[Début Avril 553] Une épreuve à surmonter (Childéric - Nimuè)

Silas avait gravi à nouveau les incalculables marches qui séparaient son temple à la demeure du pope. Il en avait marre de cette marche, surtout qu'il devrait faire de même au retour. Il fallait vraiment que le Pope aménage un dortoir en haut du Sanctuaire car Silas ne se voyait pas encore redescendre les marches en pleine nuit comme certaines fois. Bien-sur il y avait les appartements des servantes d'Athéna, mais il ne pensait pas qu'il y serait le bienvenue.

Il avait reçu une nouvelle missive du Pope qui lui demandait de venir le voir au coucher du soleil. Silas avait souri en lisant le mot, il savait ce que cela voulait dire. Une rencontre nocturne pour un entretien, cela signifiait que Childéric avait besoin de son ami pour vider quelques coupes. Silas prit donc l'une des amphores de la cuvée spéciale de Crocus et commença son ascension des marches. Ça faisait les mollets il devait bien le reconnaître. Deux fois en trois jours, fatiguant non?

Il salua les deux gardes du premier quart de nuit lorsqu'il arriva, il entra ensuite et se dirigea de suite vers le petit salon annexe où Childeric l'attendait comme à son habitude.

_ Mon ami, j'ai bien reçu ton message.

Il le salua légèrement, il avait son ami en face de lui, pas le Pope ce soir là. Il posa l'amphore sur la table et se rapprocha du barbu. Silas fit une petite mou, Childéric semblait songeur.

_ Quelque chose te tracasse? Besoin de m'en parler?

Le Gold Saint avait déjà vu Childéric trois jours avant, ils avaient parlé des forces de Dionysos, de la mission pour aller les rencontrer, de la future traque de l'ancienne Prêtresse d'Odin... Quelques choses en plus depuis là?

C’était peut-être la première fois que le vieux lion était aussi nerveux depuis qu’il avait repris la toge et le masque du Pope. À vrai dire, encore une fois, il aurait préféré être à l’aube d’une bataille sanglante ou mieux, au coeur d’une terrible mêlée. Il était plus facile de faire face à ce chaos. Plus simple de trouver sa place dans le sang, la boue, le hurlement et la mort pour celui qui avait été forgé pour ce monde que de devoir faire face à ces révélations. Mais comme le reste, il devait faire face. Un amer goût dans la bouche, il attendit l’arrivée de Silas. Leur amitié avait déjà du plomb dans l’aile depuis qu’il avait justement pris le rôle de Pope et là arrivait devant eux le moment charnière. Soit les choses s’arrangeraient un peu, soit au contraire ils n’auraient plus rien à se dire en tant qu’ami depuis lors. Le vieux lion ne savait pas trop quoi penser de ça. Cela serait sûrement mieux pour Silas, mais pas pour lui.

La journée lui avait permis de penser à autre chose et il avait abattu beaucoup de travail. Il avait trouvé plus de temps qu’à l’accoutumé pour s’entraîner et il venait de finir une séance particulière difficile et violente qui lui avait permis d’un peu relâcher la pression. Le chevalier d’or des Gémeaux arriva alors à l’heure et les gardes le firent entrer rapidement. Le vieux lion sortait de son bassin et il avait encore les cheveux trempés. L’ambiance était personnelle, Silas venait voir son ami et non pas son supérieur, au moins là, il pourrait faire preuve de toute familiarité. Le vieux lion sourit en voyant son invité arrivé et lui demande de s’installer rapidement. Il commença alors par servir le vin que Silas avait ramené, puis, il prit place face au troisième gardien et il lui leva son verre.

« - Alors, Silas, comment vont tes gens et surtout, comment se porte ton vignoble ? »

Childéric laissa le temps à Silas d’échanger quelques mots, il l’écouta avec attention, lui posant quelques questions çà et là quand il le pouvait. La nuit avait un peu avancé et la carafe de fin s’était un peu vidée. Le vieux lion attendit le bon moment et il le trouva quand la conversation se tut quelques instants. Il soupira alors une ultime fois et se jeta dans le vide :

« - Bon Silas. Je t’ai fait venir car j’ai quelques choses à te dire. Un secret à t’avouer. Tu vas être blessé. Tu auras raison. Je veux que tu saches d’abord que, si on t’a gardé ce secret, c’est par volonté d’Athéna. C’est elle qui a imposé le silence sur tout ça. Ce silence n’a maintenant plus lieu d’être alors il est temps pour toi d’apprendre la vérité. Je voulais que ça soit moi qui te le dise. »

Il marqua un silence de quelques instants, il prit une nouvelle profonde inspiration. Il avait encore en tête l’amère et normale réaction de Ryme et la douleur que cela lui avait causé. Mais il devait le faire. Il devait arracher ce pansement d’un coup sec.

« - Nimue est encore vivante. »

Et voilà, il venait de sauter dans le vide, il ne pouvait plus revenir en arrière.

L'ambiance était bonne, c'était bien l'une des soirées entre amis qui étaient devenues bien trop rare pour Silas. Du vin, un peu de nourriture et une ambiance chaleureuse, bien loin du protocole. Ils parlèrent de tout et rien, il avait d'abord répondu à Childéric sur sa première question.

_ Anthéa, Iolas et Markos se portent bien. Iolas a fini la renovation des bains du temple pendant notre voyage à Camelot, fini les fuites.

Ça s'était pour la petite famille qui gravitait autour du temple des Gémeaux.

_ Laelia se porte bien tout comme Claudius et Regulus, elle a hâte de s'installer dans le domaine.

Ça s'était pour la véritable famille.

_ J'ai signé avant-hier toute la paperasse mais c'est officiel le domaine et le vignoble sont désormais à mon nom et à celui de Laelia. On a déjà choisi un nom, le "domaine aux deux visages". Les vignes sont bonnes mais elles auraient besoin d'être mieux entretenues, cela n’empêchera pas la première cuvée pour les prochaines vendanges. La villa est légèrement défraichie mais d'ici fin avril ma soeur pourra s'y installer. Une aile doit être complétement refaite mais ce n'est pas une urgence, cela sera fait sur la prochaine année.

Ça c'était pour le vignoble et l'avenir. Puis les discussions allèrent sur tout et rien, la nostalgie, les blagues... Puis après quelques rigolades, Childéric repris un ton plus calme et posé, il semblait même assez craintif et les mots qu'il employa firent taire le sourire sur le visage de Silas. Il ne comprenait pas trop au départ. Athéna? Secret? Mais il parlait de quoi? Pourquoi la? Pourquoi à ce moment alors que la camaraderie et l'amitié battait son plein? Il l'avait amadoué, attendri pour placer une informations capitales et que Silas le prenne mieux? Il avait utilisé ce sentiment de paix et de camaraderie pour pouvoir lui avouer une chose? Il se leva de son fauteuil toisant le vieux lion d'un regard interrogateur.

_ Parle!

Il avait haussé le ton, oui, il n'avait pas le Pope ce soir-là devant lui mais Childéric. Son ami lui délivra sa parole, l'information secrète. Le secret! Il déglutit fortement, il ne comprenait pas vraiment, vivante? Il voulait être heureux de l'apprendre, heureux pour son amie qui n'était pas morte, pour la femme de son meilleure amie vivante mais dans son esprit les mots de Childéric lui délivrait une chose, ce n'était pas une chose neuve, s'il y avait eu un secret à garder c'est que cela durait depuis des semaines, voir des mois... Il serrait sa coupe de vin, elle commençait à se tordre sous la pression de sa poigne, il y avait même un commencement de chaleur qui émanait sa main.

_ Depuis quand? Quand est-elle revenue?

La question qui allait basé la suite. Mais le regard de Silas était plus noir et son ton encore plus dur. Il savait, il savait qu'on l'avait pris pour un con, qu'on s'était joué de lui et cela ne passait pas... Quand? Quand! Il commençait à bouillir, la colère commençait à le submerger mais il tiendrait encore. Il voulait ses réponses, il voulait tout savoir avant! Il n'avais pas ressenti cela depuis tellement longtemps...

Briser les secrets

« Depuis que Morwenna des Poissons s’est présentée au Sanctuaire pour endosser l’armure des Poissons. »

Le bruit de ses pas donna un relief sinistre à ses mots.

« La réponse était sous tes yeux depuis le début, Silas. » poursuivit cette voix aux accents familiers. « Nous sommes désolés de t’avoir gardé si longtemps en dehors de nos secrets. Mais nous n’avions pas le choix. »

Si le timbre était ferme, le visage qui se dévoila sous les yeux des Gémeaux trahissait toute sa culpabilité, sa tristesse de lui avoir menti depuis si longtemps. La jeune femme s’était glissée aux côtés de Childéric, drapée dans son carcan d’or mais délivrée d’un autre : son masque était absent, délaissé au profit d’un peu d’humanité.

Malgré tout, la Sainte finit par céder et alla prendre son ami entre ses bras.

« Je suis désolée, Silas. » sa gorge se serra. « Pour tout. Ça, ta douleur, pour Ainia… »

Elle le regarda avec une grande tristesse.

« Le jour où tu t’es présenté à mon Temple pour me demander une rose, j’ai failli céder. Je voulais te donner plus que ce triste reliquat. Ce souvenir… cette souffrance. Et puis je suis tombée malade. »

La Sainte des Poissons se recula, échangea un bref regard avec son bien-aimé.

« J’aurais pu mourir et disparaître vraiment et t’épargner cette peine. En vérité, devant la probabilité de ma mort prochaine, j’ai égoïstement pensé que cela avait encore moins de sens de te dire la vérité. Je serai restée dans mon caveau. » Un soupir. « Mais tout a changé. Je suis en vie. »

Une ombre passa fugacement dans ses prunelles déjà troublées. « Je comprendrais que tu nous en veuilles, Silas. D’autant que le secret n’est plus et que bientôt, par ma faute, la Guerre se profilera. »

Never-Utopia

Depuis combien de temps quelqu’un ne lui avait-il parlé comme ça ? Il avait apprécié néanmoins prendre le temps de retrouver son ami. Il aurait aimé que cela puisse se passer dans cette révélation, cette pierre à jeter dans la marre. Si bien qu’il s’arrêtât sur quelque chose de trivial, la façon dont Silas c’était adressé à lui. Ce ton autoritaire, ce besoin de savoir, cette façon d’exiger. Il n’eut pas longtemps à attendre, pas longtemps à répondre et les mots ne virent même pas de lui. Après tout, qui de mieux qu’elle pour répondre à cette question : depuis quand ? Depuis quand, par Athéna et Akrites, puis par eux même, avaient-ils du prendre tous leurs proches pour des cons ? Une nécessité. Une absolue nécessité. Le temps de laisser les choses se décanter, le danger d’être repoussé. Le mensonge avait rempli son office : il leur avait offert du temps. À eux maintenant de faire face aux conséquences.

Il retient un soupir. Le vieux lion savait que son épouse appréciait les entrées théâtrales. Et là, tout le monde en avait pour son argent. Il scruta le visage de son ami, pour lire sa réaction. Et il laissa la primeur de la révélation à son intéressé. Silas ferait sûrement les connections. Il n’était pas idiot, loin de là même. Childéric hocha la tête, l’air contrit.

« - Oui, le secret nous avez été imposé par Athéna et Akrites. Elle m’a fait promettre, quand je suis devenu Pope, de le garder le plus longtemps possible. Personnes ne devaient savoir, absolument personne. »

Le Pope laissa ensuite la douzième gardienne vider son sac. Lui aussi, aurait des choses à dire, mais plus tard. Son coeur se serra quand elle déclara tout ce qu’elle avait pensé sur sa mort. Cette période avait été compliquée, car en plus de tout ça, le vieux lion avait eu sa meute à gérer et tous les soucis qui avaient secoué cette dernière. Sans pouvoir vraiment s’appuyer sur personne. Seulement cette couronne sur sa tête pour le soutenir. Mais c’était son devoir, le sacerdoce qu’il avait choisi de subir pour que les autres n’aient pas à le faire. Discrètement, elle pourrait sentir au moment où leurs regards se croisèrent le lien les unissant se resserrant un peu, comme si doucement il prenait sa main.

Plus tard, ils auraient un autre point à aborder. Un point sur lequel, l’un comme l’autre se montrerait moins… conciliant, sûrement. Mais un pas à la fois, avant d’apprendre à courir, il fallait d’abord apprendre à marcher. La confiance était brisée et Silas était en droit de demander des réponses, mais plus que des réponses, il y avait une chose qui passait au-devant de tout. Mais chaque chose en son temps…

Secret, mensonge. C'était du pareil au même. Pourquoi n'avait-il pas été dans la confidence? Lui justement. N'était-il pas digne de confiance? Athéna avait-elle si peu d'estime pour lui? Ses fautes étaient moins graves que certains, même Childéric avait fauté plus que lui avant ce mensonge, en retrouvant justement Nimuè...

_ Avez-vous au moins essayé de demander de me porter au pire dans la confidence?

Il serrait la coupe, la réduisit à une masse métallique. Celle-ci rentra alors dans sa chair, brûlante, elle le marqua au lieu de le faire saigner, il était tellement en colère. Colère que son ami se soit joué de lui, qu'il l'avait trahi en jouant de ses sentiments. Il en était aussi triste, grandement triste du peu de confiance qu'on avait pour lui. Dans son temple, deux visages de son armure vibrait, ressentant complètement la détresse émotionnelle de Silas.

Pas de réponse pour le moment, sa soeur d'arme, celle qui était la meilleure amie de son aimée d'autrefois le pris alors dans ses bras. Il sentait sa chaleur, son amitié et telle une éponge, Silas s'en gorgea. La colère se dissipa un moment, et des larmes perlèrent à ses yeux.

_ Ni...muè...

Il ne put s’empêcher de la serrer aussi dans ses bras, logeant son visage le long du cou de la rousse qui put sentir les larmes de son ami couler. Il resta ainsi un moment, mais bientôt la rage reprit son droit car tel était les gémeaux, changeant et ressentant tout en double. Il s'écarta de Nimuè, porta son regard sur le barbu qui était pour ce soir la que Childéric et non le Pope.

_ Tu étais plus morte que vivante en tant que Morwenna et... et te voila revenue pleine de vie comme à l'époque où tu étais devenue la Sirène Maléfique. Il faut que je sache comment?

L'exigeait-il? Pas vraiment mais ils pouvaient faire cela pour lui, lui répondre pour apaiser la voie du mensonge.

_ Le secret s'évente quand Atlantis semble s'écrouler après la mort soudaine d'Orpheus. Vous n'avez rien avoir avec cela j'espère?

Il ne le pensait pas vraiment mais disons que cela pourrait être une possibilité. Il fallait qu'il lui dise. Il fit un pas en arrière, toisa le franc qui se tenait légèrement à l'écart. Avait-il honte de tout cela? Le regret le rongeait-il? Silas regarda ensuite sa main, la brûlure marquait sa paume gauche de son pouce jusqu'à l'annulaire, elle lui lançait.

_ Il serait mentir de dire que j'aurais du mal à pardonner cela...

Il montra sa main au couple.

_ Il me faudra du temps pour guérir cette blessure et je sais que vous comprendrez... Childéric, notre amitié s'en trouve encore amoindrie, ton rôle de Pope avait apporté de la distance et ce mensonge jetait aussi en fait un froid... Mais quelque chose vient de se briser, mais je pense que tu peux comprendre... Même si cela était soit disant une nécessité, je ne peux pardonner... Du moins pour le moment. J'ai besoin de réfléchir, de m'écarter. Mon voyage en Francie m'aidera je pense... Et peut-être qu'après un certain travail sur moi, et sur nous, le pardon arrivera mais pour cela, plus de mensonge entre nous. Le Pope peut me mentir, omettre des choses, mais plus Childéric.

S'il fallait passer sur une segmentation plus prononcée, qu'il en soit ainsi mais Childéric devra faire un geste pour que celui qui était son meilleur compagnon quand il portait l'or lui revienne à lui.
Un souvenir lui traversa la tête, une phrase d'Athèna à Jamir puis un mot de Childéric en Italia.

_ L'enfant?

Une graine germa dans son esprit... Et si?... Non...

Briser les secrets

Nimuë savait qu’ils auraient à faire face, à faire front commun dans cette bataille. Fratricides ? Elle espérait ardemment qu’ils n’en viendraient pas jusque-là. Pourtant, les mots qu’ils assènent reflètent une dureté qui fauche l’âme autant que le cœur. Certains furent surtout destinés au Lion.
La Sainte lui concéda volontiers ces quelques vérités. Ce pour quoi elle luttait, elle aussi, vis-à-vis de Childéric. Sa mâchoire se crispa. Refouler ses larmes devint trop pénible devant celles de son ami. Alors elle partagea ce moment de paix, d’abandon. Fugace, car le vent souffla encore plus fort.
Ils avaient été très loin. Trop loin pour préserver leurs secrets.

Trahisons.

Nimuë relâcha les Gémeaux à contrecœur. Mais elle savait qu’une étreinte seule ne suffirait pas à effacer toute l’ignominie de leurs actes. Pas même toutes les excuses du monde. Pourtant, elles étaient nombreuses à se presser sur ses lèvres.

Son regard obliqua vers Childéric. Il accusait le coup comme il le faisait toujours. Avec peut-être plus de détachement qu’à l’ordinaire. Non. Depuis ces quelques années à avoir endossé la couronne et la toge. Un semblant de colère gravita dans ses prunelles claires, en résonnance avec l’ire de Silas. Elle se garda bien de tout commentaire.

Quand son ami lui demanda des explications, la jeune femme eut un moment de flottement. Derrière ces mots se cachait une méfiance toute manifeste : le doute venait obscurcir le jugement du chevalier d’Or.

« Parce que j’ai combattu aux Enfers. » annonça-t-elle abruptement. « Japeth s’est sacrifié pour moi et grâce à lui, j’ai pu rétablir ce Cycle que Lucius, mon maître, avait brisé. C’était par sa faute que le poison des Poissons me tuait. »

Une vérité toute crue. Dévorante.
La dureté du regard de la Sainte s’affirma.

« Tu… nous penses vraiment capables de… » le reproche mourut tout aussi vite car elle comprit que la question était légitime. Quels monstres étaient-ils devenus aux yeux de Silas des Gémeaux ?

« Je comprends… » souffla Nimuë avec douleur.

Elle observa Silas. Vit presque le fil de ses pensées s’accorder, les ténèbres revenir. La Sainte ne trouva pas la force de lui répondre et se détourna, fauchée par les émotions qui se bousculaient en elle.
Son corps trembla d’indignation. Elle se haïssait tant.

Never-Utopia

Childéric regarda Silas quand il posa sa question. Il en connaissait déjà la réponse. Non, l’idée n’avait même pas traversé l’idée du vieux lion. Un secret, à partir du moment où il est connu de plus de deux personnes n’en est pas vraiment un déjà. Et Silas avait ce problème avec les mensonges qu’il avait tendance à les laisser glisser entre ses doigts. Mais ce n’était pas le moment pour faire ce genre de remarque et il se contenta alors simplement de faire un non de la tête. Silas le comprendrait bien par lui-même. Et il s’effaça un peu, laissant le troisième gardien retrouver l’amie qu’il avait perdu pendant longtemps. Il fallait juste que le byzantin fasse attention à ne pas dépasser la limite malgré la frustration qui était la sienne. Et la question qu’il venait de poser jouer doucement avec ses limites et le regard sombre et noire qu’il lui jeta serait sa seule réponse.

« - Nous avons tous à mentir, Silas. Et surtout moi. Mon rôle consiste principalement à ça. Toi… tu ne sais pas le faire. Tu es trop honnête pour tout ça. »

La suite par contre fit passer un éclat sombre dans le regard du vieux lion. Il pouvait sentir l’émotion qui venait de secouer sa femme, et, à travers le lien, cette dernière n’aurait pas de mal à ressentir la problème tempête qui venait de le secouer. Il était profondément tiraillé. Il aimait Silas, comme un frère. S’il avait un côté trop tendre avec Ryme, il était à l’opposé plus dur avec le gémeau pour justement que ce dernier s’accomplisse. Qu'il devienne le chevalier qu’il devait être mais là… le terrain était glissant. Tenir sa langue n’était clairement pas le point fort du troisième gardien et plus d’une fois, il s’était retrouvé dans des situations qui lui avait porté préjudice. Soit par sa grande gueule soit par sa forte tête. Silas au final, était un risque, un risque qu’ils avaient pris tous les deux, car au final, il avait confiance en lui mais…

« - Tu sais, Silas, tu sais. »

Et les yeux de Childéric se firent alors ceux du prédateur, et c’est d’une voix dure qu’il continua :

« - Mais rien ne doit sortir d’ici. Rien. Absolument rien. »

Pas besoin de rajouter des menaces sur tout ça, le ton parlait pour lui. Si Nimue avait été balayé par la remarque, le conflit intérieur du lion lui, venait d’atteindre l’un ses points culminent et sa belle, à travers le lien, pourrait le sentir. Il ne reculerait devant rien, absolument rien, pour la protection de leur fils.

Silas écoutait Nimuè, il était content pour elle, content qu'elle soit revenu. Mais pour cela, une vie avait était prise, même si c'était celle d'un supposé ennemi, ou du moins pas un allié déjà. Tout rentrait presque dans l'ordre au final, sauf un point donc l'enfant, les paroles de Childéric montrait bien qu'il allait resté avec sa sœur.

_ Childéric je sais que ton rôle l'exige et ce n'est pas au Pope à qui j'en veux mais à la personne derrière le masque, à mon ami qui n'était pas encore Pope à ce moment là...

Avait-il demandé à Athéna de le mettre dans la confidences? Avait-ils? Silas supposaient qu'ils n'avait même pas tenté cela, elle aurait peut-être accepté, qui sait...

_ Rien ne sortira d'ici, tu me prend pour qui d'un coup? Mais je veux savoir ce que vous avez dit à Laelia sur les origines de l'enfant. Et j'ai une autre question, allez-vous lui reprendre un jour?

Nul doute ne faisait que la soeur de Silas s'était attachée à l'enfant, l’élevant comme le sien, l'aimant comme le sien et Silas avait commencé à l'aimer comme le serait un véritable neveu. Nul doute aussi qu'il aurait une relation autre maintenant qu'il connaissait la vérité, il était son oncle par le coeur, par l'amitié qu'il avait avec ses parents. Regulus qu'il avait pris pour le possible rejeton d'Akritès à l'époque lors d'une soirée arrosée n'était autre que le fils de son remplaçant...

_ S'il arrive quelque chose à Claudius et Laelia par votre faute, vous le paierez... Mais je suppose que le choix de le placer dans ma famille sous-entendait que je le protège indirectement non?

Il les regarda d'un air dur quelques instants, montrant tout sa conviction par rapport à ses paroles. Puis son regard s'adoucit, il en devint même un peu triste.

_ Malgré cela... Je vous plains mes amis. Ne pas pouvoir l'approcher, ou l'élever par vous-même, alors qu'un idiot comme moi s'en occupe dès qu'il va rendre visite à sa soeur... Pourquoi ne pas l'avoir élever ici, le placer auprès des servantes de la déesse? N'est-ce pas l'endroit le plus sur au monde?

Il s'en voulait de certaines paroles qu'il avait eu, mais il la colère le rongeait tout de même et il faudrait du temps pour estomper tout cela.

_ D'ici peu, il ne vivra plus derrière les remparts de Constantinople quand il sera au domaine. Y aurait-il moyen de faire passer un de nos Silvers de temps au temps aux alentours? Surtout quand je ne serais pas ici.

Il s'inquiétait pour sa soeur et son neveu mais aussi pour l'enfant de Nimuè et Childéric, il devait se l'avouer, il l'aimait encore plus maintenant qu'il connaissait ses origines...

Fuir

Elle leur tourna le dos. Les Poissons s’étaient détournés, comme si ce simple geste offrait une protection suffisante contre la souffrance qu’elle ressentait. Or, chaque question devenait une vague dont la violence la frappait et l’emportait vers le fond. Ces interrogations l’amenaient à se rappeler des souvenirs douloureux qu’il était impossible d’enterrer. Et bien que la O’Bannon n’ignorait en rien cet état de fait, se prémunir de ces assauts verbaux fut son seul et futile réflexe.

Avoir la force de lui dire que tout cela était impossible, formuler à haute voix, tout ça rendrait sa douleur plus vibrante et tangible. Alors la Sainte se tut, terrassée. À travers le Lien qu’elle partageait avec Childéric, ce dernier pourrait ressentir toute sa détresse comme elle, saisissait pleinement sa détermination. Elle aurait pu se consoler de ressentir cette volonté en lui, ce fragment d’humanité, mais… Nimuë voyait plus loin. Elle voyait les chaînes de sa fonction l’entraver.

Car, devant un choix, lui, le Pope de leur Déesse, n’aurait pas l’opportunité de se trahir. Il choisirait le devoir.

Face à cette constatation intérieure, la rousse tourna un regard empli de désespoir vers son époux.

« J-je suis désolée, je ne peux pas. » balbutia-t-elle tandis que les larmes dégringolaient sur ses joues.

C’était au-dessus de ses forces. Quand bien même elle ait récupéré sa Vie, sortie de cet Enfer par le sacrifice d’un homme, Nimuë devait se rendre à l’évidence qu’un autre combat s’engageait maintenant.

Vivre sans son enfant.
Voir Childéric sombrer peu à peu, alourdit par la couronne et le devoir.
Vaincre les regards méprisants, et celui de Silas qu’elle pensait être son ami.

C’était au-dessus de ses forces.

Elle quitta précipitamment la pièce. Après tout, l’atlante n’était douée que pour cela. Fuir.

Spoiler:

Never-Utopia

Le vieux lion planta ses yeux dans ceux de son ami quand il demanda pour qui il le prenait. Et bien… pour celui qu’il était. La suite de ce qu’il venait de dire n’était que l’explosion de sa… naïveté. Et ses yeux de fauves n’auguraient rien de bon. Déshumanisé, proche d’une colère primale, paternelle. La souffrance qu’il ressentait vibrant du lien ne faisait que nourrir cette rage bouillante. Silas avait le droit d’être en colère, mais il n’avait pas le droit d’être stupide et encore moins le droit d’être blessant. Une profonde compassassions, chargé d’amour et de tristesse vibra dans son lien avec Nimue. Lui envoyant tout ce qu’il pouvait de positif pour lui apporter le soutien dont elle avait besoin. C’était aussi difficile pour lui, mais il devait faire face, pour eux et surtout pour ce petit qui n’avait rien demandé. Alors, glaciale il finit par répondre à Silas après avoir laissé le soin au silence de devenir oppressant.

« - C’est entre moi et ta sœur. Ça ne te regarde pas Silas. Mais c’est… son fils, bien plus qu’il ne sera jamais le mien. »

La colère et la frustration vibraient maintenant dans les yeux de Childéric plus que jamais. Sa propre douleur qui lui rongeait le coeur et ce mal dont il ne se délirait jamais. Cet ultime sacrifice qu’il avait fait pour justement que ce petit puisse vivre, et non pas simplement survivre.

« - Pourquoi crois-tu vraiment qu’on se soit donné autant de mal ? Pourquoi crois-tu qu’on ne l’a pas élevé ici, qu’on l’a amené dans l’empire, lui laissant un vague lien avec nous, à travers toi, mais que quasiment personne serait capable de remontrer ? Pourquoi crois-tu qu’on s’inflige cette souffrance qu’elle ne peut pas supporter et qui l’a tue plus sûrement que la maladie qui la rongeait. Réfléchis, Silas, réfléchit ! Pourquoi est-ce qu’on ne t’a pas parlé de ça et pourquoi personne, à part nous deux et Athéna n’étaient au courant ? Trouve ta propre conclusion Silas et tu verras qu’avec tes mots, tu as fait plus de mal que tu ne pourrais jamais le réparer… Alors que tu pensais bien faire. »

Les mensonges sont certes douloureux, mais que dire des mots chargé de compassion et d’amitié d’un ami, qui touchent plus certainement que le plus violent des poisons. Un profond soupir quitta les lèvres de Childéric et d’un coup, l’abattement se fut presque plus fort que lui. La rage l’aidait à tenir, comme elle le faisait toujours. Mais étrange, une rage violente qui n’était pas dirigée vers Silas. Une rage sans objectif, sans but, sans cause. Voué à se dévorer elle-même et se consumer aussi rapidement qu’elle était venue. Une rage qui était l’illustration du sacrifice d’Hector pour sa cité. Une vérité que Silas ne comprenait pas pour le moment, mais peut-être qu’après les mots de son ami, il comprendrait le pourquoi…

« - Tu es décidément, vraiment trop humain et bon pour tout ça, Silas.

La fuite. C'était la solution qu'elle avait trouvée face à Silas. La fuite face à la honte et à la deception. Sur le moment le Gold saint s'en trouva étonné, se demandant où était la soit disant courageuse guerrière. Elle était surement la cause d'une possible nouvelle guerre, non ils l'étaient en fait et son choix se porta sur les larmes et la fuite au lieu de se dresser face à son homologue d'or. Si elle agissait ainsi devant lui, qu'allait-elle faire face à leurs ennemis? Mais Silas n'eut le temps d'y penser plus car le vieux lion se dressait devant lui, il le sentait bouillonner, il connaissant encore assez celui qui avait été son meilleur ami pour savoir comment il allait réagir. Mais que Childéric n'aille pas croire que Silas allait se démonter, oh non. Comme il l'avait dit ce n'était pas au Pope qu'il s'adressait en cette soirée, et le Pope n'avait pas à entrer en jeu ce soir la, c'était leur histoire, des histoires de personnes. Voulait-il être méchant en disant cela? Voulait-blesser? Peut être, ou peut-être allait-il tout simplement établir une vérité que même les parents n'avaient pas songer.

_ Il est son fils plus que le votre? Alors sache que s'il arrive malheur à Laelia, j'en deviendrais son père par la force des volontés écrites de ma chère soeur. Non ce n'est pas cet enfoiré d'Antonius qui sera nommé tuteur de Claudius et Regulus, mais bien moi Childéric! Je me demande bien comment tu réagiras quand la chair de ta chair m’appellera moi Papa et non toi? Sache que je ne le souhaite pas... Car cela voudrait dire que j'aurai perdu ma sœur et que je t'aurai voler ce qui est surement la chose la plus importante de ta vie.

Il marqua une pause, regarda le Pope, sa réaction.

_ Ne vient pas me dire que ton rôle de Pope est plus important que ton fils. Car si cela avait été le cas, l'enfant serait ici et non caché auprès des miens. Répond moi en toute sincérité Childéric. Soit sincère et je pourrais encore t'appeler mon ami.

Silas se détourna du franc, fit quelque pas vers la sortie. Il stoppa sa marche, attendant la réaction du grand barbu.

_ Crois-tu que je ne le sais pas? Je possède les sentiments de deux âmes, j'agis et j'aime pour deux... Mais dis-toi que si je basculai, c'est la haine et la colère de deux personnes qui seront en moi... Car telle est ma dernière malédiction pour avoir vaincu la précédente...

La présence d'Almeïsan, sa part d'ombre. Son lien avec Methos que Sunilda avait libéré, tout cela faisait parti de son parcours, de sa transformation. Mais pour être en paix avec tout cela, il n'avait pas eu le choix. Vivre et ressentir pour deux, voila ce qui se passait maintenant chez le Gold Saint des Gémeaux et c'est de là que venait la résonance sentimentale avec les six visages de son armure. Il avance encore. Il passera la porte si Childéric ne le retient pas plus.

Fut un temps où, jeune lion, il n’aurait pas été capable de se retenir. Fut un temps où il se serait complètement abandonné au chaos de ses émotions et sa colère. Fut un temps où il aurait ici, attaqué Silas et l’aurait certainement tué. Oui, le troisième gardien était fort, mais le Pope l’était encore plus, beaucoup plus. Il était plus fort qu’il ne l’avait jamais été, presque effrayé par son propre pouvoir croissant sans vraiment rencontrer de limites. Et encore, il n’avait pas vraiment pu se battre sérieusement depuis longtemps. Mais maintenant, il était vieux lion et chef de cet ordre sacré. Maintenant, il avait appris à prendre le pas sur cette bête hurlant toute sa rage contre son coeur. L’avait-il connu déjà si perturbé ? Il ne s’en souvenait pas vraiment. Peut-être parce que, justement, ces mots, ces considérations, cette cruauté abjecte, venait de celui qui, jusqu’à ce moment, il avait considéré comme son ami. Alors, Childéric garda le silence. Un silence froid et lourd. Un silence seulement ponctué par l’extension involontaire sa propre bête. Une forme sombre, presque inquiétant, mais contrôlé, que Silas pourrait ressentir. Une forme qui pourrait l’écraser, à n’en pas douter.

Oh, le duel ne serait pas facile, mais le résultat était connu d’avance, et Childéric espérait que Silas en était conscient. Et vient alors le rire du Pope. Un rire déformé, froid, empli de cette colère contenu. Un rire loin de ce rugissement communicatif et plein de vie, un rire d’animal cette fois, près à tuer. Puis, un dernier soupir avant que les mots ne sortent sa bouche, froid toujours. Il avait pensé à renvoyer son venin au troisième gardien. Il aurait pu lui faire plus mal qu’il ne le pensait s’il avait voulu et peut être avant, l’aurait-il fait.

« - Tu es un abruti Silas, si tu ne comprends pas pourquoi nous avons fait tout ça. Un abruti fini… Ta sœur elle, elle a compris. C’est pour ça, qu’elle nous a aidé. Elle a compris plus vite et mieux que toi, pourtant, je la connais si peu… Alors non, tu ne t’occuperas jamais de cet enfant. Tu ne seras toujours qu’une présence dans sa vie, rien de plus. Même si ta sœur venait à mourir, nous y avons déjà pensé. C’était d’ailleurs son idée à elle… »

Une profonde inspiration avant de comprendre :

« - Un ami n’aurait jamais dit ce que tu as dit, Silas. La cruauté crasse de tes mots ne sont pas justifié, même si tu te sens vexé. Tu illustres parfaitement pourquoi on t’a caché tout ça… Tu es incapable de penser plus loin que le bout de ton nez, de te projeter ou au contraire, de voir ce qui est mieux pour les autres, même si ça te fait du mal à toi, même si ça te tue à petit feu. Tu es incapable de comprendre ça, de comprendre ce que nous avons fait. Sinon… tu ne serais pas comporté comme ce qu’il y a de pire chez un homme, et à te cacher derrière tes malédictions. »

Une profonde expiration maintenant :

« - Va-t-en maintenant. Et peut-être un jour que tu comprendras… »

Les mots du lion ne le touchait pas, le secret l'avait bien plus touché et il se trouvait donc insensible pour le moment. Childéric se trompait sur sa soeur et son compte. Il savait ce qu'il serait en cas de perte, elle lui avait dit et fait promettre. Si elle avait décidé une chose avec lui à l'époque, elle était revenu sur ses mots depuis. Mais il ne pouvait pas le savoir. Mais il n'irait pas causer la mort de Laelia pour vérifier tout cela.

_ Nous verrons bien ce que le destin nous réserve Childéric, ne prend pas pour acquises certaines choses.

Il aurait pu aussi rajouter , et puis jamais deux sans trois comme on dit. Mais de quoi parlait-il? Il le savait lui mais son ami n'allait surement pas le comprendre. Mais à jouer avec le feu, on se brule et celui qui se brulerai ce ne serait pas le troisième gardien. C'était une tête de mule lui aussi.

_ Tu te mets des œillères à croire tout cela, Childéric. A penser que je ne vois que ce que mes yeux voient, mais tu te trompes fortement. Mais soit... Tu as toi même choisi aujourd'hui... Je t'ai aimé mon frère, peut être plus que mon propre jumeau et tu sais plus que quiconque ce que cela représente pour moi.

Il fit un pas vers la porte, sans se retourner. Encore un. Une larme perla de son oeil droit, le franc ne pouvait le voir, peut être il le sentirait dans sa voix.

_ Mon cœur te sera toujours ouvert, quoi que tu dise, quoi que tu fasse...

Et il quitta la salle, puis le temple et redescendit les marches. Le temps panserait les maux et les plaies, il l'espérait.

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