Kronstadt : Dogme d'involution [Conclusion event Saint]

La bataille était terminée, sans qu’un réel vainqueur n’émerge. Même si ici, ses guerriers avaient fait le plus gros du travail, c’étaient eux qui avait brillé. Repoussé la toute puissance du Dédale en ne disposant qu’un nombre limité de troupe et d’éveillé démontrait la supériorité militaire du Sanctuaire. Même s’il y avait de nombreuses pertes à déplorer… Dont l’ami le plus proche du vieux lion, Silas, le troisième gardien, tombé contre le pontife d’Arès. C’était là un coup dur porté au Sanctuaire et particulièrement au moral du Pope. Mais il aurait le temps après le conflit de pleurer son ami. Il gardait l’espoir dans un coin de son esprit, comme de nombreux éveillés avant lui, il ne trouve son chemin vers le monde des vivants. Pourtant, il était délicat de savoir comment il serait changé s’il revenait… Childéric chassa ses pensées et se concentra de nouveau sur sa carte.

Dana avait réussi, malgré quelques pertes, à secourir une partie des civils et des alliés du Sanctuaire avant que les ennemis du Sanctuaire ne prennent possession des lieux. Une maigre consolation par rapport aux pertes alors essuyé, mais cela venait malgré tout nuancer la situation. Il fallait prendre les petites victoires où elles se trouvaient.

Une journée s’était écoulée depuis la fin de la bataille. Une journée entière de chaos et de confusion. Les défaites et les victoires s’étaient mélangées. Le onzième gardien, Kilian, avait triomphé de son adversaire et dans un déchaînement de puissance l’avait envoyé ad patres. Paros et Xanathos avaient dû se replier, abandonnant la citadelle aux guerriers d’Arès. Pourtant, le Pégase s’était bien battu et il avait triomphé d’un cardinal, adversaire pourtant théoriquement bien plus fort que lui. Une récompense était de mise pour ce dernier. Xanathos n’avait pas autant brillé que son comparse et ne devait sa survie qu’à l’arrivé d’allier de fortune : une faction de spectre. Kaleb, quant à lui, n’avait pas réussi à repousser les armées slaves et ce sont ces dernières qui ont fini par planter le clou dans le cercueil de la cité défendu par les chevaliers de bronze.

Les hommes de l’étoile de la férocité avaient réussi à l’aider à se replier en évitant les éventuelles embuscades ennemies. Une alliance improbable, délicate mais qui déjà porté ses fruits. Le vieux lion se devait de la considérer, tant le Sanctuaire manquait de soutien et de support. Surtout qu’ils pourraient alléger leur frontière à l’est mais tout ça dépendrait du sens de cette alliance…

Arès avait également à sa disposition des ressources insoupçonnées. Ryme avait fait prisonnière l’un de ces étranges monstres qui avaient attaqué sa citadelle et elle avait même réussi à la faire prisonnière. Une source d’information profitable qu’il faudrait exploiter. Mais quelques coups violents aux défenses de l’Empire avaient été portés par ses monstres et pourtant… les tours avaient tenu. Dans la douleur, la mort et le sang. Mais les cités ont tenus. Le résultat de cette bataille aurait forcément été différent sans la présence des spectres. Le vieux lion, lui-même, avait bénéficié de leur aide. Le juge des enfers, Rhadamantys, lui était venu en aide dans la traque à l’assassin qu’il avait lancé. Et il avait maintenant rendez-vous à Constantinople dans peu de temps avec le dieu de la mort et la déesse Athéna…

Une réunion au sommet qu’il apprendrait un peu. Il était loin de faire encore pleinement confiance à ses alliés de fortune mais la déesse avait insisté. La déesse aux yeux pers avait déjà entamé quelques pour-parlers avec le dieu aux yeux d’argent. Mais maintenant, il devait prendre une décision contenue du sort des citadelles… Impossible de les tenir si près du Dédale. L’ennemi disposait de force sans arrêt sans vraiment s’épuiser. Mais les chiens de guerre ne pourraient pas avancer plus, la demi-victoire du Sanctuaire avait cette importance. Que faire alors ? Se retirer, c’était la seule option viable. Mais cette victoire leur avait offert le temps de se retirer dans le calme et de préparer une fortification plus solide sur le Danube.

Les machines de siège défendu par Dédale offriraient une couverture et une sécurité certaine aux forces de l’Empire, de même qu’elle viendrait agréablement consolider les défenses impériales sur la frontière. Mais maintenant, il fallait tenir… Les spectres apporteraient sûrement leur aide. Les troupes du juge seraient un excellent palliatif mais ces ressources devaient être négociées. Pour le reste, il était l’heure de la retraite. Il s’adressa alors aux survivants et aux éveillés en état de l’écouter.

« - Vous vous êtes battu bravement et votre sang n’aura pas été versé pour rien. Pourtant, il me faut prendre ici au nom d’Athéna une décision difficile. Nous allons devoir abandonner les citadelles. »

Il se tût l’espace d’un instant, le temps que les mots atteignent tous les témoins présent, il reprit ensuite rapidement :

« - Mais nous n’avons pourtant pas perdu la bataille ici. Nous aurons l’occasion de nous installer sur le Danube, frontière de l’Empire et de nous y renforcer. De plus, vos sacrifices et celui de ceux qui sont tombés ont empêché nos ennemis d’avancer plus loin. Certes, ils vont récupérer leurs terres, mais n’attaqueront pas les nôtres. »

Alors qu’il parlait, les mots avaient malgré tout le goût amer de l’échec.

« - Ceux qui désirent retourner au Sanctuaire le pourront. De même que les blesser seront relevés. Une force d’homme supplémentaire venu du Danube est déjà en marche et devrait rapidement arriver. De plus, en accord avec Athéna, elle et moi recevrons Thanatos pour confirmer les termes de cette alliance naît dans la bataille. J’ai bon espoir que les forces des Spectres viennent consolider les nôtres et nous soulager d’une partie du poids de la retraite. »

Ils ne pourraient pas partir tout de suite… Un mois, au mieux, c’est le temps qu’il faudrait aux forces du Sanctuaire pour se retirer et laisser le moins de ressources possibles aux ennemis. Pourtant, il faudrait faire face à une possible résistance et une opposition ennemie. Il ne pouvait pas laisser véritable la situation sans présence militaire. Même s’il comptait sur les spectres, la confiance n’exclut pas le contrôle.

« - Pourtant, nous ne pouvons pleinement nous retirer d’ici. Ceux qui le veulent pourront rentrer au Sanctuaire par le même chemin que nous avons employé pour arriver. Néanmoins, si certains désirent rester, ils auront largement de quoi faire ici, pour couvrir notre retraite. »

Son devoir l’obligeait à rentrer, même s’il aurait aimé rester et participer lui-même à la bataille. Il n’était plus simple soldat maintenant.

« - Hénot de la table restera sur place et assura, comme avant, la coordination entre le Sanctuaire et les différentes entités ici. Libre à vous donc de prendre vos décisions, vous avez deux heures devant vous avant que nous ne partions. »

Et il se tût alors… Viendrait plus tard les conversations individuelles et les récompenses. Heureusement pas de sanction et de manquement n’avait été constaté par ses troupes. Puis seulement après, il prendrait le temps du deuil. Kronstadt : Childéric [Stratégie] ⇒ Le Conteur

Tout ça pour ça ? L’annonce de l’abandon des Citadelles fit monter le venin de l’amertume dans le cœur de Kaleb. Tant de vies sacrifiées, une victoire à la Pyrrhus pour finalement…reculer ?!

Le poing de la Vierge se serra et sa mâchoire se crispa. Comment cela était-il possible ? Comment pouvait-on gagner et devoir céder du territoire ? Cela voulait-il dire que dès le départ, les choses étaient entendues et qu’ils s’étaient contentés de limiter les dégâts ? Si tel était le cas, il y avait clairement une défaillance quant à la préparation de cette campagne et quant aux informations qui avaient dû parvenir au Domaine Sacré.

De toute manière, ils ne pourraient pas remonter le temps. Il était trop tard. Trop tard pour sauver Silas, tombé au combat. Trop tard pour changer les manœuvres qu’il avait effectués en supposant naïvement que son adversaire respecterait les règles du jeu. A quoi servait le stratagème de Zeus si les Saints étaient les seuls à en respecter les termes ?

Des regrets et de remords qui allaient sûrement hanter ses nuits et le pousser à l’insomnie pour les temps à venir. C’était donc ça le goût que la guerre laissait en bouche aux survivants : une furieuse envie de vomir et de cogner dans les murs ? Une sensation que Kaleb n’appréciait pas du tout. Lui qui cherchait à protéger la Vie avait emmené des hommes à la mort par ses choix et ses échecs.

Et devoir s’allier aux Spectres ? Les dieux avaient décidemment un sens de l’humour des plus douteux. Il n’y avait pas d’alliance plus contre-nature que celle-là. Kaleb avait beau comprendre le principe de politique pragmatique et de diplomatie de la meilleure option, cette dernière lui semblait inacceptable. Ils étaient l’incarnation de tout ce qu’Athéna combattait. Hadès était, bien avant Arès, l’ennemi le plus farouche de la déesse, lui qui souhaitant plonger le monde des vivants dans le silence éternel de la Mort. Comment la Sagesse pouvait-elle ne serait-ce que tolérer cette option ?

Il sentait une forme de colère lui lacérer l’âme. Comment pouvait-on présenter cela comme une victoire ? Cette terre n’était pas faite pour lui. Il tâcherait de ne pas y remettre les pieds. Tout du moins sans y être obligé. Kaleb de la Vierge avait pris sa décision. Il rentrerait au Sanctuaire par le premier portail venu. Et sans se retourner.

Mais il savait qu’il devrait faire face à ses échecs devant le Grand Pope. A nouveau. La deuxième fois en quelques semaines. Etait-il vraiment fait pour être chevalier d’or ? Comme le Pope avait pu le dire au sujet de la Coupe, ce n’était pas parce qu’on possédait une armure que l’on était chevalier pour autant. Alors quoi ? Devait-il quitter le sixième temple et repartir à Axoum accomplir la tâche dont son père avait toujours espéré qu’il hérite ?

Le doute l’étreignait. Mais l’heure n’était pas aux lamentations. Il devait assumer ses actes. Non seulement devant les autorités mais aussi devant les familles de ceux qu’il n’avait pu ramener en vie. La seconde tâche serait de loin la plus douloureuse. Il versa une larme qu’il essuya du revers de la main. Il était trop tard.