[Mi Février 553] Voyage d'agrément (Astéria -Nebu -Silas -Endy)

Le voyage en Atlantis continue, au rythme des pas et des élans lyriques du Dragon des Mers. Un léger sourire au lèvre, l'Égyptien écoute, d'une oreille tranquille – sans pour autant de montrer aucune preuve d'inattention. En ces lieux majestueux – bien qu'oppressants pour ceux qui ne sont guère habitués aux rires d’outre-tombes –, la contemplation est la pire ennemie, à l'image du chant des sirènes des temps mythologiques.
D'ailleurs, serait-il surpris s'il venait à voir l'une d'entre elle – une représentante grecque de ce peuple océanique – serrer entre ses serres l'âme d'un damné ? Sans doute que non. À travers certaines transes, le Bélier d'Or a rencontré d'obscures images. Scènes qui parfois hantent ses nuits, alors que le Serpent siffle continuellement sa berceuse délétère.

C'est le plus souvent pour cesser d'ailleurs cette berceuse, que la scène se joue dans son esprit. Jusqu'à ce que les paupières s'ouvrent. Cela signifie-t-il que le voyage est terminé ? Non. Juste que son rôle est joué. Et c'est là toute la réalité de la scène qui est en train de se jouer en cet instant précis. Un Dragon des Mers, à la fois conteur et guide. Un Dragon des Mers, qui n'hésite pas à montrer l'obscurité qui s'amasse sous ce ciel abyssal.

Un Dragon des Mers, qui lance quelques mots, au Bélier d'Or. Alors qu'un sourire vient accompagner ce nouvel élan de lyrisme, auquel il ne peut finalement qu'approuver. « Voilà de sages paroles. Même si j'aime à croire que certains sont capables de cacher la plus profonde étincelle de la nature d'un homme. Ces petites étincelles, rares, précieuses ... Secrètes. » Car le meilleur acteur est celui qui sait aller outre les idées, les opinions. Celui qui peut être n'importe quel visage. Un léger silence, alors que de ses yeux d'abysses il vient jauger sans hostilité Endymion. Ne le dit-on pas après tout ? Méfiez-vous des apparences. Mais qu'importe. L'heure était-elle au débat philosophique ?

Nebu aimerait dire, parfois, qu'il n'y a pas d'heure précises et que toute envolée est parfois bonne à prendre. Après tout, n'est-ce pas l'une des façons que l'être humain a de connaître ses congénères ?
Mais le pragmatique Nebu n'a pour le moment pas besoin d'aller aussi loin. Ce sont les ordres d'un Suzerain qui guident les deux hommes parés d'or. Ce sont donc ces ordres qui primeront.

Nul temps pour la contemplation en cet instant, seul le devoir compte. Un souvenir. Celui de son frère et mentor. Basile, oui. Basile.

Tournant son regard vers son compère, Nebu préférant garder pour lui tout commentaire. Après tout, si Silas souhaite mettre en avant une de ses quelconques valeurs, cela le concernait. Mais qu'il fasse attention au choix de ses mots. Importante chose que ce choix, oui. Esclaves, ne le sont-ils pas tous un peu ? Te sens-tu différent de ces morts, Silas ? Un rire aurait pu accompagner cette pensée.

Mais ce n'est guère que des pas qui continuent, pour suivre le cortège.

Endymion prend la tête du groupe et elle suit en silence. La brume et les spectres ne lui font ni chaud ni froid. Cette zone, ce chemin, elle les a déjà arpentés, ce n'est pas de la découverte pour elle. Derrière les autres, elle affiche un air blasé. Le Dragon des Mers chantonne et elle écoute d'une oreille. Au moins il met un peu d'ambiance. Il évoque un éventuel festin et elle se dit que si sa présence est dispensable elle irait vaquer à ses occupations, pas très enjouée à l'idée de manger en compagnie de fantômes.

Zone de l'Atlantique Nord passée, la jeune femme accélère le pas pour dépasser le groupe et en prendre la tête. Ils pénètrent dans le territoire de la Sirène Maléfique, une des zones qu'elle aime le moins car l'air y est vicié et on s'y sent mal, amis ou alliés, tous logés à la même enseigne. Quand même, Emrys pourrait éviter de laisser planer son aura constamment. Quand il y a des visites bon, pourquoi pas, mais non c'est comme ça en permanence ! Que c'est pénible… A part cela, tout ce que l'on peut voir c'est que la zone est en reconstruction et que les soldats sont plus nombreux qu'ailleurs, bien disciplinés. Le port de la flotte navale Atlante est impressionnant, cependant, la jeune femme ne ralentit pas l'allure à son approche, n'ayant qu'une hâte, arriver à l'Arctique pour s'y sentir mieux.

- Je me permets de vous presser messieurs, mais vous comprenez qu'il vaut mieux ne pas trop s'attarder dans le coin.

Le pilier de l'Arctique en vue, elle s'y dirige avec soulagement. La jeune femme n'aura pas poussé la chansonnette et pas non plus joué les guides touristiques. Si ça avait été son Pilier, ça ne lui aurait pas déplut, mais de l'Atlantique Sud il n'y avait pas grand-chose à dire. Arrivés devant le pilier, elle sourit en coin et se tourne vers les diplomates.

- Nous voici arrivés. Je vais prévenir qui de droit et vous serez reçus par notre Légat.

Les hommes restent entre eux et Astéria se charge de faire le porte parole auprès des gardes en faction. Si l'occasion lui est donnée, elle fera un rapport de l'accueil et de la traversée. Puis elle retournera voir son petit groupe et restera auprès d'eux jusqu'à ce que Deukalyion les prenne en charge.