[Fin février 553] Sainte'Patrouille, vite ils repartent en vadrouille (ft. Kilian)

Si la jeune femme avait évoqué avec le Gémeaux l'envie de voyager un peu il y a presque un mois de cela, elle ne s'était pas doutée que ses souhaits seraient exaucés quelques semaines plus tard. Même si elle n'allait pas très loin, le Lotus était ravie qu'on lui donne quelque chose à faire. Rien que le voyage en lui-même lui faisait plaisir. La traversée de la Mer Égée en bateau lui changea son quotidien radicalement. C'est donc enjouée qu'elle débarque sur le port tout en veillant à ne pas tomber à l'eau. C'est une mésaventure qui lui était déjà arrivée et qu'elle ne veut pas reproduire à nouveau. Pas que la baignade lui déplaise, mais c'est l'hiver et l'eau doit être glaciale, en outre, elle ne sait toujours pas nager, personne n'ayant pris la peine de le lui apprendre. La petite Émeraude resserre sa cape marron en laine rehaussée d'un col difforme en peau de loup. Heureusement qu'il ne pleut pas, c'est toujours ça de gagné.

Après quelques pas faits en direction du centre de la cité, elle tourne la tête à gauche et à droite. Bien qu'elle ne soit pas là pour visiter, elle prend le temps de repérer les bâtiments pour pouvoir retrouver son chemin plus tard. Avant de partir, elle avait envoyé un message au Verseau pour l'informer de sa venue et de la mission qui leur était confiée. Ce dernier lui avait donné rendez-vous dans une taverne. La ville est grande, les tavernes nombreuses, elle doit demander son chemin pour trouver le bon établissement et fini par arriver au bon endroit. Prévoyante, elle avait anticipé ce temps de recherche et était en avance. De quoi prendre le temps de réserver une chambre au cas où, ne sachant pas combien de temps elle restera là ni si des logements étaient prévu pour les Chevaliers, puis elle s'installe à une table.

A proximité de la cheminée, elle profite de la douce chaleur pour retirer sa cape et dévoiler sa tenue, un mélange de robe et d'armure spécifique à la Cloth du Lotus qu'elle ne quitte jamais sauf pour dormir et se laver. Elle commande un lait chaud et colle ses mains contre sa tasse en attendant l'arrivée de son collègue Saint. Elle espère qu'il n'est pas trop mécontent de se voir coller dans les pattes la Maladroite du Sanctuaire.

Le sentiment de solitude n'a pas le temps de trop s'installer, déjà elle est vite rejointe par un homme en tenue normale. La petite Émeraude le regarde sans curiosité. Elle a déjà pu le voir de loin au Sanctuaire à de rares, très rares, occasions. C'est la première fois qu'il est aussi près et qu'elle peut discerner son visage, mais elle reconnaît sa tignasse et son allure générale.

- Bonjour !

Elle le salue et opine à sa question. Évidemment, étant la seule inconnue masquée, il n'était pas difficile de deviner que c'était elle avec qui il avait rendez-vous. La jeune fille est enjouée et trépigne à l'idée de se voir confier une tâche même si c'est juste patrouiller dans les rues.

- C'est bien moi ! Enchantée !

Elle lui laisse le temps de s'installer et réfléchit à tout ce qu'elle a besoin de lui demander avant de commencer les choses sérieuses. C'est qu'on ne lui a pas dit grand-chose finalement à part qu'elle devait venir ici sous les ordres du Verseau pour surveiller la ville. Mais peut-être qu'il y a une raison particulière à sa venue, quelque chose qui se produit ou risque de se produire et qu'ils doivent constater ou peut-être même empêcher. Plutôt que de se faire une liste d'hypothèse, elle gagnera du temps à demander directement. Mais dans un premier temps, elle a quelques questions pratiques à régler.

- C'est la première fois que je viens ici, et je me demandais s'il y a un endroit fait pour nous dans le coin. Je ne sais pas combien de temps je vais devoir rester ici, mais il me faudra bien un endroit où dormir et manger.

Des détails, mais qui ont leur importance dans le quotidien. Lorsque ces derniers seront réglés, elle enchaînera avec la suite.

- Alors, on m'a dit que je devais patrouiller. Est ce que tu sais s'il se passe des choses particulières en ce moment ? Ou c'est juste une mission de routine ? On a un circuit à suivre ou une zone à couvrir en particulier ? Comme je l'ai dit je ne connais pas la ville alors il faudra peut être me falloir une petite visite pour repérer les lieux, savoir m'orienter à l'avenir, ce genre de chose.

Tout en parlant, elle fait des gestes avec ses mains. Elle a toujours été une personne animée, vivante. Probablement qu'elle tente de compenser avec le fait que son masque cache les expressions de son visage et ses émotions. Quoi qu'il en soit, dans un énergique mouvement de bras, elle renverse sa tasse et le lait chaud se répand sur la table. La jeune fille se lève en un sursaut et s'écarte pour que le lait chaud ne vienne pas mouiller sa tenue.

- Oups ! Pardon ! Désolée… Je suis maladroite...

S'il ne savait pas, maintenant il sait. Pas de doute à avoir. Elle est confuse, ne sait plus où se mettre. Elle jette un coup d'oeil vers Kilian pour voir s'il s'en est pris sur lui ou s'il a été épargné. Après quelques signes au tavernier, elle récupère un torchon et aide à éponger le liquide chaud.

L’atmosphère est froide, presque glaciale. Elle l'avait senti à son arrivée sans y avoir vraiment prêté attention, mettant cet effet sur le compte de la porte qui s'était ouverte et du courant d'air que cela avait pu engendrer. Cependant, à présent qu'elle vit le Verseau geler le lait pour en stopper la progression, elle se rend compte que ce n'est pas dû qu'à l'hiver. Il reste calme, stoïque face à la petite tornade qu'elle est. Peut-être le prend-elle simplement au dépourvu s'il n'a pas l'habitude de personne dans son genre comme il le dit. Si elle était déjà gênée, maintenant c'est pire, un peu comme si elle s'était pris une douche froide sur la tête. Ce n'est pas tout à fait une impression d'ailleurs comme l'air est si inconfortablement froid.

De nouveau installée sur sa chaise, elle ne bouge plus ou presque, limite ses mouvements à la simple respiration et aux hochements de tête. Elle s'écrase contre son dossier, ne serait pas contre le fait de fusionner avec ce dernier afin de se cacher dans le bois et faire partie du décor si cela pouvait l'amender. Mais ce n'est pas possible et même si ça l'était, il la fixe du regard donc c'est loupé. La caserne bien. Un endroit où elle pourra s'étaler sur son lit et maudire à loisir cette maladresse qui la caractérise. Le lendemain, elle doit aller voir un certain Théophilius, ok, c'est noté. Mal à l'aise, elle apprend qu'elle sera seule à surveiller les rues de Constantinople d'ici peu. Le Saint Gold ne restera pas. Voyons les choses de façon positive, il ne lui donnera plus si froid quand il ne sera plus là et elle ne se sentira plus oppressée par la peur de provoquer des catastrophes à cause de sa gaucherie. Elle espère néanmoins qu'elle ne sera pas trop vite laissée en autonomie et sinon et bien elle saura bien se débrouiller. C'est bien un point sur lequel elle est forte de savoir s'adapter à toute situation. D'ailleurs pas plus tard que maintenant, elle décide de se contenir, tel un caméléon et refrène ses ardeurs. Pas si difficile quand ces dernières ont été douchées.

- Deux ans et demi. La caserne alors. J'imagine...

Son regard se pose sur sa tasse vide.

- Que rien ne nous retiens ici. Nous pouvons ainsi y aller.

Joignant le geste à la parole, elle se relève et enfile sa cape avec un certain soulagement. La fourrure la réchauffe mieux que ce que l'âtre avait pu le faire. Enveloppée dans son cocon, elle se nourrit de sa propre chaleur corporelle.

- Et dans ce cas, quand pars-tu ?

S'il n'avait pas su, ou voulu, répondre à ses autres questions, au moins peut-être pourra-t-il répondre à celle-ci, puisque beaucoup parler ne semble pas être son fort. La petite Émeraude ne lui en tient pas rigueur, elle essaie juste de lui être agréable et pas trop dérangeante.

Affaires récupérées, elle passe la porte non sans adresser un signe de tête au Verseau pour le remercier de sa courtoisie. Placée à ses côtés, elle se laisse guider dans les rues tranquilles. Le chemin n'est pas long, mais elle en profite pour regarder tout autour d'elle afin de continuer à repérer les lieux comme elle l'avait fait en venant dans cet établissement. De ses observations elle ne retiendrait pas beaucoup, mais avec un peu de chance quelques détails la marqueront assez pour qu'elle puisse se repérer quand même un tant soit peu. Tout en posant ses billes menthe à l'eau ici et là, elle n'oublie pas d'écouter la réponse donnée par son accompagnateur. Jusqu'à la fin du mois a-t-il dit. Bien, ça laisserait assez de temps pour qu'elle s'habitue à la vie ici. Elle opine sans répondre, estimant qu'il n'y avait rien à commenter.

La caserne est en vue, un porche traversé, les gardes salués et un soupir de soulagement poussé. Un instant elle se fige, admirant les bâtiments et repérant celui qu'il désigne comme contenant ses quartiers. « D'accord. » dit-elle avant de poser les yeux sur lui et de lui faire face. Elle l'observe avec intérêt. Ce doit être un atout de ne pas craindre le froid alors qu'elle aimerait bien retourner devant un bon feu de cheminée ou toute autre source de chaleur. Si elle n'aime pas trop le froid, elle s'émerveille toujours devant la neige et les flocons qui tombent avec légèreté. Le lotus ne peut s'empêcher de tourner la tête de temps à autre pour en suivre la chute. Difficile de rester concentrée longtemps, ainsi est-elle.

- Un échauffement ? Rien de trop sérieux hein ? C'est que… Si l'on doit aller visiter après j'aimerai être en état de tenir debout… J'ai jamais été très douée pour les entraînements...

Et pour cause, avec sa maladresse habituelle, c'est difficile pour elle de ne pas faire mal ou se faire mal, mais avec le Verseau cela se passerait peut-être différemment. Au moins il est prévenu.

- Bon je reviens !

Rapidement elle se dirige vers la partie du bâtiment où elle peut se trouver une chambre. À l'intérieur elle se fait indiquer le chemin par un garde, récupère un jeu de clé et pose son sac sur le lit. Elle ne perd pas de temps à l'ouvrir ni à ranger ses affaires. Elle verra au soir pour ça, là elle se dépêche de retourner dans la cour pour ne pas trop faire attendre l'homme de Glace. Doucement mais sûrement, elle pose un pied devant l'autre, veillant à ne pas glisser.

- Me revoilà ! Alors cet échauffement ?

Même si elle est relativement calme, son ton est guilleret.

Comme si l'air n'était pas déjà assez froid comme ça, elle remarque en s'approchant que c'est pire que quelques instants plus tôt. En bonne observatrice, elle note de plus que les émanations de cosmos du Verseau sont plus perceptibles. Effectivement, comme elle peut le sentir il a déjà commencé son entraînement. Elle pince les lèvres. Ce qui la gène là, tout de suite, c'est le givre qui rend les dalles glissantes comme une patinoire. Comment une fille comme elle peut bien s'approcher, et même « porter un coup » sans se casser la margoulette ?

La vague de froid la fait frissonner, pourtant elle laisse tomber sa cape épaisse au sol. Si elle la gardait, elle risquerait de se prendre les pieds dedans et ce serait un handicap. Avancer plus ne lui ferait que cumuler les risques alors elle ne voit qu'une alternative possible si elle veut essayer de lui porter une attaque à main nue.

- Très bien. C'est partit !

Le combat au corps à corps n'est vraiment pas son point fort, mais la délicate petite fleur peut également être aussi solide d'un chêne robuste alors elle ne boude pas. C'est même avec plaisir qu'elle donnera tout ce qu'elle peut pour faire de son mieux. Depuis le temps qu'elle cumule les balourdises, elle sait comment en éviter quelques unes. Ici en l’occurrence, elle doit transformer une hypothétique course et une dizaine de pas en quelque chose d'unique. Genoux fléchis, elle pousse sur ses pieds et bondit avec grâce dans les airs. En dosant correctement sa puissance, elle vise juste sur la distance à parcourir et atterrit, poing tendu, sur son adversaire du jour. Elle s'attend à être mal reçue d'une façon ou d'une autre et se prépare donc aussitôt à retomber sur ses pieds quoiqu'il se passe.

La cible n'est pas atteinte et elle s'en doutait. Il n'était pas difficile d'imaginer qu'il lui suffirait de s'écarter, que lui n'aurait pas de soucis pour l'esquiver. Pourtant, même en sachant cela, elle avait tenté, ne voyant pas ce qu'elle pouvait faire d'autre. Par après, elle aurait pu enchaîner et tenter de le frapper à présent qu'il était à sa portée, mais il ne lui en laisse pas l'occasion. Logique. Dès le départ elle se sent défaitiste, clairement pas à son avantage. En outre, « la bagarre » à main nue, ce n'est pas son domaine à la jeune guérisseuse.

Néanmoins, elle sait qu'elle doit apprendre à se défendre dans toute situation et à attaquer même sans attaque cosmique. Alors elle est contente de ce petit échauffement. Le Verseau joue du déséquilibre et envoie une grosse vague d'air froid. Elle se retient de tomber en posant son pied droit vers l'arrière et en s'appuyant dessus. Cependant la chute n'est pas loin, ce n'est que partie remise. Au moins, il l'aura félicité sur son choix d'attaque et c'est toujours cela de pris.

La nymphette ploie sous le poids de l'homme alors qu'il lui prend l'envie de lui marcher sur la tête. Elle se retrouve accroupie, pas encore les fesses par terre mais pas loin. Bien vite elle se redresse. Son coeur s'emballe, la tension monte et elle parvient à focaliser sa concentration sur lui, enfin, surtout sur ses mouvements. Elle essaie de suivre tant bien que mal de ses jades. Du sol couvert d'eau à l'état gelé, sortent des nénuphars à la taille de ses pieds, et elle saute de l'un à l'autre pour esquiver les attaques. Elle ne réfléchit pas particulièrement, ils sont l'expression de son subconscient et poussent généralement quand elle en a le plus besoin comme cette fois en bord de mer où elle avait failli se noyer.

Bras placés en croix devant elle, elle encaisse ce qu'elle ne peut éviter. Si elle ne frappe pas fort ni très précisément, au moins elle est endurante. Le fauchage de jambe final lui est fatal et c'est lui qui fait qu'elle se retrouve finalement à terre, tombant au sol. La fine couche de neige qui s'est installée amortit sa chute. Trop froid. Il est temps. Temps que la lumière qu'elle a emmagasinée à travers les pores de sa peau depuis le début du test soit restituée, transformée en rayons chaleureux. C'est un mini soleil qu'elle devient et dans un petit périmètre autour d'elle, la neige fond. Ce ne sont plus des flocons qui tombent dans ses cheveux émeraude, mais des gouttes d'eau tiède. La belle n'a plus froid à présent. C'est amusant de voir que sous certains aspects, ils sont opposés l'un et l'autre, dans leurs pouvoirs particulièrement, et même dans leur caractère.

La jeune fille opine doucement, pas vraiment surprise de son verdict. Elle savait bien que les attaques cosmiques étaient interdites, mais là ce n'était pas vraiment une attaque, uniquement un moyen de répondre à cette aura qu'il dégageait lui-même. Ne pouvait-elle pas réagir à armes égales en perturbant à son tour la température de l'air environnant ? Apparemment pas. Cela n'a pas d'importance. L'entraînement est terminé et tout ce qu'elle en retient, c'est qu'elle doit s'entraîner plus sur ce genre de chose.

- Désolée. Je suis plus à l'aise pour les attaques cosmiques à distance, du coup, effectivement tout ce qui est attaques physiques au corps à corps c'est difficile pour moi. Je m'appuie énormément sur mes capacités pour me défendre en général.

Elle cesse d'irradier, et l'air redevient normal, le ciel s'éclaircit, comme il cesse également d'influencer le temps trop fortement. Entraînement terminé, elle va récupérer sa cape et la passe sur ses épaules, s'emmitoufle dedans, fin prête pour la visite. Docilement, elle suit le guide et écoute avec attention la description qu'il fait de chaque lieu. Elle observe les bâtiments imposants, les ruelles choisies et les détails marquants. Une fois encore elle essaie de faire attention, mais elle sait qu'elle est une tête de linotte et qu'il lui faudra un certain temps avant qu'elle ne puisse retenir tout ce qu'il y a à savoir sur cette ville et connaître les artères principales qu'elle devra parcourir chaque jour. Le marché l'intéresse bien qu'elle n'ait pas vraiment d'argent à dépenser, et l'église l'intrigue, surtout si elle est baignée de cosmos. La curiosité prenant le pas, elle demande :

- Sais-tu à qui appartient ce cosmos ? J'irai oui, rien que par curiosité déjà et puis pour y trouver un peu de tranquillité.

Elle perçoit bien que cette aura est chaleureuse, elle imagine que ça doit inciter les fidèles à venir parce qu'ils doivent bien s'y sentir et cela aura le même effet sur elle. La visite prend un certain temps, mais quand il lui semble qu'il n'y a plus rien à voir elle demande quand même.

- Y a-t-il d'autres choses que je dois savoir ? Sinon j'irai tout de suite voir Théophilius comme ça ce sera fait. Il est à la caserne c'est ça ? Oh et à quelle heure dois-je te rejoindre pour la prochaine patrouille ?

Pas mal de questions encore. Elle a pris le soin de parler doucement et de lui laisser le temps de répondre entre chaque, mais elle espère qu'il ne sera pas trop dérouté. Il doit bien avoir l'habitude maintenant, quoique c'est encore un peu tôt, mais une fois tout cela réglé, elle pourra être un peu plus autonome, du moins elle l'espère. C'est qu'elle ne veut pas vraiment le déranger avec toutes ses interrogations, mais elle n'a pas vraiment le choix, il y a tant de choses qu'elle ne sait pas et si elle reste dans le flou, elle risque de faire des bêtises et elle aimerait autant éviter.

L'énergie d'Athéna, rien que cela, alors oui en effet elle a encore plus envie d'aller expérimenter cela. Pas ce jour néanmoins, cela attendra une autre occasion. Pour l'heure elle doit encore faire quelques petites choses comme défaire son paquetage entre autres et repérer dans la caserne les salles dédiées aux femmes où elle pourrait retirer son masque sans soucis. Comme elle l'avait supposé, la visite est bien terminée et il l'invite à rentrer se reposer de son voyage. Elle opine doucement, ne se fera pas prier pour filer.

- Très bien. À demain dans ce cas. Bonne soirée.

Elle le salue respectueusement et se met en quête de rentrer. Par chance elle reconnaît déjà un peu les lieux comme elle a mémorisé les bâtiments les plus hauts. Le chemin pris cependant n'est pas le plus court, mais tant qu'il la mène où elle le souhaite c'est le principal. Elle aura le temps d'apprendre le cadastre dans les prochains jours pour mieux choisir ses itinéraires. Le Verseau lui ayant conseillé d'attendre le lendemain matin avant d'aller voir le Capitaine, elle lui épargne sa visite, mais elle a l'idée de demander à un garde de le prévenir qu'elle viendra au matin afin qu'il puisse se libérer ou lui transmettre un message en retour sur le moment où il sera disponible. Même si on a dû le prévenir de sa venue, elle trouve plus poli de prévenir aussi de son côté et d'essayer d'anticiper un minimum.

La fin de journée se passe comme elle l'a prévu. Installation dans sa chambre, repérage des pièces de vie, repas puis sommeil nécessaire. La belle se réveille tôt, s'épanouissant à l'Aurore comme toute fleur délicate. Lorsqu'elle est prête, elle retourne auprès des gardes du Capitaine et attend alors, interrogative, de savoir s'il peut la recevoir ou s'il a laissé un mot à son attention pour un rendez-vous ultérieur.

- Bonjour ! C'est de nouveau moi. Est ce que le Capitaine est là ?

La missive qu’il avait reçue venant du Sanctuaire il y a quelque temps lui avait fait plaisir. Si les gardes et les stationnements dans la cité était courant, du sang neuf ne faisait jamais de mal et il aurait toujours besoin de bras et de cosmos en plus. Alors quand on lui avait fait savoir qu’une nouvelle guerrière viendrait renforcer la présence du Sanctuaire dans la cité impériale, il avait été satisfait. Ainsi, il avait pu tranquillement organiser ce qu’il avait eu besoin de voir pour Kilian et elle aurait, elle aussi, son rôle à jouer. Après tout, c’était aussi ce genre de chose qu’il devait présenter au nouveau chevalier en poste. L’un de ses subalternes arriva sur le terrain d’entraînement où il se trouvait, occuper à superviser quelques exercices et il se mit de suite en route.

Il fit vite et arriva dans la salle de réception où ses hommes conduiraient la jeune femme. Appeler ça une salle de réception, c’était peut-être un peu pompeux, mais c’était là qu’il recevait lors de certains de ses entretiens. La salle était plutôt sobre en réalité, pas beaucoup de meubles : une table, quelques sièges, des tentures sur les murs. Après tout, il s’agissait d’une caserne. Il entra dans la pièce et salua la jeune femme avec le respect et la rigueur militaire. Il était peut être le capitaine des forces du Sanctuaire stationné à Constantinople mais elle n’en était pas moins chevalier d’argent.


« - Mademoiselle. Je me présente, capitaine Théophilius, enchanté. Vous êtes Nymphea du Lotus c’est bien ça ? »

Dit-il en lui tendant sa main. Puis, après les salutations, il l’invita à s’installer en face lui et à s’asseoir.


« - Mes hommes m’ont dit que le seigneur Killian avait pris sur lui de vous former à la découverte de la cité. Je l’en remercie. Si vous avez des questions n’hésitez pas. Sachez que d’ici quelques jours, nous irons, avec lui, dans le quartier du palais impérial, pour rencontrer quelques personnes importantes. Des personnes qu’il vous serez bon de connaître, en tant que chevalier d’argent. De même, si vous avez des questions sur ces ordres, je vous écoute. »

Il avait parlé avec la rigueur d’un soldat qui donne ses consignes et attend qu’il soit suivit. Mais bien qu’il avait la voix tranchante, il n’avait pas l’hostilité ou la distance que pourrait lui imposer sa fonction. Il voulait mettre à l’aise la jeune femme, sans lui faire oublier son propre rôle et sa mission.

Conduite dans une salle, elle attend quelques instants que le capitaine arrive. Au moins, elle est rassurée, car cela signifie qu'elle est bien attendue et que l'entrevue ne sera pas repoussée. Ayant vu la veille que le Verseau se baladait en tenue civile, elle s'est demandé si elle devait l'imiter en laissant sa Cloth dans sa chambre. Peut-être était-ce un moyen pour passer plus inaperçu, se fondre dans la masse. Elle ne sait pas trop, mais la laisser dans sa boite ne lui plaît pas trop. Pour le moment elle la porte toujours, peut-être la retirera-t-elle au moment de rejoindre son collègue.

Le temps des tergiversations prend fin comme l'homme arrive. Il a tout du militaire et ça ne l'étonne pas, elle s'y attendait. Cependant elle ne sait pas trop comment se comporter. Sa nature enjouée est bridée, elle se retient de bouger le plus possible par crainte de faire tomber quelque chose dans la pièce, même une simple chaise. Niveau crédibilité, pour sûr qu'elle perdrait beaucoup… Elle opine un peu vivement.

- Oui c'est moi. Bonjour ! Enchantée… de même...

Elle serre la main tendue puis va s'installer en veillant à ne pas s’empêtrer dans ses propres pieds. Elle écoute poliment et quelque part, il répond en partie à ses interrogations. Rencontrer des personnes importantes, voilà pourquoi elle était là. Elle essaie de démêler les nuances et de distiller les informations avant de poser ses questions. Si elle n'est pas bête, parfois elle est un peu simplette et plutôt que de se faire des idées, elle doit éclaircir les choses.

- Cette rencontre c'est… La routine ? Tous les nouveaux venus y passent ou j'arrive juste au bon moment ? Et… De qui s'agit-il ?

Peut-être gardera-t-il le silence sur cette information, lui laissant la surprise. Même si elle a envie de savoir, elle saura attendre le cas échéant. Gardant le silence le temps qu'il lui réponde, elle entortille ses doigts autour de ses longues mèches de cheveux, incapable de rester complètement immobile.

- J'ai d'autres questions aussi. Est ce que l'on vous a dit combien de temps je vais rester dans la ville ?

Même s'il ne peut voir son visage masqué, son ton est des plus posés, laissant comprendre que la question est toute innocente. Pour le moment, son affectation lui convient très bien, elle en est ravie et n'est pas aussi pressée que le Verseau de rentrer. Toute fois si cela devait durer longtemps, ses nouveaux amis et le Sanctuaire lui manqueraient forcément, alors elle souhaite simplement savoir à quoi s'attendre. D'ailleurs, cela lui fait penser que d'autres points la titillent également, toujours dans ce même but de savoir ce qu'il en est pour mieux savoir quoi faire.

- Je me demande aussi s'il se passe des choses particulières en ce moment, si je dois faire particulièrement attention à certains endroits, certaines personnes...

Le Lotus suivra les ordres et consignes docilement dans tous les cas, mais si elle peut le faire intelligemment et pas juste bêtement comme un mouton ce serait mieux.

Il y a dans la jeune femme devant lui quelque chose d’inhabituel. Et le vétéran ne saurait dire si, à ses yeux, s’était une bonne ou mauvaise chose. Elle ne semblait pas avoir l’assurance ou l’ego qui gonflent parfois ceux qui portent l’armure. Mais elle ne semblait pas non plus en avoir la conviction et la volonté inébranlable. Mais, après tout, elle avait été choisi et pas lui ? Pourquoi elle ? Une question qu’il se posait mais à laquelle il aurait sûrement sa réponse, les armures peuvent-elles seulement se tromper ? Pas dans sa conception du monde. Il était cependant homme à juger par la pratique que par les impressions. Il avait vu d’excellent soldat naître d’un bois plus pourri que celui dans lequel elle semblait fait. Il resta de marbre et prit quelques instants de réflexion pour répondre à sa première question. La réponse n’allait pas forcément de soit.

« - Oui et non. Disons que la balade au palais et la présentation des têtes connus se fait généralement de… plus loin. Nous restons dans l’ombre pour la majorité des gens. Ceux que nous allons rencontrer sont au courant, évidemment. Après tout, vous faites parti de l’ordre d’argent et la protection de la cité est à votre charge. »

Il garda le silence ensuite quelques instants, fouillant dans ses poches à la recherche de quelque chose. Il reprit ensuite la parole après avoir lu le bout de papier et l’avoir remis à sa place.

« - Pour le qui, il s’agit d’alchimistes impériaux. Demande du seigneur Kilian et c’est un sujet qui intéresse le Pope ces derniers temps. Quant à la durée de votre stationnement, et bien l’ordre fait état d’une quinzaine de jours. »

Il enchaîna ensuite, après avoir pris le temps de sourire maladroitement à la jeune femme. Il se voulait rassurant, mais avec une gueule cassée comme la sienne, il était parfois difficile d’être aussi sympathique qu’on le voudrait.

« - Pour ce à quoi il faut faire attention et bien… le marché, c’est souvent là qu’on retrouve les problèmes. Mais sur le plan des éveillés la ville est calme. La déesse, louée soit son nom, et le cercle d’argent veillent. »

Il se tût alors, invitant d’un nouveau signe de la tête la jeune femme à poser d’autres questions si elle en avait.

Kilian, tu pries et pendant un temps, le silence est ta seule réponse. Et le silence le demeurera. Le silence est souvent la réponse de la déesse. Ses mots sont précieux et rares. Mais, le verbe n’est pas sa seule arme. Tu sens une sensation étrange, un glissement dans le cosmos d'Athéna, une vague d’apaisement qui semble t’être adressé. Comme une main amicale, maternelle presque, posée sur ton épaule. Elle ne t’oublie pas et elle entend les prières.

Le Conteur

Les informations sont données et le tout se précise. Elle note mentalement chacune de ses paroles, opinant régulièrement d'un signe de tête. Tout lui convient et à présent que ses interrogations ont été satisfaites, elle a hâte de commencer à surveiller le marché de près. Puis hâte aussi d'arriver à cette rencontre que le Verseau semble attendre également. Sa curiosité la guide dans ses actions au quotidien et ça a du bon généralement. Curieuse mais pas trop, disons qu'elle se limite afin de ne pas tomber dans l'indiscrétion et ne cherche pas plus loin que « ça » dans tout ce qui a trait à la vie privée.

- Parfait ! Je vous remercie. J'ouvrirai grand mes yeux et mes oreilles vous pouvez compter sur moi.

Rien d'autre ne lui vient à l'esprit. Tout semble clair et sa présence dans cette pièce n'est plus nécessaire, alors elle se lève.

- Je ne vous retiens pas plus. Je vous retrouve dans quelques jours donc. Et je vous souhaite la bonne journée !

Elle s'incline respectueusement pour le saluer et file.

Le Lotus passe la journée à visiter encore, les rues deviennent familières, certaines bâtisses tape à l'oeil deviennent des points de repère et le marché sa zone préférée. Si elle évite les étals de poisson et l'odeur iodée qui s'en émane, elle flâne près des épiciers et des antiquaires. Bien que cela ne se voie pas, sous sa cape longue elle porte toujours son armure. Elle s'était bien posé la question au matin de si elle devait s'habiller en civil ou pas puis elle avait décidé que non, sa cape étant tout aussi bien. De toute façon, avec ce masque qu'elle devait porter dans tous les cas, c'était difficile de ne pas se faire remarquer. Heureusement, le sien est d'un blanc immaculé, ou presque, seules les lèvres ont été peintes d'un léger rose poudré. Rien de très « étrange », pas de marque comme certaines peuvent avoir sur les leurs.

Le rendez-vous a été donné au soir et c'est donc lorsque le soleil commence à se coucher que la jeune femme se rend dans les bois. Elle y trouve une souche accueillante et s'y assoit en attendant Kilian. Elle ne sait pas s'il est au courant de l'entrevue, dans tous les cas, ce sera un sujet qu'elle abordera dès qu'il sera là.

Alors qu'elle est installée sur sa souche, sa tête est relevée et elle observe la quiétude de l'endroit. Le vent souffle dans les feuillages et l'apaise. Il fait froid, mais elle n'en ressent pas la morsure, protégée par son armure et sa cape. Son rendez-vous arrive. Doucement elle baisse la tête pour poser son regard sur lui.

- Bonjour. Je l'ai vu en effet. Il m'a mise au courant de l'entrevue qui va avoir lieu avec des alchimistes et à laquelle nous devrons assister. Réunion à ta demande à ce qu'il a dit. Tu as des affinités avec l'alchimie ?

Elle avait dit cela de façon neutre, pas certaine qu'il ait été mis au courant. Dans tous les cas, soit elle lui annonçait la chose de façon subtile, soit elle ne fait que lui confirmer ce qu'il sait déjà. La question posée ensuite est de simple curiosité. S'ils doivent passer quelques jours ensemble, autant essayer d'apprendre à se connaître. Elle n'ira pas jusqu'à espérer se faire un nouvel ami car il lui semble bien trop « distant » et « réservé », mais qui ne tente rien n'a rien.

- Je suis allée me promener oui, surtout du côté du marché où il faut être plus vigilent d'après le Capitaine.

Encore une information donnée subtilement. La jeune fille se lève et semble réfléchir à sa proposition. Elle savait qu'un entraînement était prévu, mais elle n'imaginait pas que ce dernier puisse consister en un combat. À vrai dire elle avait d'autres attentes.

- Hum… Je ne suis pas convaincue qu'un combat soit une bonne façon pour moi de m'améliorer. J'espérai avoir quelques conseils particuliers par rapport à ce que tu as pu observer hier. Mais après tout c'est toi l'expert… Cela fait longtemps que personne ne s'est plus occupé de mon apprentissage. Avant, feu mon frère me guidait, mais c'est une autre époque. Il me faisait faire des exercices, mais nous évitions la confrontation à cause de mes problèmes de maladresse. J'imagine que tu dois avoir un autre point de vue. Peu importe, j'ai envie de progresser, quelle que soit la manière.

Évoquer son frère décédé lui oppresse le coeur. Elle aurait pu l'éviter, mais il lui a paru important que le Verseau sache où elle en est s'il souhaite vraiment l'aider. Elle n'a probablement jamais eu d'entraînement digne de ce nom. Le Phénix l'aidera sans doute lorsqu'il rentrera de mission, mais elle ne sait pas quand. Cela fait si longtemps qu'il est parti et à présent c'est elle qui n'est plus au Sanctuaire. Elle espère pouvoir le croiser tout de même dans pas trop longtemps.

Il ont plus en commun que ce qu'elle pensait, se dit-elle en apprenant que lui aussi avait perdu son frère. Oh ce n'est pas le meilleur, mais dans certains cas, cela peut rapprocher les gens. Au moins éprouve-t-elle une certaine compassion à présent. Il comprenait ce qu'elle pouvait ressentir et vice-versa. Cependant, ils sont encore trop étrangers l'un envers l'autre pour qu'elle se sente plus à l'aise en sa présence. Il faut dire qu'il l'intimide et ça ne joue pas en sa faveur. Et si on ajoute à tout cela son côté distant, c'est le combo gagnant peut-on dire. Mais pas de quoi décourager l'adolescente. Parfois il faut laisser le temps aux choses et à la confiance pour s'installer.

Par après, il lui prodigue quelques conseils. Méditer pour améliorer sa concentration ? Oui elle pourra faire ça. Quand à l'exercice pur, elle s'en doutait, encore faut-il qu'elle s'y mette sérieusement. Tandis qu'elle réfléchit à ces futures bonnes résolutions, elle l'observe distraitement graver des symboles sur les souches et l'écoute parler d'alchimie. Ainsi elle avait vu juste en supposant qu'il pratiquait cet art subtile des mélanges chimiques et des transmutations. Soudain un pentagramme s'illumine et elle pose sur lui un regard admiratif. C'est fort joli.

-Hum... Je n'en ai pas croisé d'autre non, pas à ma connaissance du moins. Je suis curieuse de savoir comment ça fonctionne ou d'assister à une création, mais je ne souhaite pas devenir Alchimiste moi-même. Je suis guérisseuse, je fabrique mon propre onguent aux vertus apaisante et cicatrisantes. Du coup j'imagine que c'est un peu proche de ce que tu dois faire dans une très faible mesure. Et peut-être que c'est pour cela que ça éveille mon intérêt.

Évidemment, jamais elle ne se prétendra alchimiste, elle se voit plutôt comme un genre d'infirmière. La création du Verseau devient une bulle isolante. Ainsi donc elle avait là sa première expérience d'alchimie. Elle sourit, même si son masque cache entièrement son visage.

- Je vois, c'est magnifique... Bien, c'est moi qui commence n'est ce pas ?

Sous ses pieds, l'eau remonte des profondeur du sol pour former une petite marre. La surface ne laisse pas présager de la profondeur car elle est constituée d'un effet miroir. L'aura cosmique de Nymphéa s'intensifie et sous ses pieds pousse une fleur de lotus géante. Installée sur le pistil énorme en forme de pommeau d’arrosoir, elle s'élève sur son promontoire.

- Ce n'est pas de l'alchimie, mais moi aussi je peux manipuler mon environnement.

Il n'y a pas de vantardise dans le ton qu'elle emploie. Il s'agit là juste d'un fait que Kilian peut constater de lui-même. Et puisque c'est à elle de commencer, elle concentre entre ses mains l'énergie de la nature et forme une sphère verte qu'elle envoie sur son adversaire pour l'attaquer. A son contact, s'il ne l'évite pas, elle explose et les spores toxiques qu'elle contient le contaminent.