[Début avril 553] Women party ! (Réservé SaintEs et Paros)

Les mirettes parcourent les lettres alignées ; les mains replient un message qui, dans l’instant, retourne à sa place initiale. Cette invitation, réservée aux femmes, est une opportunité alléchante, mais, de prime abord, la Persane hésite, puis refuse la proposition : ces derniers temps, tout devient épuisant. Les vérités ont plusieurs visages, elle le sait pertinemment, mais avec l’absence désormais actée, Mehry n’est pas certaine de parvenir à maintenir la face bien longtemps.

Même le plus solide des masques se brise parfois ;
Le plus talentueux des caméléons tombe et se fracasse.

Un regard subreptice roule sur Parvan, son fidèle compagnon, le seul qui jamais ne trahira. Il n’est pas un Homme. En outre, un geste las ramasse le précieux ney qui sommeille à quelques pas. Voilà des années qu’elle ne l’a pas touché comme cela, que la mélodie n’outrepasse plus l’embouchure. Une idée fugace naît à son contact, accompagne les prémices d’un ventre noué. Le verra-t-elle encore, cette fois ? Comme toujours, la réponse est positive.

Les paupières grandes ouvertes, la demoiselle reprend peu à peu ses esprits, s’autorise un soupir et, finalement, une approbation. Somme toute, elle se redresse avec lenteur, effleure cette amure qui ne bougera pas ce soir, et replace ses masques ; le masque de la gaieté et la masse pâle qui orne ses traits à l’accoutumée.

Le masque de la loi, d’une honte et d’une nécessité à la fois.

Entre l’amour et la haine, il n’y a qu’un pas. Lui, est précisément dans ce cas : il oscille de l’un à l’autre en fonction de ses humeurs, de ses besoins, des objectifs mussés derrière les paroles et les actes.

Ce maudit temple, Mehry n’a d’autre choix que de le traverser. Alors, la serpentes glisse entre les dalles, poursuit la montée des marches jusqu’à parvenir, enfin, à celui de ce vieil ami. C’est l’occasion de voir comment il a modifié tout ce bazar, celui laissé par Râhi autrefois.

Somme toute, la couverture est retirée, dévoile ainsi son visage souriant, rempli de curiosité : les doigts passent dans son dos, se rendent compte que le ney y est toujours accroché. Qu’importe.

— Attends. Tu risques de l’effrayer, souviens-toi de la dernière fois...

Un murmure adressé au serpent, avant que sa tête ne déborde de l’entrée. Les Jades furètent, cherchent une trace de la rouquine que la Vierge mentionnait quelques jours auparavant.

— Dana ? Contente de te connaître, Kaleb a beaucoup parlé de toi. Bienvenue en tout cas, même si c’est peut-être un peu tard. Alors, comment se passe ta soirée ? T'as déjà pu faire quelques rencontres ?

Un arrêt, puis une demande supplémentaire qui l’amuse d’ores et déjà, pointant l'animal qui s'agite contre les pieds de sa maîtresse.

— Dis, tu penses que Parvan peut rester dans le coin ? Disons que c’était un habitué des lieux, fût un temps. Promis, il mordra personne, pas sans bonne raison en tout cas !

Parvan:

Une flamme engendre de la fumée ; l’apprentie au caractère affirmé, selon les dires de la Vierge, l’accoste sans sourciller. Comme attendu, cette dernière ne dévoile aucune trace de timidité, s’empresse au contraire d’accueillir les premiers invités. En outre, les prunelles suivent le mouvement vers l’animal, les mots restants en suspens lorsqu’elle aperçut les paupières closes de l’hôte de la soirée. Quelques paires de secondes, tout au plus, avant qu’elle ne réalise ses propres failles.

— Ah, oui, désolée, j’en oublie la politesse. Mehry, de l’Ophiuchus. Quant à Parvan, disons que c’est un compagnon de route, tu peux l’approcher sans mal s’il se laisse faire. Il n’est pas très friand des surprises, hélas.

Le serpent ne se manifeste pas plus que nécessaire, ne s’enfuit pas lorsque la main se dirige vers sa tête. Il tourne un moment, lentement, autour de lui-même, de ce membre étranger qui lui est présenté, puis libère sa langue à proximité, comme pour léchouiller. La gamine n’a pas l’air mauvaise, si elle se fie aux impressions du reptile. Au-delà de tout le reste, Parvan est celui qui veille sur elle et sur son ney.

— Kalia ? Ah, non, je pense qu’il explorera un peu les lieux pour retrouver ses marques et garder un œil ouvert, rien de plus.

Un nom étranger, puis survient un éclat, une annonce ; une aura que la Persane reconnaît aisément, tant elle danse au cœur du Sanctuaire dernièrement. Dès lors, le corps se redresse, fait désormais face aux Poissons enchantés.

— Le plaisir est partagé, Nimuë ! Disons que cette fête est parfaite pour officialiser l’arrivée de Dana parmi nous.

Une arrivée en tant que Chevalier d’Athéna, bien que le fait de revêtir des armures n’a rien de très reluisant, dans les faits.

— D’ailleurs, Dana, si je peux être utile à quelque chose, n’hésite pas.

Une prévenance qui signifie tout et rien à la fois. Les raisons mussées derrière les paupières fermées ne regardent que la principale intéressée, que cela soit une habitude, une préférence, ou autre chose. Pour l'heure, elle ne posera aucune question. Quoi qu’il en soit, rien ne se perd, et la soirée ne fait que commencer. Si, au départ, Mehry ne voulait pas imposer sa présence, elle n’en perd pas le nord pour autant.

Le message ne passe guère comme il le devrait. Qu’importe, le temps fera son œuvre et les significations s’avèrent nombreuses. Pour le moment, les femmes se présentent, affluent les unes après les autres ; Parvan s’escampe dans un coin reculé et, d’un œil expérimenté, observe sagement les scènes et les invitées. Sans piper mot, l’Iris noir acquiesce aux exclamations des Poissons. L’apprentie du Verseau tient à cette rencontre réservée à celles qui, d’ordinaire, portent le masque : un moyen pour cette dernière de mettre des noms sur des visages.

— Pas besoin de tout ça pour te faire de bonnes amies, rassure-toi. Le geste est apprécié, mais c’est pour te connaître un peu mieux qu’on se réunit. Le reste viendra de lui-même, alors te prends pas trop la tête !

Suivant le mouvement, la nuque se penche et le dos se retourne sans se déplacer pour autant, lorsqu’une voix familière retentit dans la pièce ; une voix qu’elle reconnaît sans mal, tant pas le son que par les bredouillements.

— Installe-toi Argus, tu peux enlever ton masque sans mal ici, alors mets-toi à l’aise !

Sa présence à cette réunion ne lui ferait certainement aucun mal, la rassurerait peut-être également. Elles n’avaient pas encore eu le temps de se revoir, après tout, et Mehry n’abandonne pas l’idée d’une conversation, plus tard, à l’abri des regards indiscrets.

Une chose est sûre, le penchant de Nimuë pour l’alcool n’a pas changé et, si elle avait effectivement pu s’en rendre compte lors de leur discussion précédente, le constater de nouveau restait plaisant. En cela, elle comprenait de moins en moins certaines réactions à son égard, jugées déplacées. Sans autre, la Persane rejoint la troupe, s’installe, écoute la jeune Dana qui pose d’ores et déjà les questions qui enflamment son esprit. Les amandes roulent brièvement vers Nimuë, à la fois amusée par l’empressement de la demoiselle et soucieuse de l’interrogation pouvant être épineuse pour la Rose. Un soutien, en somme, aussi maigre puisse-t-il être.

— Hm, ça doit pas faire loin de vingt ans, maintenant... Et toi alors, comment t'as rencontré Kaleb pour devenir son apprentie ?

Les années durant lesquelles l’Oisillon s’entraînait à ses côtés ne sont guère plus qu’un souvenir. Le temps s’écoule rapidement ; c’est ce que cette discussion lui démontre, à toutes les écouter revenir sur leurs arrivées respectives. Ses paupières se ferment brièvement à l’annonce des Poissons : les sourires discrets se sont plus véritablement un secret pour elles deux. S’il reste des points à éclaircir, ils finiront d’eux-mêmes par ressortir. Les dessous, le Coquelicot les dévoilera peut-être un jour à ses cadettes et Mehry ne se mêlera pas de cela. Elle n’interviendra pas plus que nécessaire, pas plus qu’elle ne le demandera.

Pour une surprise, Dana se présente en tant que Druidesse et relate l’apparition de son armure, de l’approche inopinée de la Vierge. Pourtant, une ombre subsiste et s’incruste sur le tableau ; le silence gagne en longueur lorsque Camelot entre dans la danse. Nimuë, peut-être, le remarquera-t-elle, si tant est qu’elle s’y arrête. La différence est, certes, infime, mais elle existe.

La Persane adresse un sourire à la Coupe, hoche même la tête pour débuter une réponse quelconque. Les rues de Camelot étaient peuplées, il est vrai ; les personnalités, les soldats, les représentants et les civils fourmillaient en vue de l’événement. Brièvement, elle se remémore cette occasion manquée pour une conversation, une bouteille avec le récemment nommé Pontifex, puis la silhouette d’un géant qui disparaît au détour d’une soirée.

— Oh, donc tu viens de Camelot, je vois ! C’est vrai qu’il y avait tellement de monde qu’il n’est pas étonnant qu’on ne se soit pas croisée sur place.

Portant son verre jusqu’à ses lèvres, elle s’abreuve pour troquer l’amertume de sa gorge, de réduire une sourde colère qui menace intrinsèque, à défaut d’être capable d’oublier. Il n’est pas encore l’heure, alors le déguisement doit perdurer. Le reste, Mehry ne l’écoute pas vraiment : elle ne perçoit que des bribes, çà et là, d’un côté comme de l’autre. Plus que cela, elle profite de ce détournement au sujet des jardins et des plantes, des histoires de sorcières pour omettre les raisons de son arrivée au Sanctuaire : il n’y a rien à raconter, rien dont elle ne souhaiterait parler.

Du rouge, du noir.

Les images reviennent comme des flashs, mais elle refuse de se faire envahir ; les fantômes auront tout le temps de rappliquer plus tard, lorsqu’elle sera seule dans son antre avec Parvan. Un Parvan qui, dans un coin, contemple toujours la scène, lançant un regard vers l’entrée de temps à autre. Somme toute, une œillade vers Nimuë, puis vers Dana et Argus, elle renchérit alors :

— Pas sûre que Kaleb accepte de se laisser faire, mais vous trouverez bien un terrain d’entente. N’est pas Vierge qui veut, après tout !

Cela étant, elle attend de le rencontrer autrement, de savoir s’il est plus apte que les précédents. Il y en a un qui râlerait assurément, s’il l’apprenait. L’amorce d’un sourire naît sur l’une des commissures, un brin de nostalgie s’y dépose : en y repensant, il serait temps de prendre de ses nouvelles et de voir quelles sont les pistes découvertes.

Encore un qui complique toujours tout.

Citation :

Petite conclusion de mon côté, je vous laisse faire de même si vous le souhaitez et on pourra éventuellement préciser de quoi on a parlé rétroactivement. Merci à vous trois !

Inlassablement, les questions s’enchaînent, tantôt compréhensibles, tantôt indiscrètes ; la demoiselle en intègre les retours, les uns après les autres, l’esprit vagabond et le museau régulièrement planté dans son verre. Les coups d’œil, les bavardages, elle y participe sans mal, bien que le cœur n’y soit pas. Cependant, ses agissements et ses réactions ne sont guère différents de celles arborées à l’accoutumée. Ceux qui ne connaissent pas ne peuvent pas savoir, plus simplement. Le plus important est de maintenir l’illusion et, le point positif, que la jeune Argus s’ouvre enfin un peu plus. Dès lors, l’une de ses commissures s’étire subrepticement, disparaît l’instant suivant ; Dana est une personne… intéressante, tant est si bien qu’elle se demande si cette dernière supportera le poids des Saints. Cela étant, force est d’avouer que la druidesse pourrait avoir un bon effet sur la plus jeune du groupe, reste à déterminer comment et, surtout, à quel point.

À quoi vous ressemblez ? Face à cette demande, Mehry lâche enfin sa boisson, la repose même. Si la réponse paraît simple pour une majorité, elle ne l’est en aucun cas pour elle, qui n’a jamais été capable de se positionner formellement ; la joie des entre-deux, paraît-il, ou, plutôt, les conséquences de ses racines et des croyances plus ou moins admises. Réprimées, également, parfois. Alors, elle prend le temps pour se rendre compte, pour répondre à son tour, optant pour une description somme toute sommaire : de taille relativement petite, de longs cheveux noirs, une peau bronzée, ce genre d’éléments sans véritable importance.

Le sablier se retourne maintes fois, sonnant bientôt l’heure du départ. La lune domine le ciel, désormais ; sans même l’apercevoir entre les murs du temple, cela reste une certitude ; une certitude que Dana renforce, lorsqu’elle les invite à prendre congé. Prenant appui sur le sol à l’aide de ses mains, son corps délaisse les coussins et son regard furète : son compagnon est dans un coin, enroulé sur lui-même, mais s’étire à la vue de sa maîtresse. Le bras, tendu vers le bas, récupère alors l’animal.

— Merci pour cette petite fête en tout cas, c’est sympa d’avoir préparé tout ça. J’espère que tu t’es pas trop ennuyée, au moins !

Une boutade, tout au plus. S’ensuit une demande pour l’aider à ranger, qui se solde par un échec, chose qui, au final, l’arrange, quand bien même elle ne le montre pas. Un regard s'adresse à Nimuë, pour la remercier derechef et lui proposer de boire ensemble, plus tard. Avant de redescendre, une attention glisse vers Argus, accompagnant quelques mots.

— Si c’est bon pour toi, faudrait qu’on se voie toutes les deux pour discuter un peu.

À l’endroit précis où elles se sont rencontrées, lui indiquera l’invitation reçue quelques jours plus tard.

Citation :

De même par ici. Merci à vous