre, alors que le voyage commençait. Mais museler sa propre conscience, si cela n’affaiblissait pas réellement ses forces physiques, était éprouvant pour son esprit, et ses yeux un peu absents reflétaient cette concentration qu’elle se forçait à créer pour les heures à venir. Heureusement, elle masquait ceux-ci par la grande cape noir qui recouvrait sa belle chevelure, cachant son visage pâle et tendu. Elle n’avait pas envie d’inquiéter plus que ça son compagnon de voyage qu’elle devait deviner tout aussi préoccupé. Car le rassemblement qu’ils allaient faire, pour quitter la ville, était celui d’Oracle. Et un ennemi puissant leur faisait la chasse ici bas. Hélas, tant qu’elle n’avait pas réapprit un peu à ligoter mieux que ça l’esprit au corps une fois la nuit tombée, il serait difficile pour elle de laisser ses pensées et son attention sur autre chose.

Une brise un peu froide mais bienvenue rappela à Rowena la présence rassurante de Lykeios, qu’elle n’avait pas vu descendre de son cheval. Elle s’en voulu de faire preuve d’aussi peu de présence et presque instinctivement, comme une légère punition contre elle même, elle pinça l’une de ses épaules où sous les vêtements était dessiné un des sceaux d’Apollon. Elle releva son regard vers l’Epervier pour lui adresser un sourire, moins lumineux que d’ordinaire, mais sincère pour lui malgré tout :

« Elles viendront. »

En tout cas, elle le croit et elle veut ses paroles rassurantes à l’intention de Lykeios. Une seconde, elle hésite même à laisser sa main et le bout de ses doigts venir se poser sur l’épaule de celui-ci, si proche d’elle. Mais elle retient le geste qu’elle aurait pourtant esquissé avec… avec le Loup. L’hésitation n’est pas contre lui, elle ne veut cependant point précipiter de choses ou donner une étrange vision d’elle même. Difficile de savoir où elle en était vraiment avec lui, malgré l’affection qu’elle ressentait.

Préférant taire ces pensées, elle releva les yeux vers les rues en scrutant l’arrivée des deux autres, et se maudit un instant intérieurement de trembler encore.

Nous sommes sur nos montures et je suis Célestia qui ouvre la marche puisque je ne connais même pas le point de ralliement. Elle ne m’a pas répondu ou si, une réponse qui veut dire plus tard, alors je patiente. Je comprends que des oreilles indiscrètes pourraient traîner alors naturellement je garde le silence. Nous ne sommes pas si loin et le trajet est plutôt court. Les deux silhouettes se prolifèrent à l’horizon. Je ne les vois pas encore vraiment bien, Célestia m’obstruant la vue sur ce qui se trouve face à nous, mais nous finissons par nous arrêter à leur hauteur sans descendre de cheval. Aux mots de ma blonde amie, je décide de me cantonner à un bref : « Bonsoir ! » Enthousiaste. Je devrais être inquiète, une partie de moi l’est, mais l’excitation de l’aventure surpasse cette crainte de nos ennemis éventuels. Cela et aussi le fait de rencontrer deux nouvelles têtes, bon… Des têtes encapuchonnées certes et dont je ne vois pas le visage du coup, mais nous sommes tous ainsi donc ça me semble normal. Plus encore de ne pas pendre le risque d’être reconnu si la capuche était abaissée. Étant nouvelle je ne pense pas courir de risque, mais il vaut mieux être trop prudent que pas assez.

Nous prenons la route et je suis Célestia de près. Je suis trop curieuse mais je résiste à l’envie de me retourner pour tenter d’apercevoir le minois des autres Oracles. Nous progressons et je garde le silence. Célestia finit par parler, signe que nous devions être suffisamment éloignés de la ville. Je me redresse et me tourne vers l’arrière. La ville a effectivement disparu, la brume l’enveloppant et nous préservant à l’abri des regards. On ne pouvait pas espérer meilleur temps pour un départ discret.

Aux présentations, je pousse légèrement mon couvre chef, juste ce qu’il faut pour leur montrer mon visage. Je ne vois toujours pas les leurs. Les noms ne me sont pas inconnus, j’en ai entendu parler lorsque je travaillais à la Tour des Vents, mais je ne crois pas avoir eu l’occasion de discuter avec l’un d’eux. Aperçu éventuellement, mais comme je ne sais toujours pas à quoi ils ressemblent je ne saurai dire. Sur ce point je les laisse donc répondre. Moi qui était surexcitée quelques instants auparavant, le début de la route dans ce silence pesant m’a calmée et je suis plus sereine, plus posée. Ma voix est calme, douce comme mon visage encadré de mes longs cheveux bleu.

- Ravie d’être des vôtres. Je suis Iris, Patronne de la Peinture. Oh et j’ai rencontré un autre nouvel oracle il y a peu. Il s’appelle Kyrios, Oracle d'Actéon. Il projetait de quitter Rome car il était suivi par des hommes encapuchonnés. Nous avons eu un très bref échange et je pense que nous avons été suffisamment discrets. Comme il valait mieux qu’il mette de la distance rapidement entre lui et eux, je l’ai laissé partir. J’ai l’intuition que nous allons être de plus en plus nombreux. D’autres ont dû entendre l’appel.

Je ne perds pas de temps en donnant directement l’information en ma possession. Même s’ils ne peuvent rien en faire à ce moment précis, je me dis que c’est un petit espoir que j’apporte avec moi.

Les mots de Rowena lui font regagner un peu de patience. Le fait qu’il puisse la sentir sincère y aida. Ses billes de glace se tournent un instant vers elle, tente de savoir ce qu’il peut se lire sur son visage, mais le moment s’est déjà fané, et Veena de porter son regard en direction des rues, guettant l’arrivée de Célestia et son amie. Et en effet, deux silhouettes ne tardèrent pas à s’y dessiner, montées elles aussi. De là où il était, il aurait pu supposer qu’il s’agisse de deux jeunes femmes, ou bien d’enfants, à en juger aux carrures. Aussi n’eut-il pas longtemps de doute sur la seule version crédible portant sur leur identité. Lykeios ne tarda donc pas à remonter en selle lorsque les deux groupes se croisèrent, afin qu’ils puissent rapidement se remettre en marche tous ensemble.

Il était resté légèrement en arrière, au cas où. S’il devait arriver quelque chose de fâcheux, des gardes tentant de les arrêter par exemple, il faudrait agir vite et sans hésitation. Il s’estima le plus qualifié à ce type d’action, qui il fallait le dire commença à lui manquer et le démanger aussi. Heureusement, il n’y eut rien de toute cela, et le petit groupe prit rapidement de la distance avec la cité romaine. Assez pour que Célestia se sente le moment venu de faire les présentations. Il ignorait s’il avait croisé une Esmelia. Pas plus qu’une Iris. Le Zéphyr se contente d’un petit grognement de gorge et d’opiner en guise de salutation. Une précision cependant s’échappe de ses lèvres, puisque Marcus la veille leur avait dit que leur titre était important.

- Iris… Nous sommes les Éminences de l’Épervier de Zéphyr et du Cygne d’Euros.

Lâche-t-il formellement de sa voix rocailleuse, laissant deviner qui était l’Épervier et qui était le Cygne… ce qui n’était pas très difficile ! Ne dit rien par contre à propos de cet autre Oracle qu’elle avait rencontré. L’information était importante, car cela témoignait que d’autres encore continuaient de s’éveiller. Mais il était trop tard pour eux, ils ne pouvaient pas se permettre de faire demi-tour pour en attendre d’autres. Ainsi, durant un temps du moins, quatre ils seraient !

Lykeios talonne alors sa monture. Il n’est pas très adroit à cheval, l’équitation étant très loin de ses principaux centres d’intérêt, aussi se passe-t-il d’une petite mise en valeur stylistique de son discours. Alors oui, ça serait plus classe de pouvoir les doubler, se retourner et faire marcher son canasson en marche arrière ou en crabe pour discuter avec elles, mais déjà qu’il se maintienne juste à leur niveau sans avoir l’air trop ridicule était déjà bien assez, vraiment… Comme après inspection, il n’y avait personne autour d’eux, ils pouvaient se permettre de pousser la discussion plus avant.

- Il nous faut discuter d’un point très important dès à présent, je pense. Plusieurs destinations s’offrent à nous, pour différentes pistes : nous pouvons aller prendre conseil auprès de l’ancien Augure Adalrik à Toulouse, ou bien partir directement nous engager dans le vif de notre mission. Il nous avait été dit de nous rendre au Nord de la Provence… Avec… Rowena, avant que nous ne renoncions à cette mission à cause des conflits dans la région, nos pistes et pas nous avaient menés à Reims. C’est toujours à nos yeux une piste crédible, mais qui mériterait d’être approfondie par enquête chemin faisant. J’ai toutefois été entretenu d’une autre piste, lors d’une discussion avec le Tuatha du Taureau… Il m’a indiqué que si je parvenais à rassembler d’autres Oracles à Rome, il serait intéressant que je me rende avec eux à Lyon, où il se pourrait que nous puissions « voir le patron si nous avons de la chance », pour reprendre ses propres mots. Si je n’écoutais que moi, je partirais bille en tête directement pour Lyon. Mais les conseils d’Adalrik pourraient être précieux avant d’entamer quoi que ce soit, malgré le détour que cela occasionne. Puisque nous voyagerons à quatre, je propose que nous votions la chose. Pour l’heure, la majorité l’emportera et décidera de notre première destination.

Son avis à lui était déjà connu donc. Un regard de gauche et de droite, cherchant à obtenir le leur.

Les silhouettes de deux personnes à cheval finissent par entrer dans son champ de vision. Il faut le temps à ses yeux de s’habituer à la pénombre en devenir pour percevoir enfin qu’il s’agit de Célestia et de l’autre Oracle qui accompagnerait leur mission. Sa bienveillance habituelle lui commande d’accueillir les deux arrivantes d’un sourire, mais si elle le fait, il est crispé des tremblements qui continuent de se déverser dans tout son corps. La concentration reprend place et un « Bonsoir » est murmuré du bout des lèvres. C’est le meilleur accueil qu’elle puisse faire en cet instant, bien qu’elle soit rassuré de voir les deux jeunes femmes bien portantes. Ils ne tardent pas à prendre la route et c’est pour le mieux, car s’attarder en ville n’est plus la chose à faire. Leur petite troupe se met en marche et il ne faut pas longtemps pour serpenter dans les rues et quitter la ville. Ils s’éloignent et peu à peu, les quelques lumières finissent par s’effacer dans la nuit, étouffées par la distance et la brume qui masque leur départ. Seul le bruit des sabots répond au silence, jusqu’à ce que Célestia, devant à la tête du petit convoi ne fasse enfin les présentations.

« C’est un plaisir de te rencontrer Esmelia. C’est la première fois que nous nous voyons. » Dit-elle à la suite de la présentation un peu formelle de Lykeios. La voix du Cygne est douce mais sincère à l’encontre de la nouvelle venue dans les rangs des Oracles et elle souhaite - espère - que les choses se passent pour le mieux dans cette mission. Mieux que pour l’autre Itinérant d’Apollon que semble avoir rencontré Iris et dont la situation à l’air plus compromise. Rowena garde les lèvres clauses à cette mention, mais prie que celui resté à Rome trouve la route de Marcus et soit en sécurité. Ils n’ont pas besoin de perdre déjà des compagnons.

Toute à ses pensées et sa concentration, elle remarqua néanmoins le bruit de trot du cheval de Lykeios à ses côtés, remontant la ligne qu’ils ont formé pour mieux s’adresser à tout le monde. Il ne perd pas de temps et il a raison d’aborder le sujet, car ils ne peuvent commencer leur route sans savoir exactement où ils allaient se diriger. Elle n’est pas surprise de son choix, car il avait déjà commencé à lui confier quelques traits de cette discussion qu’il a eu avec un autre, avant de la retrouver. Pas grand chose, mais suffisamment pour ne pas être surprise.

« Lyon est plus proche de notre route si nous choisissons de nous rendre au nord de la Provence, et plus précisément Reims. Alors que Toulouse est loin et nous éloignerait de notre destination. Même si les conseils d’Adalrik peuvent être précieux, nous pourrons peut-être apprendre quelque chose à Lyon de tout aussi important. Et si ce que nous trouvons là bas n’aide pas grandement à notre mission, cela n’aura occasionné qu’un léger détour si d’aventure nous souhaitons nous rendre à Toulouse par la suite. » C’est ainsi son avis, non pas pour suivre Lykeios avec qui elle avait pourtant passé beaucoup de temps ces dernières semaines, mais bien parce qu’il y avait peut-être à Lyon quelque chose qui pourrait aider les Oracles d’une façon ou d’une autre. Elle était persuadé que cela n’occasionnerait pas tant de pertes de temps que ça… et après tout, Lyon était au nord de la Provence !

Les présentations sont faites et me laissent une impression étrange. Cependant je peux déjà conclure que je ne connais ni l’un ni l’autre. Ce voyage sera certainement un bon moyen de faire connaissance, peut-être... Le cygne semble douce et polie alors l’épervier est moins… Sociable ? Je ne sais si c’est le bon mot mais c’est le meilleur qui me vienne à l’esprit, du coup j’appréhende un peu l’ambiance. Évidemment je ne m’attends pas à ce que ce soit gai tous les jours et les risques que nous prenons sont sérieux, mais j’espère qu’au moins nous ne seront pas oppressés par un silence pesant en plus. Enfin, je verrai bien. En tout cas, je remarque que ses pensées sont focalisées sur la mission. Je l’écoute évoquer les pistes ancienne et nouvelle ainsi que la possibilité de prendre conseil auprès de l’ancien augure.

La réponse du Cygne me semble sage et efficace. Nous avons déjà une piste, autant en profiter mais ce n’est pas l’avis de Célestia qui tient à voir l’ancien Augure. Elle a d’ailleurs de forts arguments et moi qui suit néophyte dans tout cela, je ne sais quoi en penser. Je vois bien qu’ils attendent mon avis mais je suis un peu mitigée sur tout cela. En plus personne n’a eu l’idée de me dire quelle est la mission, alors bon je me trouve un peu bête là à devoir trancher alors que je n’ai pas tous les éléments en ma possession.

- A l’occasion je veux bien quelques explications sur notre mission au juste. Célestia ne m’a rien dit. Bref, là si je vous écoute, nous avons le choix entre prendre conseil auprès de l’ancien Augure, mais rien ne garanti qu’il ait des indices à nous donner. Ou suivre une piste récente… Sur le point du risque pris ou pas, nous sommes quatre, dont vous trois qui avez de l’expérience derrière vous, je pense que nous saurons remarquer s’il y a un piège ou nous en sortir le cas échéant.

Je soupire un peu. Difficile de prendre une décision sans connaître notre but et l’urgence des choses. En l’état, ils sont deux à vouloir aller à Lyon et une à Toulouse.

- On peut déjà conclure que nos pas nous mènerons en Francie alors je propose que nous nous rendions en Provence et que nous réfléchissions là bas. Sauf si vous voulez que le choix soit fait là tout de suite, mais alors il me faudra tous les tenants et aboutissants.

Je regarde Célestia. Je ne sais pas encore ce qu’elle décidera mais je propose tout de même une idée.

- Si vraiment tu ne veux pas attendre et aller à Toulouse en premier, nous pouvons éventuellement nous séparer temporairement. Tu as dit que là bas il n’y avait aucun risque, alors je pense que tu peux t’y rendre seule pendant que l’on prend de l’avance. Nous gagnerions du temps au final. Je nous fabriquerai un moyen de communication si besoin pour que l’on puisse s’échanger nos découvertes et que tu puisses nous rejoindre. C’est une idée, je ne vous demande pas de décider maintenant, comme je l’ai dit dans tous les cas nos pas nous mènent au Sud de la Francie et nous avons donc tout le temps pour la réflexion d’ici là. Nos choix ne doivent pas être précipités. Effectivement c’est important d’avoir une bonne préparation.

La prochaine destination est décidée, ce qui suivra reste en suspens, des questions nécessitent des réponses mais qui peuvent attendre la Provence alors s’ils le souhaitent nous pouvons poursuivre notre chemin et repousser la discussion à plus tard, où tout mettre à plat dès maintenant.

Sans jugement, il écoute tous les avis, bien entendu. S’il a donné sa préférence, il n’est pas aussi tranché qu’il en a l’air. Lykeios se rangera de toute façon à la majorité pour le moment. Il ne chercherait en effet pas à forcer le groupe à le suivre, et si deux d’entre elles parvenaient à se mettre d’accord, alors cela en déciderait de leur itinéraire à ses yeux. Veena est la première à s’exprimer, et sa réponse ne l’étonne pas. C’est elle qui a préservé les espoirs d’accomplissement de cette mission en préservant l’huile ces dernières années. C’est elle qui a suggéré la première qu’ils reprennent cette affaire là où ils l’avaient laissée. Ils se rejoignaient fortement, alors. Lyon était une entame parfaite, la ville étant un bon point de départ, rassemblant les directives maigres données par Apollon et l’indication plus récente d’Abrarxès.

Cependant, là où Lykeios pencherait plutôt pour la poursuite de la mission jusqu’à son accomplissement, elle tempère cela en proposant d’aller alors à Toulouse si la visite à Lyon n’a pas été concluante. Pourquoi pas, en vérité. Leur vieille piste qui les avaient mené à Reims ne se basait pas sur grand-chose. Si Lyon ne donnait rien de plus précis, aller quérir la sagesse d’Adalrik resterait alors une meilleure idée qu’avancer simplement à l’aveugle. Et puis… les gens comme ça, ça avait souvent des réseaux, non ? Ceux qui souhaitaient servir Apollon mais qui n’allaient pas se battre devaient bien briller ailleurs, n’est-ce pas ? Simple supposition une nouvelle fois, mais oui, la variante de Veena lui plaît !

Lykeios se moquait un peu de l’huile. Se moquait un peu du sceau. Les Rois Francs et Adalrik n’étaient pas Apollon. Le seul qui lui avait indiqué la lumière, c’était Abrarxès, en lui indiquant le piste de Lyon, lui disant qu’ils pourraient y voir le patron. C’était là son but, unique. C’était là la seule chose qui le guidait pour l’heure. Aussi les craintes de Célestia ne lui évoquèrent rien. Il avait décidé de faire confiance au Taureau Noir. Peut-être à tort. Tout comme ils avaient fait confiance à Marcus à Rome, sans quoi la situation n’aurait avancée. Tout comme ils étaient disposés à faire confiance à Adalrik, sans être sûrs qu’il ne soit pas sous l’emprise d’un nouveau maître à présent. Des avis qu’il pourrait éventuellement échanger avec Célestia plus tard, mais l’heure n’était pas à l’argumentation. Chacun avait le droit de se faire son avis et de l’exprimer sans être contesté, c’était le sens même d’un vote. Qu’importe où ils iraient, il y aurait des risques, de toute manière…

Une voix pour Lyon. Une voix pour Toulouse. Ainsi était embarquée le vote, ce qui attira forcément les regards en direction de la dernière venue à qui reviendrait donc la décision. Ou pas ? En effet, sa stratégie fut alors de ne pas trancher. Sa proposition fut de se rendre en Provence, et d’ici là de discuter entre eux pour notamment l’informer tandis qu’elle n’avait pas été tenue au courant de leurs buts par Célestia, ce qu’il ignorait. Le Zéphyr opine doucement. Rien n’obligeait à ce qu’une décision soit prise ce soir, en effet.

- Bien. Je suis sans doute trop pressé… Faisons donc ainsi. Chevauchons jusqu’à la prochaine ville, afin de mettre du chemin entre nous et cette ville maudite. Là, nous nous reposerons pour le reste de la nuit, certains d’entre nous en ont besoin. Ensuite… d’ici la Provence, nous aurons tous largement le temps de discuter, et je peux sans mal prendre le temps de vous informer sur la situation Esmelia. Pour l’heure, hâtons-nous...

Une pensée pour Veena, dont il n’avait pas manqué d’observer les difficultés dans une telle situation. Il serait fou de lui demander de trop forcer dès cette nuit. Du reste, du temps pour discuter tout en voyageant, ils n’en manqueraient pas...

Citation :

Fin du RP convenue avec le groupe.
Transition du groupe de Rome vers Francia.