[Mi Mars 553] Au hasard des rencontres

Et ce petit jeu auquel les deux hommes avaient commencé à jouer aurait sûrement pu durer toute la nuit sans qu’aucun d’eux ne puisse vraiment se départager. Les divinités après tout, sont connues à travers l’histoire des hommes pour leurs châtiments et leurs punitions parfois très imaginatives. De même que la capacité à conserver rancune pendant très longtemps, un comble pour ceux chez qui le temps n’était qu’une simple donnée à mesurer. Mais au moins, cette comparaison d’apparence sinistre, avait le mérite de continuer à faire en sorte que la soirée se passe sous de bons hospices, à défaut d’être sous le regard des dieux. Enfin, il défendait là sa déesse après tout, il ne faisait que son rôle de Pope, il était sa voix au final.

« - Oh oui, une réunion de famille organisée par Hadès et Persephone en plein cœur des enfers, ça risque de bien se passer. Arès qui va boire avec Dionysos. Et ainsi de suite… »

Enfin, l’idée avait quelque chose d’amusant et c’était peut-être de ça qu’avait besoin cette famille on ne peut plus dysfonctionnelle après tout. Mais il faudrait qu’un d’eux mette son ego et de côté et ce n’était pas aujourd’hui. Il avait beau voir la déesse comme ce qu’il y avait de mieux pour l’humanité, parler pour elle lui avait permis de comprendre un peu mieux qui elle était et surtout que, quoi qu’on en dise : les dieux sont à l’image des Hommes. Mais Childéric écouta avec attention l’histoire d’Endymion. Qui, à voir le large sourire qui se dessinait sur son visage, semblait beaucoup l’amuser. Oui, il pouvait voir le dragon des mers en troubadour à la mise bigarré et improbable monter sous les yeux médusés des gens dans la litière d’une sorcière aussi belle que dangereuse. L’histoire se termina par une explosion de rire du vieux lion qui voyait là Endymion fuir la queue entre les jambes, débouté par une prétendante trop farouche ou trop entreprenante, même pour lui !

Après avoir essuyé la larme qui avait perlé au coin de son œil et reprit son souffle, il répondit à la question du Marina :

« - Scáthach. C’est le nom de la Sidhe avec qui j’ai pu parler. Enfin, je prends le conseil, ne pas céder aux charmes des fées, ça bon, pas de risque. Et ne pas leur donner de cheveux ou quoi que ce soit d’autres. M’enfin, tu ne penses pas qu’un cheveux valait bien le fait de pouvoir raconter à tout le monde que tu les chanteurs de rue qui a pu le plus côtoyer la noblesse de… près ? »

Et un nouveau rire-rugissement vient secouer la poitrine du vieux lion.

Les légendes et les récits ne sont pas toujours des bonnes choses. Plutôt, ces mythes sont souvent issus d’une réalité déformée, qui restent dans les mémoires du commun pour ces histoires sont vraiment : des moments d’incompréhension. Des petits morceaux de vie qui dépassent ce que les hommes peuvent comprendre, qui marquent profondément tout ceux qui y assistent. Tout le monde fini par y être, alors qu’il connaît quelqu’un, qui connaît quelqu’un, qui connaît quelqu’un qui y a été. Alors ces événements à Camelot, à leur façon, oui, étaient de ce genre de récits. Mais pouvait vraiment dire que c’était une bonne chose ? Jadis, celui qui fut lion aurait eu un avis vite tranché sur la question. Maintenant, il était plus mesuré. Alors il se contenta de lever son verre silencieux au dragon des mers pour le vider une dernière fois.

« - Oui, tu as de la chance que je ne participe pas à ce petit jeu, ta victoire certaine n’aurait pas duré bien longtemps. Enfin, les règles des Ligures enlèvent un peu l’intérêt, je trouve. »

Le combat à travers un proxy n’était pas ce qu’il recherchait. Cette histoire de pantin ne lui plaisait pas vraiment. Non pas pour des raisons occultes ou de sécurité. Simplement car il préférait ressentir le combat dans sa chair et son âme. À travers son propre corps et ses propres sensations, avec sa propre force et ses propres crocs. L’air un peu circonspect, le vieux lion observa le manège de son compagnon de boisson et ce dernier semblait visiblement appeler ailleurs pour une raison que Childéric ne voulait pas connaître. En tout cas, sa réplique sur le vin de Rodorio et son prix arracha un dernier rire bruyant au Pope.

« - Si tu savais l’argent que je dépense pour maintenir à flots les caves du Sanctuaire… Il est loin d’être gratuit ce vin ! Enfin, si d’aventure tu mets les pieds au Sanctuaire, pour autre chose que la guerre, je serais ravi de te faire goûter au vin de Rodorio. Peut-être même que je sortirais une bouteille de la cave du Pope pour l’occasion… Peut-être... »

Et sur ses mots, il salua le général du Dragon des mers, et le laissa tirer sa révérence vers ses aventures grandiloquentes qui, visiblement, ne tiennent qu’à un cheve