[Mi-Mars553] Les roses et les ronces (LIBRE)

Parfois le silence est d'or.
Et pour le coup, grâce à ma vigilance, j'étais parvenu à déjouer un espionnage, potentiellement ravageur pour nos intérêts.
Morgane semblait plus surprise que contrariée, et évoqua un Fomoire. Cela ne pouvait être un hasard... Mais lequel ? Affilié à quel ennemi ? Nous étions bel et bien cernés, pistés par les ombres.
Morwenna semblait avoir obtenue de nombreuses informations, que ce soit sur l'origine de son armure et du fondateur de notre lignée. Mais tout ceci ne suffirait pas à me faire oublier le danger que nous courrions.
Après avoir reposé la carafe, je me dirigeais vers ma sœur, en lui adressait un air rassurant, avant de lui souffler quelques mots à l'oreille.

Je peux m'en charger, si tu préfères rester ici, en si bonne compagnie.

Le choix lui revenait. Morwenna avait besoin de réponses, car son mal grandissait à chaque instant. Je pouvais donc comprendre son souhait de poursuivre cette conversation. D'autant plus maintenant qu'elle sera davantage privée. Toutefois, mon inquiétude à son égard me faisait hésiter.
Pouvais-je la laisser seule ? Je ne le souhaitais pas. Mais que faire d'autre ? Voudrait-elle me suivre, au risque de manquer d'obtenir quelques éléments cruciaux ?

Selon moi, ce Fomoire écoutait notre conversation, dame Morgane. Auriez-vous une idée de son identité ? Je suis certain qu'il s'agissait d'une femme...

Je vais pour opiner face à la proposition de mon frère. Il devient urgent d’agir et de prévenir le Grand Pope et qui de droit, ici à Camelot. Si les Fomoires sévissaient pendant l’intronisation d’Artorius… et Mebd et ses pantins ! Je me sens blêmir, si cela est encore physiquement possible. Morgane a un geste se voulant rassurant. Elle nous assure avoir la situation en main, que le danger est écarté. Mais pour combien de temps ? La question se manifeste avec force dans ma tête. Une main se pose sur mon bras tandis que je réfléchis à toute vitesse. L’archiviste transmet des informations importantes et prouve une nouvelle fois, que l’étendue de son savoir est loin d’être négligeable.

D’ailleurs, je sens la conscience de l’érudit effleurer la mienne. Je l’autorise à délivrer son message et le regrette presque. Il peut sentir ma volonté fléchir, le désespoir apparaître à l’orée de mon esprit. Encore ces mêmes tourments, ce déchirement, entre terre et mer.

J’en ai assez, des secrets, j’en ai assez d’Atlantis. J’ai fait un choix, douloureux, certes, mais nécessaire. Je n’ai plus envie de vivre entre deux mondes. Je n’ai pas envie d’être une atlante. Au final, je ne sais rien de mes origines. J’en ai assez des secrets, des mystères. De ce masque.

Qui est ma mère ? Qui est véritablement mon père ? Qui suis-je ?
Que suis-je ?

Je ne suis plus Nimuë des Poissons, Nimuë de la Sirène Maléfique, l’atlante, l’épouse, la fille, la mère… la couleur de l’abattement se glisse dans mon aura. Je redresse la tête pour écouter Morgane.
Un poison mortel hein ? Je me retiens de lâcher un rire désabusé.

« Comment Lucius est-il devenu un Fomoire ? Je le pensais druide noir à la solde de Mebd. Ce pourrait-il qu’un Fomoire ait pu prendre possession de son corps, de son esprit ? »

Non, ça ne collait pas. Mes épaules s’affaissent, j’ai envie de capituler.

« Finalement j’accepte volontiers ce verre. » dis-je en me penchant pour prendre une coupe, soulever légèrement le bas de mon masque pour boire d’une traite, ce délicieux vin. « Heureusement que je peux encore apprécier le goût de ce nectar, à défaut de pouvoir en apprécier les effets. »

Un petit sourire étire mes lippes craquelées, je n’attends pas pour remettre mon masque à sa place, par réflexe, par habitude.

Soupir.

Ce que mes fantasmes voulaient voir ?
L'information cruciale me plongea dans l'introspection. Une femme aux cheveux sombres, paré d'un regard glacial... Qui pouvait-elle être dans mon esprit ? Que représentait cette forme particulière ? Quelle cauchemar féminin hantait mon subconscient ? L'idée ne me plaisait guère.
Mais je pourrais toujours y réfléchir plus tard, à tête reposée.

Je vois... Ce pouvoir est effectivement redoutable. Et comment peut-on les reconnaître s'ils sont capables de changer de forme ?

Le risque de voir l'un d'entre nous pris pour cible par l'une de ces créatures n'était pas à négliger. Et je devais fournir au Grand Pope un maximum d'informations fiables. Une négligence serait dramatique.
Je perçus alors un changement dans l'aura de Morwenna. L’abattement prenait peu à peu trop de place en elle. Et là voici qui accepte un verre de vin, alors que son corps risquait de ne pas être en mesure de le supporter.
Le médecin en moi eut la tentation de stopper son geste, mais je n'en fis rien. Parfois, un coup de vigueur au mental valait tous les remèdes des maux physiques.
Je posais une main douce sur son épaule voûtée, pour lui insuffler ce courage, cette foi qui lui faisait défaut.
S'il le fallait, je la porterais. Au sens propre comme au figuré. Tant que la vie demeurait, impossible de renoncer.