[Début Octobre 550] Descendance (Nimuë)

Des éclats de voix. Du chagrin, de la colère. Un père outragé et blessé. Mais plus que tout ça, c'était la Cité toute entière qui était endeuillée. Fauchée par un mal dont elle était la responsable principale. Voir Atlantis plongée dans le sang et les larmes mettait Nimuë devant une vérité qui la faisait souffrir plus que le reste, ses propres pertes. Ses propres combats, en comparaison, paraissaient bien absurdes. Vains, futiles. Si la Sirène avait ressenti la chute du Pilier, voir et constater par ses yeux cette désolation… était autrement plus difficile. Étoile rouge qui était à l'origine de ce chaos, cette désolation, toute Porteuse de Mort qu'elle était, elle s'avançait. Ses yeux parcouraient les pourtours détruits, chaque visage qu'elle croisa. Autant d'images que la Générale n'était pas prête d'oublier et d'effacer.

Le cliquetis de son armure qu'elle arborait toujours, se fit crescendo à mesure qu'elle se rapprochait du Cinabre et de cet homme tourmenté. Elle était tant plongée dans ses propres réflexions qu'elle n'avait pas capté le sens des mots échangés, seulement les tonalités, les chants des voix. Non, en réalité elle n'avait capté qu'un seul mot : « Sang ». Alors elle s'était stoppée. Avait regardé ses mains. Nimuë en était recouverte, de sang. Si bien que la peau de son visage n'était plus visible. Ce n'était pas faute de l'avoir nettoyé mais…

… elle resta dans l'ombre. En état de choc, toute tremblante et des larmes aux bords des yeux. « C'est ma faute... »

Avait-elle soufflé dans un murmure inaudible. Ce fait-ci frappant de nouveau avec une force inouïe qui la fit reculer d'un pas. Ses yeux cherchèrent ceux du Légat, mais elle ne voyait plus rien. L'écarlate s'imposait une nouvelle fois à sa vue et ses paupières se refermèrent quand les images de sa propre lutte défilèrent dans son esprit. Entre toutes, ce fut celle du corps d'Orion, inanimé, qui lui fit le plus de mal. Si bien que la Générale sentit ses jambes se dérober sous elle. Le sol était froid et Nimuë eut la surprise de constater que cela lui fit du bien. Alors, tout en se recroquevillant, la Sirène Maléfique se mit à sangloter sans pouvoir s'arrêter.

« C'est ma faute... » répétait-elle inlassablement, ses larmes creusant des rigoles dans le sang et la poussière. « … ma faute... »

Nimuë O'Bannon glissa dans l'inconscience. Ses poings se desserrèrent pour dévoiler l'éclat d'un bijou. Un rubis. La Stella Rubius.