[Début Mars 553] Virgo iusiurandum [PV Childéric]

Enfin… Le moment tant attendu était arrivé. Le soleil pointait à peine le bout de son nez que Kaleb avait été tiré de son lit par une Kalia déjà toute apprêtée pour la journée. Mais bon sang ?! A quelle heure se levait-elle pour être déjà opérationnelle alors que l’aurore se levait tout juste ? Il fallut plusieurs essais à l’intendante de la sixième maison pour réveiller le Gardien de la demeure, une cruche d’eau glacée ayant fini par atterrir sur la tête de Kaleb qui poussa une série de jurons que la décence nous interdit de reproduire ici mais qui remettait clairement en cause la santé mentale de la jeune femme.
Il changea néanmoins de ton et s’excusa quand cette dernière lui indiqua qu’un messager était descendu directement du treizième temple porteur d’une missive cachetée à lui remettre en main propre. Aucun doute. C’était le sceau du Grand Pope. Il avait sauté du lit dans le plus simple appareil, occultant le regard narquois de Kalia, enfilant une tunique à la vitesse de la lumière pour se présenter devant le coursier.

L’écrit était limpide, clair, sans fioritures et signé du chambellan. Il devait se présenter au plus tôt. C’est-à-dire, au moment même où la cire avait fini de sécher. N’ayant pas de connaissances précises du protocole du Sanctuaire, il devait se présenter sans commettre d’impair. Bien qu’Eunoia lui ait enseigné le rôle du Grand Pope et sa place dans la hiérarchie du Domaine Sacré, il ignorait les détails de cette première rencontre. Devait-il s’agenouiller ? Ne pas regarder le représentant d’Athéna dans les yeux ?

Tant pis. Il n’avait pas le temps de tergiverser. Il ferait au mieux et s’adapterait à la situation. En revanche, il y avait une chose parfaitement claire dans son esprit. Il devait se présenter en armure d’or. Car ce n’était pas l’homme que le Pope voulait rencontrer mais le Chevalier Sacré. Aussi Kaleb se plaça devant l’Autel du Paradis et fit irradier son cosmos comme un chant devant le regard admiratif de son intendante et de son aide de camp aux cheveux ébouriffés et au visage encore embrumé de sommeil. Comme par miracle, la box d’or rentra en résonnance avec l’énergie de Kaleb, s’ouvrant et dévoilant l’armure de la Vierge, totem priant pour le salut des Hommes. Dans un éclair de lumière, la statue explosa et les différentes parties vinrent couvrir le corps du jeune homme dans un processus immuable depuis les temps mythologiques.

Pour la toute première fois, il la sentait respirer, elle l’enveloppait comme si une parcelle du soleil était venue le protéger telle une seconde peau scintillante pour porter l’Espoir dans les Ténèbres. Kalia paracheva la tenue en fixant une cape à la blancheur immaculée dans son dos. Il était prêt.

Sans plus attendre, il gravit les marches, traversant chacun des six temples qui le séparaient de celui du représentant de la Déesse. Il n’y croisa aucun de ses homologues. Il fit ce constat avec une pointe de regrets qu’il chassa bien vite de son esprit. Cela viendrait avec le temps. Il fallait se concentrer sur l’instant présent. Franchissant les portes gigantesques de la Salle d’audience sans que les gardes ne s’y opposent, il avança d’un pas calme et déterminé, un regard emplit de solennité posé sur le représentant d’Athéna assis sur son trône. Puis, aussi calmement, il s’agenouilla posant son poing sur son cœur et s’adressant au Pope avec un ton mêlant respect et humilité.

« Je vous salue Excellence. J’espère ne pas vous avoir fait attendre. Moi, Kaleb de la Vierge, suis prêt à recevoir vos instructions… »

Les nuits étaient courtes, pour la voix d’Athéna. Très courte, trop courte. Toujours tant de choses à gérer et bien souvent, les vingt-quatre heures d’une journée ne suffisaient que rarement à faire tout ce qu’il voulait ou devait accomplir. Mais il en faisait déjà beaucoup. Il était sur le pied de guerre depuis l’arrestation de Narsès et l’empire avait été secoué, pas forcément dans ses fondements, mais au moins dans ses élites. Sans compter les dangers de l’est toujours présents et des nouveaux acteurs agissant en parallèle aux spectres d’orient, la Thiase, les servants de Dionysos. Que faire de nouveaux acteurs, que penser d’eux ? Des nouvelles questions, de nouveaux problèmes. Sans oublier la question de son prisonnier politique, des relations avec les marinas, du statut des Oracles ou encore d’une guerre à venir avec les chiens d’Arès. De ça au moins il était certain, il ne s’agissait pas simplement d’un si, mais bien d’un quand.

Sans oublier les problèmes internes. Il avait dissous l’ordre des Corona et avait des projets pour que ces chevaliers et ceux qui prendraient leur place puissent laver la souillure de la traîtrise qui salirait leurs noms. Mais aussi et ça c’était un moindre problème, du moins l’espérait-il, un nouveau chevalier de la Vierge. Aegis, qui avait porté l’armure depuis la fin de la guerre, jusqu’à quelques mois, s’en était séparé pour accomplir une mission qui lui convenait mieux. Une mission sensible et délicate, mais non moins importante. Puis il y avait eu… un excentrique qui n’avait pas gardé l’armure plus d’un jour ou deux et avait sûrement du succomber à la malédiction que la déesse lui avait lancé ou avait quitté le monde du Sanctuaire. Alors, quand il avait appris qu’un nouveau gardien se trouvait dans le sixième temple, il s’était dit qu’il allait garder ce dernier à l’heure. Une lettre de convocation plus tard et le voilà, à plier le genou devant lui.

Il avait réglé quelques affaires avec son chambellan avant que le soleil ne se lève et il se trouvait déjà dans la grande salle du trône pour les audiences matinales. Cela aussi, lui prenait beaucoup de temps, mais c’était quelque chose de nécessaire et d’important, son devoir. Il était installé sur son trône, vêtu de la l’imposante toge blanche et pourpre du Pope. Il avait sur son visage un masque, couvrant entièrement son visage et ne laissant rien voir de l’homme qui se trouvait dessus. Car ce n’était pas d’homme dont il était question ici. Pas d’individu car il s’efface derrière le masque. Il ne parle que pour lui, il ne représente pas son nom, mais celui loué d’Athéna. Un mal nécessaire, un atout pour cacher ses réactions. Il laissa le chevalier d’or le saluer. Sa maîtrise du protocole était déjà à des années-lumières de celle de cet olibrius qui avait porté l’armure quelques jours.

« - Relève toi, chevalier. Je t’ai convoqué pour plusieurs choses. Une routine, tout le cercle d’or y est passé, rassure toi. J’aimerai en apprendre plus sur toi, Kaleb de la vierge, à fin de voir la place qui sera la tienne dans les rouages des armées d’Athéna, afin de voir à qui je dois accorder ma confiance. »

Il avait parlé avec solennité, car c’était la première fois que ce gardien rencontrait son chef et à travers lui, rencontrait la déesse. Pour le reste et bien, c’était entre les mains du chevalier d’or. À lui de prouver qui il était, et ce qu’il avait à apporter au Sanctuaire.

Ainsi le Grand Pope désirait savoir à qui il avait à faire… Réaction somme toute logique. Connaître les forces et faiblesses des hommes que l’on avait sous sa responsabilité. Kaleb aurait réagit exactement selon le même schéma logique. Mais que pouvait-il donc bien dire sur lui ? Qu’il aimait l’odeur de la rosée du matin ou le goût du houmous ? Non, ce n’était certainement pas ce qui intéressait le premier serviteur d’Athéna. Lui donner sa place dans les rouages de l’armée d’Athéna… Rien que ça. Lui-même n’avait pas cette prétention. Mais se rendre utile aux autres, protéger, oui. C’est pour cela qu’il avait quitté sa terre natale, enduré l’entraînement dans le désert puis la solitude au Sanctuaire. Le chevalier d’or se releva, gardant ses mains jointes devant lui. La solennité de l’instant se lisait sur son visage.

« Je suis originaire de l’autre rive de la Grande Verte, votre Excellence. Je suis né et ai grandi dans l’empire Axoumite. Jusqu’à ce qu’un envoyé de la déesse ne me trouve et m’amène à mon maître, au sommet de l’Horeb. Eunoia m’a initié avec exigence, sagesse et sens du devoir. J’ai étudié auprès d’elle pendant sept années avant de prendre le chemin du Domaine Sacré. Elle m’a enseigné à communiquer avec les esprits de la nature, à voir la lumière au cœur des choses et êtres… Avec en prime quelques notions d’herboristerie…»

Il avait prononcé cette dernière phrase avec une pointe d’espièglerie dans la voix, les yeux dans le vague de ses souvenirs et un petit sourire en coin. Mais il reprit bien vite son sérieux, pour poursuivre son exposé.

«Je n’ai pas la prétention d’être un grand guerrier. Bien que l’armure d’or me donne une certaine prestance, je suis bien loin d’atteindre la taille de votre Excellence ou la carrure de certains de mes frères d’arme…»

Bien qu’assis, la carrure du Grand Pope se laissait deviner sous ses vêtements sacerdotaux et Kaleb percevait parfaitement cette énergie au repos qui émergeait de son supérieur, ne demandant qu’à bondir. Le chevalier d’or crut bon d’ajouter une dernière phrase.

« Néanmoins, je défendrais la maison de la Vierge ainsi que ceux qui l’habitent jusqu’à mon dernier souffle. Je peux également m’acquitter des missions d’ambassade ou de diplomatie si tel est votre désir. Sachez juste que je crois au respect de la Vie, en la rédemption de ceux qui se sont égarés, au châtiment divin pour ceux qui persistent à cheminer dans les ténèbres… Voilà, votre Excellence. Je ne suis qu’un simple chevalier.»

Il fixa le Pope avec sincérité, attendant qu’il se prononce.

Silencieux, Childéric écoute ce que le nouveau porteur de l’armure d’or de la vierge a à dire. Il est vrai qu’il n’a rien à voir avec ses prédécesseurs. Bien, il serait plus facilement utilisable ! Ses origines seraient sûrement une force et il n’avait personne de qualifier pour s’occuper de cette zone en particulier. Nébu avait eu l’Egypte à sa charge mais il avait maintenant une autre mission. Aegis s’occupait d’une tâche précise lui aussi. Alors d’une façon ou d’une autre, l’Afrique était sans superviseur, il serait légitime de lui proposer. Le reste de son histoire était celle de bien des chevaliers. Entraîné et arraché à ses terres pour rejoindre le service de la déesse. Conditionné et préparé pour les guerres à venir. Pour la mort prochaine des chevaliers. S’il pouvait trouver de la paix dans ses souvenirs tant mieux pour lui.

Pour le reste, son expérience de la guerre viendra quand, simplement, il aura subi son baptême du feu, du moins, s’il y survit. Il apprendrait à être un chevalier d’or, un soldat dans les armées divines d’Athéna. Il suivrait le chemin de la guerre, comme les autres. Au moins, contrairement à la précédente vierge, il ne semblait pas étranger à ces notions et d’une certaine façon, comprendre ce qu’on attendait de lui. Pour le reste, il serait curieux de voir s’il était capable de diplomatie. Le Sanctuaire en manquait cruellement. Viendrait à un moment où il devrait dépêcher de nouvelles ambassades. Délégation qu’il ne pourrait toujours présider. Nébu était en mission, et combien de temps pourrait-il se reposer seulement sur Airoth ? Il creuserait la chose donc.

La phrase qu’il l’interpella le plus fût sa dernière réplique sur la justice divine et le châtiment des ennemis de la déesse. Surtout, sur la deuxième chance qu’il désirait accorder à ceux qui la méritait. Une idéologie qui était la sienne, tant pour la gouvernance que pour le reste. Mais il est des gens qui ont passé ce point-là depuis longtemps. C’était, par exemple, le cas de Narsès. Déjà il avait eu ses chances et qu’en avait-il fait ? Mais il s’agit d’une autre histoire, d’autres problèmes. Maintenant, il fallait réfléchir à comment intégrer Kaleb dans les armées d’Athéna. Il avait déjà une petite idée.

« - Je vois. La nature ne t’a pas doté d’épaules larges, mais ton bras a l’air puissant et l’armure d’or compensera le reste. Tu feras un guerrier convenable. Pour le reste… Certains de tes camarades du cercle d’or ont sous leur responsabilité certaines zones du monde, qu’elles appartiennent ou non à l’empire. Un support à l’administration, aux affaires qui ne concernent pas les dormeurs. Et j’aimerais que tu prennes ta place dans ces rouages. »

Il garda le silence un instant, le temps de laisser la réflexion à Kaleb.

« - Pour le reste, testons tes compétences. Admettons que j’ai donné un ordre, qu’il était suivi par certains et ignoré par d’autres. Comment récompenser ceux qui, au péril de leur vie, ont suivit cet ordre et éviter au Sanctuaire bien des problèmes et comment punir les traîtres ayant suivi d’autres voies ? »

Il scruta alors les réactions du chevalier d’or, attendant ses réponses. Sûrement de ces mots aller découler sa première mission et les premiers ordres qu’il aurait à transmettre, à voir tout du moins. Le soldat qui s’était opposé à Narsès allait bientôt recevoir son ordre de mutation pour la garde prétorienne du Sanctuaire, mais Carthage et son exarque aurait bientôt un nouvel interlocuteur privilégié.

Un guerrier convenable. Bon. Il ne s’était pas non plus attendu à un panégyrique dithyrambique mais il y avait un je ne sais quoi de blasé dans les mots choisis par le Pope qui aurait pu irriter quiconque avait l’orgueil mal placé ou un ego démesuré. Kaleb se contenta d’un sourire pensif. Ferait-il un guerrier convenable ? Tout dépend de ce que le premier serviteur de la Déesse entendait par là. S’il s’agissait de défendre et de protéger, il sortirait sans doute son épingle du jeu. Mais s’il s’agissait de porter l’offensive en territoire ennemi, il n’était effectivement pas certain d’être le chevalier de la situation. A chacun ses talents.

Le Pope l’avait bien perçut. Il lui proposait donc de veiller sur l’Afrique. Une tâche honorable même si en dehors de l’empire axoumite et du trajet emprunté par la caravane l’ayant mené au Sanctuaire, Kaleb ne possédait que des connaissances théoriques sur le sujet. Cependant, il serait peut-être le plus à même parmi les douze de remplir cette mission. Etait-il le seul originaire de l’autre rive de la Grande Verte ? Peut-être. Un choix par défaut ? Peu importait en réalité. L’essentiel était de s’acquitter des missions qui en découlaient même s’il éprouvait une légère appréhension à l’idée de retourner sur les terres de son enfance. Il ne le laissa cependant pas transparaître.

« Veiller sur l’Afrique serait un honneur pour moi votre Excellence. Il faudra sans doute que je me mette en relation avec les gouverneurs et autres chefs de guerre locaux, je présume… il faudra néanmoins que j’approfondisse et que j’actualise mes connaissances. Il y a bien longtemps que j’ai quitté Axoum et on ne peut pas dire que l’ermitage sur l’Horeb m’ait permis de me tenir informé des actions qui s’y trament… »

Toujours calme et réfléchit, le chevalier d’or de la Vierge, répondit ensuite à la question que lui posait le Grand Pope. Une situation épineuse mais un test pour voir si les actes de Kaleb étaient à la hauteur de ses paroles. Il prit un temps de réflexion pour apporter le regard le plus juste possible au cas posé.

« La situation me paraît devoir apporter plusieurs réponses. Mon rôle est de ramener au Sanctuaire les traîtres afin qu’ils puissent être soumis au jugement de notre Déesse. S’il s’agit d’un égarement, je crois qu’il faut offrir à ces personnes la possibilité de se racheter par une action proportionnelle à leur faute et prouver qu’ils sont toujours dignes de servir Athéna. Cependant, si ce n’est pas la première fois que ces personnes s’égarent et qu’elles constituent une menace pour leurs pairs, je pense qu’il faut savoir parfois sacrifier une vie pour en sauver des milliers d’autres. Pour ce qui est des récompenses, je crois qu’avec la confiance viennent les responsabilités. La voix de ceux qui ont été méritants doit être écoutée avec davantage d’attention. Quel que soit leur rang. Et pourquoi pas sur la récompense qu’ils désirent ? »

Il semblait donc comprendre son rôle, son devoir et ce qu’on attendait de lui, une différence avec la précédente vierge à qui l’ancien lion n’aurait jamais pu confier ce genre de mission. A voir si le sixième gardien teindrait sur la longueur mais pour le moment, il avait l’air de comprendre l’attendu de la tâche qui l’attendait. Kaleb posa d’emblée les bonnes questions et demanda les contacts des gens qui pourraient l’aider à accomplir sa tâche. Une réaction que Childéric accueilli dans un signe de tête.

« - Aksoum ? C’est une ville loin dans les terres et notre influence africaine ne s’étend pas si loin. Mais tes contacts et tes connaissances dans la région pourraient nous t'être utile. N’hésite pas à te constituer un réseau d’informateurs ou de divers seigneurs qui pourraient être tes yeux et tes oreilles. Ton principal interlocuteur, c’est l’exarque de Carthage : Maximus "L'humble". C'est le haut fonctionnaire responsable de l’administration impérial là-bas. La ville est… spéciale. Elle est teintée d’histoire et de sang, porte vers notre monde et celui de sous les flots. »

Carthage… Cette ville à la frontière de plusieurs mondes et qui avait fait couler tant de sang. Et surtout, théâtre d’un nouvel événement de sang qui aurait pu faire naître la guerre entre la terre et l’océan. Mais la sagesse des hommes, et la fidélité de certains, surtout, avait empêché ça. Une réalité que le Pope devait transmettre à celui qui prendrait la relève sur la surveillance de cette zone. Et du travail l’attendait. Pas autant que Diane qui devait s’occuper des régions les plus éloignés des empires d’Orient. Plus de proximité devrait impliquer aussi plus de surveillance, surtout sur une zone aussi partagé que ça. L’empire Vandale et son ombre, le cardinal de la guerre, après tout, n’était pas loin. Un tout petit peu plus au nord-est. Le Pope l’écouta donc ensuite répondre au petit test qu’il lui avait posé et il jugea sa réponse avec le sérieux du chef de guerre.

Les deuxièmes chances… Une nécessité dangereuse, mais vitale. On ne pouvait tuer quelqu’un à la moindre faute. Combien de fois ses prédécesseurs avaient usé de ces menaces dans le vent ? Childéric se souvint avec amusement de la façon dont Belisaire, qui l’avait trouvé en plein travail de la terre, l’avait durement jugé pour son habillement. Sans même chercher à réfléchir ou comprendre. Des temps révolus au Sanctuaire ? Oui et non. Il n’était pas à cheval sur le protocole, il était même plus humain que les deux anciens Pope, mais il n’en reste pas moins implacable, par nécessité et par éducation. Ce que Kaleb proposa, collait parfaitement avec ce qu’il avait prévu pour Xanathos, qui rentré dans cette catégorie, ainsi, il répondit par un grognement approbateur. Et écouta la suite.

Le reste tomba également parfaitement avec les vus du Pope. Il était donc pour le moment confiant et satisfait de cette rencontre, voir ce que l’avenir réserverait au chevalier d’or. Mais Childéric avait déjà quelques idées de comment et à quelle fin utiliser cet homme, nouvel outil d’Athéna, nouvel outil du Pope.

« - Bien, alors tu vas envoyer tes premiers ordres, Kaleb de la vierge, à l’exarque de Carthage. Dit lui que le centurion qui a obéit aux ordres au risque de sa vie est convoqué ici, pour rejoindre ma garde prétorienne. Dit aussi à l’exarque tu le visiteras bientôt, dans un mois ou deux. Et que l’exarque Narsès a été relevé de ses fonctions pour haute trahison. La nouvelle s'est déjà rependue dans l’empire, mais il doit l’entendre la bouche du Sanctuaire. Dit lui également que tu l’aideras dans l’accomplissement de son devoir. Pour le reste… J’aimerais que tu rencontres Xanathos, ancien chevalier de la Carène et membre de la garde rapproché de Narsès. Je veux que tu me donnes, à l’avenir, ton avis sur lui, si vous ne vous êtes pas déjà croisé. »

Il se doutait que l’ancien servant du traître n’en était pas un, du moins, pas volontairement, mais l’avis de la vierge l’intéressait sur ça. Les théories sont belles, mais que valent ces dernières faces à la pratique ?

Se constituer un réseau d’informateurs… Plus facile à dire qu’à faire. Il faudrait pour cela qu’il retourne sur place. Il le ferait une fois les travaux de la maison de la Vierge achevés. Avec la vitesse de déplacement de chevalier d’or, il pourrait sans doute pouvoir limiter le temps où il se trouverait hors du domaine sacré. Finir la formation d’Eireen lui paraissait une priorité afin qu’une défense à minima de la demeure puisse s’organiser en son absence. Il avait déjà plusieurs pistes. Les caravanes de marchands, les mendiants, les petites gens… Ceux auxquels les puissants ne font pas attention. Parfois, ils en savaient bien plus que leur simple condition ne le laissait présager. Et donc…. Carthage…. Une cité qu’il ne connaissait que de nom. Le grand Pope laissait entendre qu’il s’agissait d’une porte d’entrée vers le Royaume sous-marin et qu’elle était de fait un théâtre de luttes entre les différentes divinités. Il allait donc devoir se montrer prudent. Agir ainsi au milieu des ronces était délicat. Il faudrait probablement peaufiner la stratégie et se méfier. Mais c’était aussi un défi à relever. Une terre à pacifier. Etait-ce une marque de confiance basé sur l’intuition du Pope de lui confier cette zone ou une mise à l’épreuve ? Sans doute un peu des deux. Mais Kaleb n’était pas de nature à se défiler. Il acquiesça aux mots du premier serviteur d’Athéna

«La missive partira demain à l’aube votre Excellence. Je me rendrais sur place dès que vous m’en donnerez l’ordre afin de rencontrer le représentant de l’Empereur. Le lien entre le pouvoir Sacré et le terrestre doit être tissé. En attendant, m’autoriseriez-vous à avoir accès à la Bibliothèque du Sanctuaire afin d’étudier les précédentes missions, l’historique et les rapports en provenance de Carthage ? Je préférerai ne rien laisser au hasard avant la rencontre. »

Il attendit un instant et considéra l’ordre du Pope concernant l’ancien chevalier de la Carène. Un certain Xanathos. Cet homme avait donc servit un exarque jugé pour trahison… Narsès… L’exarque de Rome si Kaleb ne commettait pas d’erreur. Qu’avait donc bien pu faire cet homme pour être ainsi accusé d’avoir violé les idéaux de la Déesse ? Peut-être devait-il avoir également un regard avisé sur la situation ? Ou au contraire, le Grand Pope souhait-il que le regard sur l’ancien chevalier d’argent soit le plus vierge possible ? Il s’enquit donc de la stratégie

«Souhaitez-vous que j’ai accès à quelques informations supplémentaires sur cette situation avant de rencontrer cet homme ou préférez-vous qu’il me relate lui-même l’étendu de sa forfaiture ? Parfois, la façon dont les gens racontent une histoire en dit davantage sur eux que l’histoire elle-même… »

Il leva les yeux vers le trône. L’entrevue touchait sans doute à sa fin.

Childéric adressa un signe de tête au chevalier d’or de la vierge quand ce dernier fit part de sa volonté de mener à bien l’ordre qu’on venait de lui confier avec zèle. Pour le reste, Kaleb semblait comprendre l’importance accordée au lien entre le pouvoir des dormeurs et celui du Sanctuaire, mais, et c’était normal, il lui manquait sûrement un peu de profondeur. À moins que ça déclaration ne soit le fait qu’une volonté de bien faire trop pousser. Dans le deux cas, c’était son rôle de Pope d’aborder la situation et de donner au chevalier d’or quelques détails. De même, il avait fait une demande et le Pope devait lui fournir une réponse. Il s’attendait à voir la déception chez le chevalier mais la bibliothèque du Sanctuaire, aussi prestigieuse qu’elle soit, ne contient pas toutes les réponses. Surtout qu’il cherchait plus là l’accès aux archives du Sanctuaire, près carré du Pope. Mais néanmoins, il lui fournirait certaines des informations demandées.

« - Les liens entre dormeurs et éveillés existent déjà. L’empereur écoute ce que je lui dis et ses armées répondent à la volonté d’Athéna. Le problème justement, est là de montrer que nous accordons beaucoup d’importance à ses liens, plutôt qu’une volonté de les tisser. Le reste, si nos yeux et nos oreilles sont aveugles, cela laisse de l’espace à nos ennemis pour grandir. »

Il adressa ensuite un signe de la main à un des gardes prétoriens présent, en retrait, dans la grande salle du trône. Ce dernier se détourna vers une salle adjacente à la grande salle et disparu deux ou trois minutes avant de revenir, les bras chargés de tablettes de cire.

« - Les archives de Star Hill ne peuvent être consulté aussi facilement, chevalier. Mais voilà qui devrait t’aider. Je peux te faciliter la tâche et te dire ce que contiennent ses tablettes. Rien de bien intéressant sur ces dernières années. Coeur du Royaume Vandale jusqu’à sa conquête, Carthage est le siège de notre pouvoir en Afrique depuis sa conquête en 533. Le reste, la ville n’a pas fait trop parler d’elle depuis, sauf il y a deux ans, où les masques rouges, nos ennemis, ont tenu sur places quelques étranges rituels. Athéna est intervenue dans des circonstances particulières qui relève du secret de la déesse, j’en suis désolé. Mais les choses se sont calmées depuis jusqu’à ce que Narsès, le traître, attise le feu de la guerre contre les forces du Sanctuaire Sous-marin. Il s’en est fallu de peu pour que les choses dégénèrent. Voilà ce que tu devais savoir, Kaleb. »

La question suivante du chevalier de la vierge en disait long sur sa réflexion. Il l’avait, pour le moment, bien jugé. Ne reste maintenant qu’à voir ce que la réalité lui apprendra et comment il réagira.

« - Non, je t’ai dit ce que tu avais besoin de savoir en rapport à cette situation. À toi de te faire ton avis et de me dire, ensuite, ce que tu penses de cet homme. Si tu n’as plus de questions, chevalier, je pense que nous avons terminé cette entrevue. »

Il ne s’avéra pas surpris des réponses du Grand Pope. Il n’avait aucune prétention au pouvoir et il se doutait bien que les archives du Sanctuaire pouvaient contenir des documents sensibles que même un chevalier d’or n’avait pas le droit de consulter. Aussi ne se formalisa-t-il pas du refus du Pope de le laisser accéder. Star Hill ? Non, il n’en demandait pas tant. Dans son ignorance, il avait présagé que seuls les documents sensibles s’y trouvaient et qu’une partie plus accessible existait peut-être ailleurs dans le Domaine Sacré. Il esquissa une grimace, de celles que l’on fait quand on se rend compte que l’on a dit une bêtise et que, pour autant, on ne pratique pas l’auto flagellation. Quant aux liens, il était évident que la relation protocolaire était pré-existante. Il avait sans doute été maladroit dans sa formulation. Il tâcherait d’être plus vigilant à l’avenir sur les termes choisis.

«Je tâcherai de renforcer ce lien au mieux, votre Excellence. Et de veiller sur cette partie de l’Empire pour y préserver la paix… »

Ainsi Narcès avait soufflé les braises de la guerre, manquant de déclencher un conflit avec les serviteurs de Poséidon… Quelle vision avait donc cet exarque déchu de la place du Sanctuaire dans le monde ? Pourquoi vouloir faire éclore la discorde et la guerre là où l’on peut maintenir l’équilibre et la paix ? Cet homme s’était-il égaré au point de confondre son allégeance entre les deux divinités de la guerre ? Ces réponses, le dénommé Xanathos pourrait peut-être les lui apporter.

«Je rencontrerais donc ce Xanathos votre Excellence. Et après m’être entretenu avec lui, je viendrais vous livrer mes réflexions si cela peut s’avérer utile. »

Puis, saluant une dernière fois le Grand Pope, Kaleb se releva et prit congé, s’en retournant vers la sixième demeure.

Re: [Début Mars 553] Virgo iusiurandum [PV Childéric]

» [Mi-Mars 553] Team Gemini-Virgo au rapport (Kaleb & Childéric)
» [Début mars 553] La fin d'une mission, le début d'une autre (Solo)
» [Début Mars 553] Voyage ~ Ft Liv
» [Début mars 553] Aîon
» [Début mars 553] Ça va faire mal !

Rechercher

Résultats par : Messages Sujets
Recherche avancée