[Mi-mars 553] Un dialogue attendu de longue date

- C'est pourtant très exactement ce dont il s'agit ici. Laver votre faute

Car si tu ne penses pas que ça lave votre faute, alors c'est que tu ne penses pas nécessaire de le faire ? Tseh.

Tu ne t'y connais effectivement pas dans l'art de la diplomatie, Augure.
Maladresse des mots, des intentions. De la lecture. Il y a plus de justesse dans son jugement et ses mots que dans ceux de Celestia, ça pour sûr... Mais je sens toujours cette espèce de dissonance. Ce petit quelque chose qui me dit que nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde. J'espère que tu le comprends bien, derrière ces artifices, Augure.
J'espère que tu comprends bien que je vous donne ici une dernière chance, et que ça me coûte. Que je vous tend une main, Encore, alors que ça serait tellement plus facile à bien des niveaux de juste empoigner une épée de cette même main, et vous trancher la tête avec.

- Il peut aussi être là pour faire valoir les demandes et propositions de son ordre. Votre phase de réorganisation pourrait se dérouler sous de plus doux auspices, si l'on venait à me convaincre de vous prêter main forte plus avant. Un fin sourire. Je lance mon exemple, comme ça, pour souligner l'importance de ce rôle d'ambassadeur... Puis je songe. Savoir qui, oui. Après tout, je l'ai dit plus tôt, non ? Une alliance, oui, mais je ne peux décemment pas vous proposer que les choses se déroulent sur un pied d'égalité, vu les derniers évenements. Et surtout, surtout... Vous ne pouvez décemment pas oser y prétendre. Alors... Je déciderais à la fois qui est-ce que je vous envoie, et qui est-ce que j'accueille sur mes terres. Le luxe du choix : ça sera une partie du Tribut à me céder, pour cette fameuse réparation.

Il faut bien commencer quelque part, après tout.
La suite ? La suite, je regarde l'Augure se tourner vers sa protégée... Je regarde, je ressens. Je ressens cet espèce de dialogue silencieux, sans en deviner les contours. Mes sourcils se froncent. Effectivement. Très effectivement : pas un diplomate. Pas le moins du monde.

- à l'avenir, vous aurez l'amabilité de garder vos messes basses et affaires internes pour plus tard. Je pense vous avoir déjà assez reproché vos secrets, hm ? Veillez à ne pas me donner matière à alimenter mon fiel.

Je le dis froidement, sans agressivité. Pas la froideur colérique, plutôt, la froideur d'un conseil lancé sans bienveillance ni malveillance. Un simple mot pour un homologue. Puisque tu te retrouves très visiblement projetté dans les jeux des Dieux à ton insu et bien vite, il va te falloir apprendre tout aussi vite. Apprendre l'importance du contexte, par exemple.

L'importance du choix des mots, aussi.
Ma mâchoire se contracte doucement, mon regard fixe dans un agaçement silencieux, prédateur. Dormant, mais présent. Tourner autour du pot, tu dis, hein... Vous avez bien choisis de tourner autour du pot trois ans durant, pourtant, non ? Et tu voudrais qu'on passe sur l'incident le temps d'un verre d'alcool, peut-être ?

- Qui sait. Peut-être qu'une fois le moment venu, ce n'est pas du sang que je vous demanderai. Pour dire vrai... De tous les services que votre ordre pourrait bien me donner, ce n'est pas vos prouesses martiales qui me viennent en premier à l'esprit. Mais oui. L'avenir dira comment la dette sera épongée.

Et ça vous connaît l'avenir, n'est-ce pas ?
Réinstallé dans mon divan, je porte mes lèvres à une coupe, puis avise l'homme en face de moi. Sans s'être totalement retiré, mon agaçement diminue.

- Oh, au fait. Avec tout ça, j'en oublie les choses simples. À qui ai-je donc à faire, finalement? Je n'attendais plus Cucuhulainn, mais je ne m'attendais pas à ce qu'il soit remplacé si vite... Ni à ce que son remplaçant me soit totalement inconnu.

Qui es-tu finalement, Augure ?

Le ton était plus apaisé. Sans pour autant laisser une trace quelque part, Céléstia blessé, moi menacé... On ne pouvait pas dire que ca partait sous les meilleurs auspices mais un progrès avait déjà été accompli. Sentant le regard de l'Eminence, il me retournait vers elle afin de lui signifier qu'une discussion aurait lieu après. En soit, il reconnaissait que les Oracles étaient désorganisés, sans autorité pour les guider et les soustraire à de possibles erreurs. La faute de Célestia était aussi partie prenante d'un tout, elle n'était qu'un maillon.

Il leva un sourcil, amusé. Il n'était pas loin de penser comme les Saints après tout, les demandes de Tribut étaient leurs apanages après tout. Il se contenta de relever que l'on critiquait ces derniers sur leurs méthodes mais tout le monde faisait pareil au final. Les Oracles seraient différents ? Non, ils feraient la même chose en position de force. Ses mois dans les geôles de Narsès lui avaient appris au moins une chose, les hommes sont tous les mêmes. Ils sont veules, opportunistes et leurs soit disant sens de l'honneur ne sont qu'une illusion. Arès, Athéna, les dieux en général... étaient de même pour la plupart.

Je verrai avec les nôtres qui pourraient se proposer pour cette mission. Cuchulainn doit être toujours dans les geôles du Pope et mon premier devoir sera de la sortir de là. Pour le reste, pas grand chose à dire, je n'étais pas grand chose dans ce monde. Simple artiste de la Tour des Vents, j'ai été fait prisonnier par les Saints de Narsès, expédié à Ravenna et ai simplement survécu...

Silencieux sur les vicissitudes de sa vie là bas, il ne voulait pas en rajouter. Une rage intérieure était bien présente mais il ne devait pas la laisser paraître. Le monde était une tragédie grecque, personne ne gagnait, même pas les héros. Le temps construisait, arpentait les rues et détruisait. Il n'y avait pas autre chose à savoir d'autres.

Tournant la tête vers la fenêtre, il prit une gorgée de vin rouge.

Toute chute, toute fêlure, toute destruction... amène à la Renaissance. Il faut passer par là pour mûrir et devenir autre chose, évoluer sans cesse. C'est ainsi qu'est un être humain. Apollon m'a offert cette Renaissance alors que je fuyais Narsès, Lucius et ses sbires... Je suis simplement un survivant. Pour le commun des mortels, je ne suis que Socrate, un Oracle de basse extraction. Inutile de quiconque sache la révolution de palais qui est né au sein des nôtres. Je vous demanderai donc de garder cette information pendant un temps, plus on nous pensera faible et sans leader, plus on sera fort. Je pense que nous avons tout intérêt à garder cela pour nous, non ?

Oui, il n'avait pas l'expérience de ce monde. Il ne savait que peu de choses, que des miasmes des vies de ses prédécesseurs. Il devait faire avec mais heureusement que sa rencontre avec Rudjek avait permis d'avancer sur bien des points. Une forme profonde de mélancolie arpentait son visage, tel ce soleil automnal qui observait ce qui restait de lui. Où était son innocence ? Nulle part, elle n'était plus.

Le soleil allait après tout d'est en ouest, dans une mécanique parfaite que les Dieux ne pouvaient changer sans risque de détruire la création elle même. Python était dans une logique semblable, il avait sa mécanique, sa façon de penser et il n'en déviait jamais. Il comprenait en cet instant que Célestia ne comprenne pas ses desseins et s'en amusait dans un sourire.

Et vous même ? Je ne vous connais en rien. A part des Saints, je dois dire que je ne connais rien à ce monde. C'était certainement la volonté d'Apollon de me placer là, un sang neuf avec un regard neuf, je ne sais pas. Moi même je ne comprends pas toujours les visions du dieu solaire... Il s'esclaffa.... Python venait de s'en rendre compte, il était l'Augure du dieu qui ne disait jamais les choses clairement. Il n'était pas un érudit, son interprétation de ses visions sera donc totalement subjective.